Le spatial ne fait plus trop rêver
Le secteur du spatial européen était réuni hier à Bruxelles, au Sénat. Il éprouve des difficultés à séduire les diplômés en sciences, très courtisés. “Il faut nous faire rêver” demandent les chercheurs.
Publié le 15-10-2013 à 08h32 - Mis à jour le 26-10-2013 à 16h43
Petite, je voulais être une sorcière, pour pouvoir voler jusqu’à la Lune. Cette idée de marcher sur la Lune me poursuivait. Après, j’ai compris que les vrais sorciers étaient les astronautes, et j’ai voulu être astronaute…” A présent, Andrea Albalat, jeune Espagnole, est ingénieure aérospatiale, et a pu travailler à l’Agence spatiale européenne (ESA).
Le Belge Christophe Meerts, à 25 ans, travaille depuis peu pour une société spatiale suisse, où il s’occupe de la propulsion. C’est en rentrant à 14 ans dans les cadets de l’air, organisation civile soutenue par la Force aérienne, qu’il attrape le virus du spatial. “J’ai eu pu rencontrer Frank De Winne, voir les réalités du monde de l’aérospatial… Evidemment, ça vous pousse vers ces études-là…”, dit cet ancien de Polytechnique à l’ULB.
Ces deux scientifiques faisaient partie de la quinzaine de jeunes Européens invités par le Sénat belge, hier à Bruxelles, dans le cadre de la 15e Conférence interpalementaire européenne sur l’Espace, qui se déroule jusqu’à ce mardi. Le thème : comment susciter l’intérêt des jeunes pour la recherche dans le spatial et pour les sciences en général. Parce que le recrutement, pour les acteurs du secteur, n’est pas aisé (lire par ailleurs). Pourtant, le secteur du spatial peut proposer une panoplie de métiers différents, note la sénatrice Dominique Tilmans, présidente de la conférence. “Ce ne sont pas que des ingénieurs et des astrophysiciens, mais aussi des agronomes, des médecins, des docteurs en droit, des infographistes….” Ou des biologistes, comme la Belge Kristel Mijnendonckx, originaire de Turnhout, et qui travaille au Centre d’étude de l’énergie nucléaire à Mol. “Je m’intéresse à la contamination des microbes dans l’espace. C’est très important dans les missions spatiales de longue durée. La biologie, la physiothérapie, les sciences médicales sont des sciences très importantes, qui peuvent aussi apporter leur contribution au spatial. Si vous ne pouvez pas protéger la santé des astronautes, les missions sont impossibles…”
L’Italienne Francesca Moretto est, elle, spécialisée en droit et politique spatiaux : “Ce sont des nouvelles frontières, il faut les appréhender, c’est aussi un monde qui évolue, c’est passionnant… Le spatial est aussi le résultat d’un effort au-delà des intérêts nationaux…” Pour l’association des industriels européens, les profils vont de plus en plus se diversifier. Car le spatial, grâce aux satellites et leurs divers services, va de plus en plus toucher à la politique, celle des transport ou de l’environnement. “Il faudra des juristes, des spécialistes en marketing...” Mais tous ces jeunes passionnés s’accordent sur un point : une carrière dans le spatial n’est pas vraiment encouragée par le milieu scolaire ou universitaire. “Souvent, dans les universités, il n’existe pas de chaire consacrée au spatial”, constate Vivien Croes, Français actif en Allemagne. “Je n’avais jamais entendu parler du spatial avant la fin de mes études à l’unif ”, regrette Kristel.
Pour ces jeunes, c’est auprès des enfants du primaire, prompts à rêver, qu’il faudrait commencer la sensibilisation. “Petite, j’ai regardé Star Wars, raconte Virginie Hager, ingénieure à l’Esa. Il est nécessaire de recréer du rêve. Il faut voir plus loin que Mars, car nous y sommes… Il faut influencer les plus jeunes avec Jupiter, voire au-delà du système solaire…”
“On peut leur dire que c’est difficile, mais que c’est un métier extraordinaire”, résume un jeune Polonais. Les étudiants devront en effet s’accrocher. Pour travailler dans le spatial, il faut au moins un diplôme scientifique universitaire, convient Christophe Meerts. Et la mobilité internationale (et donc la pratique des langues ) est quasiment incontournable : “ Des pays comme la France ont leur propre agence spatiale, mais les autres pays, dont la Belgique, doivent s’intégrer dans des projets internationaux.”