Vacciner les garçons contre le papillomavirus ne sert pas uniquement à protéger les filles
Vacciner les garçons contre le papillomavirus ne sert pas uniquement à protéger les filles, contrairement à ce qu’écrivait ce mardi un éditorialiste du Morgen.
Publié le 09-12-2021 à 11h17 - Mis à jour le 16-12-2021 à 13h16
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Le 7 décembre dernier, l'éditorial du journal flamand "De Morgen" plaidait pour vacciner les enfants contre le coronavirus. L'argumentation de son auteur, le journaliste Bart Eeckhout, comparait deux stratégies vaccinales : celle contre le Covid-19 et celle contre le virus du papillome humain (HPV) ou papillomavirus. On peut ainsi y lire : "Il n'est pas rare qu'on demande à des enfants de se faire vacciner contre une maladie qui ne les affecte pas forcément eux-mêmes, mais qu'ils peuvent transmettre. C'est pourquoi les garçons sont également invités à se faire vacciner contre le HPV afin qu'ils puissent aider à protéger les filles contre le cancer du col de l'utérus".
Or, cette affirmation est inexacte. Bien qu'il soit, dans la majorité des cas, rapidement éliminé par l'organisme après sa contraction - généralement suite à un contact sexuel - le papillomavirus peut provoquer des maladies graves, tant chez les filles que chez les garçons. Vacciner ces derniers n'est donc pas seulement justifié pour protéger les filles.
15 à 20 % des cancers liés au papillomavirus touchent les hommes
Comme l'indique Michaël Herfs, chercheur qualifié FNRS à l'Université de Liège (ULiège) et spécialiste du HPV "les cancers liés au papillomavirus représentent environ 5% des cancers dans le monde. Parmi eux, le cancer du col de l'utérus représente la majorité de ces cas". Selon les chiffres avancés par la Fondation belge contre le Cancer, il représenterait plus de 99 % des cancers provoqués par une infection chronique par papillomavirus.
Toutefois “il y a aussi plusieurs cancers provoqués par le papillomavirus qui concernent aussi les hommes, comme ceux du pénis, de l’anus, la bouche ou la gorge” précise Michaël Herfs. Ils seraient de l’ordre de 15 à 20 % des cas de cancers provoqués par une infection au papillomavirus selon le chercheur.
Les garçons, cible (tardive) de la vaccination
Malgré ces pourcentages non négligeables, cela ne fait que deux ans que les garçons sont concernés par la campagne vaccinale belge contre le papillomavirus, déployée il y a une décennie pour les jeunes filles dès 13 ans.
Le vaccin proposé (le Gardasil 9) est pourtant très efficace pour protéger les hommes contre les infections au papillomavirus, comme l'explique Michaël Herf : "Si le vaccin Gardasil 9 protège contre 90% des cancers du col de l'utérus, il protège environ contre 100% des autres types de cancers, notamment ceux qui concernent aussi les hommes". En effet, ce vaccin - distribué gratuitement - porte sur neuf des treize formes de papillomavirus cancérigènes, dont celles responsables des cancers pour les hommes. Un autre vaccin est commercialisé en Belgique, mais ne porte que sur deux de ces formes.
Une protection à double-sens
Certes, il est correct d'affirmer que vacciner les hommes contre le HPV contribue à réduire le taux de cancers chez les femmes. La vaccination contre le HPV a d'ailleurs montré son efficacité en Australie - qui vaccine la quasi-totalité des garçons depuis 2013 - où le cancer du col de l'utérus a quasiment disparu.
Mais cette logique fonctionne également dans l'autre sens. "Si le vaccin protège les filles alors il protège aussi les garçons, de la même manière que si il protège les garçons il protège également les filles" souligne Michaël Herfs. Selon une étude finlandaise, la vaccination conjointe des filles et des garçons a fourni une "meilleure protection contre le VPH" que la vaccination proposée uniquement aux filles.
“Afin d’être la plus efficace possible, la vaccination contre le papillomavirus, elle doit être réalisée au plus tôt, de préférence avant les premiers rapports sexuels” conclut Michaël Herfs de l’ULiège. Pour les filles comme pour les garçons.

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