Quelle est cette maladie ultra-rare du nouveau-né qui serait sous-diagnostiquée ?
Une équipe de l’UCL a coordonné une recherche internationale sur l’encéphalopathie néonatale BRAT1, dont seuls trente cas ont été répertoriés depuis 2012. Découverte de cette pathologie méconnue à l’occasion de la journée mondiale des maladies rares.
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Publié le 28-02-2023 à 08h59 - Mis à jour le 28-02-2023 à 09h02
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Jusqu’à présent considérée comme maladie ultra-rare, c’est-à-dire touchant moins d’une personne sur 50 000, l’encéphalopathie néonatale BRAT1 pourrait être en réalité plus répandue qu’il n’y paraît. Cette maladie neurologique très sévère – entraînant le décès de la plupart des nourrissons dans leurs premières semaines, voire premiers mois de vie – semble en effet sous-diagnostiquée.
C’est en tout cas l’avis de la Pre Maria-Roberta Cilio, épileptologue pédiatrique et néonatale aux Cliniques universitaires Saint-Luc qui, avec la Dre Evelina Carapancea, doctorante à l’UCLouvain, a coordonné une recherche internationale publiée tout récemment en ligne dans la revue Neurology. Cet article décrit pour la première fois les caractéristiques cliniques de la maladie pour en faciliter la reconnaissance précoce, permettre une meilleure prise en charge des patients et poser les bases pour la recherche d’un traitement curatif.
Une trentaine de cas répertoriés depuis 2012 dans le monde
”Depuis la découverte, en 2012, de l’association du gène défectueux avec la maladie jusqu’à la publication de notre article, seuls 30 cas de BRAT1 ont été répertoriés dans la littérature scientifique, nous dit la Pre Cilio. Jusqu’ici, il n’y avait en effet pas de description des caractéristiques cliniques, c’est-à-dire le phénotype de cette pathologie. Or, reconnaître le phénotype est essentiel pour pouvoir mettre un nom sur la maladie et écarter les pathologies plus fréquentes.”
C’est précisément le travail qui a été effectué par le réseau de recherches établi dans le cadre de l’étude. Il a permis de collecter les informations cliniques, neurophysiologiques et d’imageries disponibles de 19 cas de nouveau-nés atteints d’encéphalopathie BRAT1 provenant de différents centres de recherche dans le monde. De l’analyse de ces données, il est ressorti que les bébés atteints présentent dès la naissance des contractions musculaires (myoclonies) presque constantes, y compris pendant le sommeil, qui ne sont pas de nature épileptique.
”Ces myoclonies sont comme des sursauts multifocaux continus : une fois la main, une fois le pied, une fois les deux mains…, illustre la neurologue. Les enfants sont hypertoniques, c’est-à-dire raides. Ce qui s’accompagne d’un inconfort extrême, non seulement pour l’enfant, mais aussi pour la famille et le personnel soignant qui voient le nourrisson incapable de s’arrêter de sursauter.” Par la suite, les bébés développent des crises épileptiques, qui ne répondent à aucun médicament anticonvulsivant (antiépileptique), et des épisodes prolongés d’arrêt respiratoire et de décélération cardiaque menant au décès dans les premiers mois de vie.
Prescrire un test génétique ciblé
”Certains nouveau-nés font des crises d’épilepsie pour toute une série de raisons : accident vasculaire cérébral, infections, souffrance hypoxie ischémique…, soulève la neurologue. Mais les enfants atteints de BRAT1 sont différents. Ils présentent des caractéristiques propres. La première chose à faire est donc de reconnaître les symptômes spécifiques de BRAT1 chez le petit patient et ainsi pouvoir les distinguer de ceux décrits pour des maladies plus courantes.”
Évitant l’odyssée diagnostique à ces patients qui les oblige à passer par une multitude d’examens, les médecins pourront alors prescrire un test génétique ciblé sur cette pathologie afin de confirmer le diagnostic, guider une prise en charge plus appropriée, répondre aux questions des parents concernant la maladie de leur enfant et leur fournir un conseil génétique précis pour l’avenir.
”L’objectif est de reconnaître une nouvelle maladie, réduire le nombre d’investigations et chercher un traitement curatif, car une maladie non reconnue, non diagnostiquée est une maladie pour laquelle il n’y aura jamais de recherches pour un traitement, ce qui est actuellement le cas pour BRAT1”, regrette la spécialiste.
Un autre point important est de “pouvoir donner aux parents un nom de maladie avant que l’enfant ne décède, souligne encore la Pre Roberta Cilio. Le fait de diagnostiquer l’enfant avant le décès permet aux parents de faire le deuil. Savoir que l’enfant a une maladie à ce jour non traitable est important et participe à la déculpabilisation des parents.”
À savoir
L’encéphalopathie BRAT1 se transmet de manière héréditaire selon le mode autosomique récessif : les deux parents sont chacun porteurs d’une mutation du gène responsable, avec un risque élevé de récurrence pour les grossesses successives. Sur la base statistique, une famille dont les deux parents sont porteurs de la mutation génétique a 25 % de probabilité d’avoir un enfant malade, 25 % un enfant sain non porteur et 50 % de probabilité que l’enfant soit porteur sain. En Belgique, la loi ne permet pas de faire des tests génétiques sur les mineurs pour savoir si oui ou non, ils sont porteurs du gène.
