Gel hormonal, pilule, "slip chauffant", vasectomie... Où en est la contraception masculine tant attendue?
Gel hormonal, pilule, contraception thermique, vasectomie... De quoi dispose-t-on? Avec quels avantages, inconvénients et efficacité?
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- Publié le 25-11-2021 à 07h33
- Mis à jour le 25-11-2021 à 08h58
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Périodiquement, le sujet de la contraception masculine resurgit : à quand la pilule ou toute autre méthode contraceptive pour l’homme ? Pas pour demain manifestement. Alors que les jeunes femmes sont de plus en plus nombreuses à souhaiter délaisser les méthodes contraceptives hormonales pour se tourner vers des alternatives plus naturelles, leurs compagnons sont-ils, de leur côté, plus enclins à prendre leur part de responsabilité dans la contraception du couple ?
"Clairement, oui, nous a répondu le Dr Daniel Murillo, chef de clinique adjoint, à l'Unité de procréation médicalement assistée (PMA), au CHU St-Pierre, il y a nettement plus de demandes depuis quelque temps de la part des jeunes hommes de 20 à 35 ans, intéressés essentiellement par la contraception thermique. Parce que c'est la seule qui soit aujourd'hui disponible et pas trop contraignante. À ma consultation de PMA, je vois entre 10 et 15 patients par mois rien que pour ça. Ils sont essentiellement motivés par le partage de la charge contraceptive. Ceci dit, si la contraception masculine est en vogue, cela reste un phénomène marginal, qui se concentre dans un public plutôt bien informé." Avec ce spécialiste, nous avons fait un tour d'horizon des principales méthodes contraceptives masculines.
1. Le "simple" retrait ou coït interrompu
Aussi vieux que le monde, le retrait ou coït interrompu consiste pour l’homme à se retirer juste avant l’éjaculation, de façon à ce que le sperme ne pénètre pas dans le vagin. Si effectué correctement, le retrait offre une protection de 93 à 95 %, mais, dans la réalité, l’efficacité tombe à 78 %.
2. Le préservatif, qui protège aussi contre les IST
À ce jour, le préservatif est la seule méthode de contraception masculine officiellement reconnue et disponible à grande échelle. Son énorme avantage est de protéger à la fois contre les grossesses non désirées et contre les maladies et les infections sexuellement transmissibles. Utilisé de manière correcte, dans les conditions optimales, le préservatif offre théoriquement une sécurité de 95 à 98 %. Mais en conditions réelles, dans la vie de tous les jours, si le préservatif n’est pas parfaitement utilisé, la protection n’est plus que de 85 % environ.
3. La vasectomie, méthode le plus souvent irréversible
La vasectomie est une intervention qui consiste à couper le canal déférent, c’est-à-dire reliant les testicules à la prostate et qui achemine les spermatozoïdes. Si ce canal est bouché ou coupé, le sperme ne peut plus passer, ce qui ne change rien au fonctionnement sexuel, à l’éjaculation, etc. Trois mois après l’opération, l’homme est en principe stérile. Il s’agit d’une méthode de contraception définitive et, la plupart du temps, irréversible. Cette stérilisation est extrêmement efficace puisque l’on observe un échec sur 1 000 vasectomies effectuées. Elle est généralement réservée aux hommes qui ne désirent pas ou plus avoir d’enfants.
4. La pilule contraceptive pour hommes, au stade des essais cliniques
C'est une piste qui a été extrêmement étudiée dès les années 90. Depuis que l'OMS a démontré par deux études cliniques l'efficacité de la méthode hormonale, on a associé différentes hormones masculines (avec de la progestérone notamment) montrant une efficacité. "Mais on a aussi observé que les différentes formes d'administration, que ce soit la pilule, les injections (hebdomadaires intramusculaires d'énanthate de testostérone) ou les implants, limitent l'adhésion des hommes volontaires pour ce type d'approches, fait remarquer le Dr Murillo. Par ailleurs, il y a un effet ethnique : il semble que certaines personnes répondent mieux que d'autres à cette contraception hormonale." Enfin, faute d'études sur une durée suffisamment longue, l'OMS limite l'utilisation de la contraception masculine hormonale à 18 mois. Quoi qu'il en soit, à ce stade, la pilule contraceptive masculine en reste au stade des essais cliniques de phase 2. Les études réalisées à petite échelle mesurent l'arrêt de la production de spermatozoïdes mais non l'efficacité contraceptive de la méthode hormonale sur un an.
5. Le gel hormonal, très prometteur
Très prometteur, un gel contraceptif hormonal, à base de Nestorone, un progestatif (dérivé de la progestérone) - qui bloque la production de spermatozoïdes - associé avec des androgènes, est actuellement testé dans une dizaine de centres de recherches de référence dans le monde, et notamment en Suède. Facile d’utilisation, il doit être appliqué chaque matin en petite quantité sur l’épaule. Testé par 420 couples dans le monde, il paraît extrêmement efficace. Mais de là à ce qu’il soit disponible sur le marché, il faudra encore attendre en principe quelques années. Principal désavantage du gel, qui ne comporte que très peu d’effets secondaires (parfois de l’acné) : malgré un apport en testostérone, il fait baisser le taux et la production de testostérone, ce qui peut entraîner une baisse de la libido, raison pour laquelle un apport en testostérone est donné. Avantage : outre l’efficacité, la méthode est réversible.
6. La contraception thermique, aussi appelée "slip chauffant"
Comme son nom l'indique, la contraception thermique est basée sur la température. Le principe de cette méthode parfois appelée "slip chauffant" : "Les testicules sont dans les bourses pour travailler correctement à environ 1,5 ° en dessous de la température centrale de l'individu qui est de 37 °, explique le spécialiste en PMA. On s'est rendu compte qu'en augmentant la température des testicules la production des spermatozoïdes s'arrête. Partant de là, une équipe française a développé dans les années 90 le concept de contraception thermique. Cela consiste à remonter les testicules vers l'aine (les creux inguinaux) à l'aide d'un slip troué par lequel passent la verge et les bourses vidées de leurs testicules. En étant près du corps, les testicules voient leur température augmenter. Au bout de trois mois, en moyenne, la production de spermatozoïdes s'arrête." D'après les études de petite envergure déjà publiées, l'efficacité est égale à celle de la pilule. Sur 50 couples suivis sur 537 cycles, il y a eu une grossesse non planifiée due à une mauvaise utilisation de la technique. Ce qui donne un indice de Pearl (calculé comme le nombre de grossesses pour 100 femmes pendant 12 mois) qui est inférieur à 1.
Autre méthode thermique : vendu sur Internet, l'anneau en silicone (Andro-switch) consiste aussi à permettre de maintenir les testicules à l'entrée du canal inguinal. Les avantages de ces méthodes : elles sont non médicamenteuses et réversibles sur une durée minimale de quatre ans, selon les études. Trois à six mois après l'arrêt de la méthode, l'homme retrouve sa fertilité. "Attention cependant, la contraception thermique n'est pas reconnue comme une méthode de contraception officielle, insiste le spécialiste. Les effets à long terme sont inconnus, dont le risque de cancérisation du testicule. Les études de phase 3 manquent et tous les dispositifs qui existent sur le marché ne souscrivent pas à la législation européenne sur le dispositif médical. Tout ce qui est contraception est un dispositif médical qui est soumis à une réglementation extrêmement sévère. Or, tout ce qui est disponible sur Internet en matière de contraception thermique ne l'est pas. Il n'existe aucun dispositif officiel reconnu comme contraception thermique."
7. Les autres méthodes qui sont ou ont été explorées
En Inde, des chercheurs ont développé le concept de la vasectomie réversible, qui consiste en injections dont un gel semi-perméable au niveau des canaux déférents. "On en est actuellement aux études de phase 3, précise le Dr Murillo. Elles montrent une efficacité remarquable. Malheureusement, la réversibilité chez l'humain n'a pas encore été testée. Il faudra donc attendre encore quelques années avant une éventuelle commercialisation." D'autres médicaments agissant sur l'éjaculation ont été développés dans des laboratoires. Le principe : les spermatozoïdes ne sont plus délivrés dans l'éjaculat. Les dérivés de la vitamine A peuvent aussi avoir un effet sur la spermatogenèse. D'autres ont tenté de mettre au point un vaccin contre les spermatozoïdes. Ou de jouer sur la mobilité de ceux-ci… Pour ne citer que quelques pistes parmi bien d'autres qui ont été ou sont encore explorées.