Des médicaments contre l’hypertension pourraient améliorer l’efficacité de l’immunothérapie du cancer : une découverte de chercheurs belges
Les équipes de l’Institut de Duve ont découvert que des molécules précédemment utilisées pour traiter l’hypertension pouvaient également aider le système immunitaire à mieux combattre les cellules cancéreuses. Un article vient d’être publié dans Nature.
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- Publié le 07-06-2023 à 17h25
- Mis à jour le 07-06-2023 à 18h13
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Pouvant se résumer en une “méthode de lutte contre le cancer qui ne cible pas spécifiquement la tumeur mais qui stimule le système immunitaire du patient pour renforcer ses défenses contre les cellules cancéreuses”, l’immunothérapie est, aux côtés de la chirurgie et de la chimiothérapie notamment, une arme supplémentaire et précieuse dans la lutte contre le cancer.
Cependant, “telle qu’actuellement pratiquée, l’immunothérapie ne permet de combattre efficacement que 30 à 40 % des cancers, explique Benoît Van den Eynde, professeur à l’Institut de Duve de l’UCLouvain. Beaucoup de cancers résistent, en grande partie parce que leurs lymphocytes T (un type de globules blancs censés reconnaître et détruire les cellules étrangères à l’organisme, comme les bactéries ou les virus, NdlR) ne sont pas assez réactifs. Nous avons découvert que des médicaments utilisés jadis pour traiter l’hypertension pouvaient avoir un effet très intéressant pour lutter contre ces formes de cancers résistants à l’immunothérapie.”
Et c’est précisément cette découverte qui a valu à l’UCLouvain - Institut de Duve - Ludwig Institute for Cancer Research une publication dans la prestigieuse revue scientifique Nature, fruit d’études menées depuis plusieurs années par Jingjing Zhu et son équipe dans le laboratoire du Pr Van den Eynde.

Le mode d’action
Que se passe-t-il en l’occurrence ? Ces molécules agissent sur un autre type de globules blancs, les macrophages, dont le rôle est d’engloutir et de digérer les débris issus des agents pathogènes, tels que les cellules cancéreuses, les microbes et les substances étrangères. “Ce sont, en quelque sorte, les “éboueurs” du corps humain, illustrent les chercheurs. Mais en faisant leur travail, ces macrophages alertent aussi les lymphocytes T des anomalies qu’ils rencontrent. Ils jouent ainsi le rôle de sentinelles : ils donnent l’alerte et déclenchent les réponses immunitaires.”
La découverte des chercheurs de l’Institut de Duve a donc consisté à montrer que, à côté de leurs effets hypotenseurs et anesthésiants connus, ces molécules pouvaient aussi stimuler les macrophages dans leur rôle d’informateurs des lymphocytes T. “Ces derniers deviennent ainsi plus réactifs et rejettent plus efficacement les cellules cancéreuses, notamment dans des modèles de cancers résistants à l’immunothérapie standard”, poursuivent les scientifiques, persuadés que “cette nouvelle approche pourrait dès lors “doper” le processus clinique d’immunothérapie, notamment pour ces nombreux cas de cancers pour lesquels l’efficacité de ce traitement est encore limitée.”
Et maintenant…
Des résultats prometteurs qui “incitent à poursuivre la recherche afin d’identifier de nouvelles molécules qui permettront à terme d’envisager des essais cliniques afin de valider des nouveaux traitements susceptibles d’apporter énormément d’espoir aux patients atteints de cancers pour lesquels l’immunothérapie n’est aujourd’hui pas efficace”.
“On pourrait imaginer utiliser les médicaments hypotenseurs existants, selon le Pr Van den Eynde, mais ce serait cependant assez risqué, en raison des effets non désirés et de la toxicité de ces médicaments aux doses nécessaires”. Pour ce spécialiste, “une autre approche est de développer de nouvelles molécules qui agiraient de la même manière sur les macrophages, mais n’auraient pas les effets toxiques non désirés. ” Une voie dans laquelle les chercheurs se disent “déjà bien avancés”.