Migraine, quand tu me prends la tête…
Un sujet migraineux sur trois interprète mal ses propres symptômes. Les pharmaciens ont un rôle important à jouer. La 2e semaine de la migraine en sera l’occasion.
Publié le 12-05-2014 à 16h02 - Mis à jour le 12-05-2014 à 16h03
Quand elle choisit la nuit pour réapparaître, elle n’hésite pas à vous réveiller de douleur. Lorsqu’elle préfère la journée, la migraine s’immisce généralement de manière plus insidieuse. Selon les cas, selon les fois, elle se manifeste par de petits signes imperceptibles au début. Une plus grande irritabilité, peut-être; quelques bâillements, puis un malaise un peu généralisé. Le visage se crispe et la ride du lion se creuse. Parce que la lumière devient de moins en moins supportable, comme le moindre bruit, d’ailleurs. Et les odeurs, de nourriture, de tabac ou de parfum vous écœurent. Jusqu’à la nausée.
Si dès les premiers symptômes, la crise n’est pas coupée par un triptan, tout s’enchaîne. Et s’intensifie. La nuque se raidit, on tente des massages appuyés à sa base pour se soulager juste le temps de la pression. Même chose au niveau des tempes et des yeux dont on ferait bien sortir le globe oculaire de l’orbite pour atteindre ce qui fait si mal, derrière.
Un jour, la migraine choisit le côté gauche, mais on sait que si la crise dure, elle passera à droite, le lendemain, voire le surlendemain. Et lorsqu’enfin, elle se décide à disparaître, c’est une sensation d’épuisement qui s’empare de vous. Mais c’est aussi la délivrance. Jusqu’à la prochaine crise…
Apprendre à reconnaître les symptômes
Les migraineux qui ont une longue histoire derrière eux ont appris à reconnaître les signes précurseurs, annonciateurs. Pense-t-on ! S’il faut en croire une étude qui vient d’être réalisée auprès d’un échantillon de mille personnes par le bureau GfK, un migraineux sur trois se méprend sur ses propres symptômes. D’où l’intérêt de la Semaine de la migraine, lancée à l’initiative des associations de pharmaciens Ophaco et APB ainsi que de l’association de patients La ligue belge contre les céphalées, dont la deuxième édition commence ce lundi.
Sous le slogan "La migraine, plus qu’un mal de tête - en reconnaissez-vous les symptômes ?", la campagne invite à consulter son médecin ou son pharmacien en présence de douleurs à la tête afin de bien reconnaître les symptômes de ce qui peut être une migraine pour pouvoir y remédier de la manière la plus appropriée.
Identifier les déclencheurs
"La migraine est un syndrome complexe, explique le Dr Bart Vandersmissen, neurologue à l’hôpital Erasme à Bruxelles. Elle survient parfois avec d’autres types de maux de tête et peut être provoquée par des déclencheurs comme le stress, certains facteurs alimentaires, des troubles du sommeil ou encore des changements hormonaux." Mais aussi la fatigue, l’environnement (lumière, odeurs, températures, pression atmosphérique…), des rythmes de vie irréguliers, certains médicaments… (Voir par ailleurs) .
Identifier ces facteurs déclencheurs est essentiel et permet de prévenir partiellement les crises. Mais ce n’est pas forcément facile, d’où l’intérêt de noter un maximum d’éléments (consommation d’alcool, vin blanc ou rouge, de certains aliments, repas tardif voire sauté, modifications des habitudes de sommeil, du climat…) dans un journal de bord, qui pourra s’avérer fort utile pour le spécialiste.
De plus en plus de céphalées induites par abus d'analgésiques
Un autre phénomène qui n’est pas à négliger est celui des migraines auto-induites, en l’occurrence par la prise répétée d’analgésiques. Un peu comme si, la consommation excessive de médicaments entretenait la migraine. Comment expliquer ce phénomène ?
"De plus en plus de patients développent en effet ce que l’on appelle des céphalées induites par abus - même si c’est un grand mot - d’analgésiques , nous répond le Dr Vandersmissen, neurologue à l’hôpital Erasme. C’est-à-dire qu’ils anticipent la crise, ils prennent des médicaments avant même d’avoir une migraine. D’autres prennent trop de médicaments pendant la crise. Quoi qu’il en soit, la prise régulière de ces analgésiques risque de chroniciser la migraine. On a vu le même phénomène chez des patients souffrant modérément de migraine et qui ont vu le nombre de crises augmenter parce qu’ils prenaient régulièrement des antidouleurs pour soulager un problème de hanche, par exemple."
Quel est le mécanisme qui entre en action ? "En abusant des analgésiques, les patients créent, au niveau des structures nerveuses impliquées dans la migraine, une espèce d’hypersensibilité qui va déclencher plus vite la prochaine attaque , nous répond le spécialiste. Les nerfs deviennent trop sensibles : un médicament peut les refroidir temporairement, mais ensuite il répond plus fort et déclenche plus rapidement une nouvelle crise. Les patients qui souffrent de ces céphalées auto-induites ont en général plus de quinze jours de migraine par mois."
Pour sortir de la spirale infernale
Alors, comment sortir de cette spirale infernale ? "S’il s’agit effectivement de céphalées auto-induites, le simple fait de réduire la prise des analgésiques, que ces personnes prennent parfois pendant deux semaines, peut déjà réduire la fréquence de la migraine. Il s’agit donc de se sevrer, arrêter les médicaments et supporter la douleur pour voir diminuer la migraine. En pratique, pour aider dans ce processus, on propose souvent aussi un traitement préventif. Et, si c’est véritablement insupportable, on donnera un ou deux médicaments par semaine pour couper la crise." L. D.
Avec ou sans aura, comment prévenir les crises ?
Les différents types de migraine. Le type le plus fréquent (70 %) est la migraine sans aura; 10 % souffrent de migraine avec aura et 20 % souffrent occasionnellement des deux types.
Les causes. La migraine est un état d’hypersensibilité neuronale dans le cerveau dont les causes ne sont pas encore totalement connues. Nous savons certes qu’il existe plusieurs déclencheurs (voir par ailleurs). L’identification de ces déclencheurs se révèle souvent ardue et parfois impossible, car ils ne sont pas identiques chez tous les patients et peuvent même varier de crise en crise.
Les traitements non médicamenteux. Repos; évitement des déclencheurs; tenue d’un journal de bord où l’on note la fréquence, le moment auquel la migraine/céphalée survient, la durée, les manifestations; modifications du mode de vie (gestion du stress, sommeil régulier, alimentation et rythme de travail itou).