Et s’il suffisait de 20 minutes très intenses de fitness par semaine ?
C’est en tout cas le concept de fit20, une chaîne de salles qui s’implante chez nous. Il se base sur la méthode HIT, un entraînement de haute intensité, scientifiquement validé. Mais peut-être pas recommandé à tout le monde. Dossier.
Publié le 12-08-2015 à 18h01 - Mis à jour le 12-08-2015 à 20h08
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Vingt minutes hebdomadaires d’entraînement intense : tel est le concept, basé sur la méthode HIT (High Intensity Training) que proposent les salles de fitness fit20, dont une première s’ouvre à Bruxelles (voir ci-contre). Est-ce bien sérieux et bien raisonnable ? En d’autres mots : efficace et à mettre à la portée de tous et toutes ? Réponses du Pr Marc Francaux, professeur de physiologie de l’exercice à l’UCL.
De façon générale, que peut-on dire de cette approche ?
La méthode HIT est scientifiquement validée. Cela dit, depuis plusieurs décennies, tous les entraîneurs connaissent l’importance d’un travail par intervalles pour l’amélioration de la forme. Partant de là, un chercheur canadien, Martin Gibala a proposé à ses athlètes de produire une série d’efforts brefs et intenses, de l’ordre de trente secondes à intensité maximale. A l’issue du programme, qui a duré plusieurs semaines à raison de trois séances hebdomadaires, l’étude a révélé une amélioration des performances aérobie. Les athlètes avaient progressé d’environ 10 % sur un effort maximal de vingt minutes. D’autres études ont confirmé ces résultats, démontrant que la répétition d’efforts brefs et intenses produit, au niveau cellulaire, une adaptation en tous points similaire à celle obtenue par des heures d’entraînement à intensité moyenne. Ainsi est né le concept de HIT.
Quels sont les mécanismes mis en œuvre dans ce renforcement ?
D’après les travaux du chercheur canadien, tout se joue au niveau des mitochondries de la cellule musculaire. Ces "centrales énergétiques" ont pour mission de brûler les réserves en carburants (sucres et graisses) pour produire les calories nécessaires au mouvement. Plus grand est leur nombre, plus on peut produire de l’énergie. Les travaux des chercheurs ont montré que le HIT déclenche un double effet de multiplication des mitochondries et d’amélioration du rendement de chacune d’entre elles.
Les études ont été menées auprès d’athlètes de haut niveau; peut-on transposer les résultats chez les sportifs amateurs ?
Vu le contexte de l’étude, il s’agit en effet de nuancer ces données et de rester prudent quant à appliquer la méthode HIT à tout le monde, y compris les personnes âgées, comme le suggère la chaîne fit20.
Quelles sont dès lors vos réserves ?
Comme il s’agit d’entraînements de plus haute intensité, le stimulus cardiaque est vraiment plus important. Cela signifie que le risque cardiaque - qui est inéluctablement lié à une activité physique intense - s’avère forcément plus élevé. Cela ne veut pas dire que ce n’est pas bénéfique pour la fonction cardiaque, mais pour les patients coronariens et toute personne à risque - or, on ne sait pas toujours si on a un risque -, il faut rester prudent avec ce genre de méthode. On peut se poser la question de savoir si on peut l’appliquer à tout le monde ou alors dans des conditions médicales strictement surveillées. Il ne serait pas insensé de se soumettre à des examens cardiologiques avant de se lancer dans l’aventure.
Outre le stress cardiaque, y a-t-il d’autres mises en garde ?
Oui, au niveau orthopédique, s’il y a des exercices sur tapis roulant, par exemple. Courir à haute vitesse peut induire des traumatismes au niveau des articulations. Cela plus encore s’il s’agit de personnes en surpoids, car elles vont à chaque fois faire retomber le poids de leur corps sur leurs genoux.
Et les effets bénéfiques ?
Tout comme d’autres types d’entraînements, la méthode HIT induit une augmentation de la consommation maximale d’oxygène. D’un point de vue strictement métabolique, on a démontré que si ce type d’entraînement est bien mené, avec une intensité assez élevée, et si les répétitions sont suffisantes, on obtient des effets bénéfiques identiques à ceux des entraînements de longue durée.
Vingt minutes par semaine, est-ce réellement suffisant ?
Il faut reconnaître que le concept est intelligent. Cela dit, vingt minutes hebdomadaires me paraissent peu pour espérer des résultats. On pourrait plutôt recommander deux ou trois fois vingt minutes par semaine. En outre, il faut être très motivé; car, physiquement, ces entraînements sont beaucoup plus durs que ceux faits classiquement dans des salles de fitness.
Quant à la perte de poids et aux 17°C…
Dire que l’on ne va pas transpirer du tout, j’ai des doutes, car la quantité de chaleur endogène produite dans ce genre d’exercice reste quand même importante. 17°C est une température confortable pour ce type d’exercice. Cela dit, s’ils voulaient maximiser les effets de l’entraînement, ils devraient plutôt faire l’inverse : augmenter la température pour augmenter le stress. Quant à espérer maigrir, je dirais qu’il ne faut pas attendre une perte de poids significative. Pour cela, sans restriction alimentaire, il faut de grandes dépenses énergétiques et donc beaucoup d’exercice physique.
Une première salle ouvre en Belgique
De petites surfaces (de 60 à 80 m²), entre 6 et 8 appareils, pas de douche, pas de vestiaires, "mais une cafétéria", sourit Marc God. "Les appareils ne sont pas ceux que l’on retrouve dans les autres salles de fitness, poursuit-il . Ils sont formatés pour les mouvements lents à forte intensité. Et s’ils sont en nombre limité, c’est qu’il n’y a maximum qu’une ou deux personnes (amis, collègues, partenaires…) dans la salle, continuellement suivies par un entraîneur personnel - c’est impératif et cela fait partie du concept." Tout comme une température de 17 degrés. Ce qui permet de faire les exercices en tenue de ville et de parfaire le principe du HIT (high intensity training) prôné par fit20. "20" qui signifie que 20 minutes d’exercices par semaine suffisent. A ne pas confondre avec le "2.0" accolé à certaines entreprises ou programmes.
300 membres maximum
L’enseigne fit20 a été créée en 2009 aux Pays-Bas, où elle compte aujourd’hui 51 salles, dont 15 ouvertes l’an dernier et 13 cette année. Elle vient d’en ouvrir une première en Belgique (avant de viser la France, l’Allemagne et le Qatar), à Kraainem, au 11e et dernier étage de l’immeuble "Quatre Bras", au lieu-dit éponyme. Une adresse hyperconnectée (sur le ring, proche de Tervueren et de Woluwe-Saint-Pierre) ménageant une large vue sur la forêt de Soignes. Trois à quatre autres ouvertures devraient suivre cette année encore (du côté du square Ambiorix et de la place Stéphanie à Bruxelles, dans le Pegasus Park à Diegem, dans le centre de Gand, à Berchem près d’Anvers…) pour atteindre, d’ici 10 ans, 150 adresses ! C’est ce qu’a planifié Marc God, son tout nouveau master franchisé pour la Belgique. "Pour fonctionner, une salle de fitness classique a besoin de 1 000 à 2 000 membres, explique-t-il. Un fit20 tourne avec 300 membres maximum, puisqu’ils doivent tous être personnellement coachés. On peut donc les multiplier et 150 salles en Belgique est un objectif très conservateur. Ce n’est jamais qu’une salle par… 75 000 habitants. Priorité sera donnée aux villes de plus de 60 000 habitants (Bruxelles, Anvers, Gand, Bruges, Louvain, Liège, Namur…), dans des quartiers d’affaires ou résidentiels. Mais toutes celles comptant plus de 10 000 habitants peuvent convenir. A quoi il faut ajouter les salles intégrées dans une entreprise, un business center ou une résidence services pour personnes âgées (un tiers des 150 salles projetées), comme cela se fait aux Pays-Bas, notamment dans les sièges sociaux de Siemens, Randstad, Ahold…" Marc God a déjà pris des contacts avec Randstad Belgique comme avec des groupes de business centers (Tribes, Regus…). Mais également avec des sociétés situées à proximité des localisations visées qui pourraient acheter des heures de fit20 comme elles achèteraient des chèques-repas, chèques-livres ou éco-chèques.
Plusieurs publics
"fit20 s’adresse à 3 publics-cibles, détaille Walter Vendel, le fondateur de l’enseigne, dont il est allé chercher les principes de base à New York au début des années 2000. Un, les hommes et femmes de 40-50 ans qui courent après le temps et se jugent trop surchargés - par le boulot, la famille, les responsabilités… - pour encore faire le sport qu’ils pratiquaient plus jeunes. Deux, des personnes de la même tranche d’âge qui… n’aiment pas faire du sport mais qui se disent qu’ils devraient en faire et qu’avec un entraîneur personnel, ce sera plus encourageant; ils veulent y passer un minimum de temps pour un maximum de résultats. Trois, les personnes âgées qui doivent se remuscler." Et d’évoquer cette dame de 88 ans qui est entrée, canne à la main, dans un fit20 il y a 6 ans et qui aujourd’hui promène son chien sans appui nécessaire. Mais encore le calcul des jours de maladie en recul depuis l’installation d’un fit20 dans le siège social de Siemens aux Pays-Bas. "Ce qui n’empêche pas d’autres publics, plus jeunes, plus libres, plus sportifs…, à qui on offre de la résistance."
Le réseau belge de fit20 rayonnera avec des franchisés, à l’instar de ce qui se fait aux Pays-Bas (3 salles en propre, 48 en franchise). Appel leur est lancé, tout comme à des entraîneurs.
Le fitness manque d’encadrement
Quelles sont les raisons qui poussent à s’inscrire dans une salle de fitness ? Celles qui font que l’on y reste, ou pas ? Les reproches que l’on peut adresser à ces clubs ? C’est ce qu’a voulu savoir l’organisation de défense des consommateurs Test-Achats. Des quelque 1 400 personnes à avoir répondu au questionnaire, il ressort que près de la moitié (45 %) avait résilié son abonnement au cours de la première année, selon l’enquête parue dans le dernier magazine Test Santé.
Pourquoi faites-vous du fitness ?
Eh non, c’est rarement pour le plaisir que l’on franchit la porte de ces salles. Seule une personne sur cinq dit s’y rendre par goût. Si l’on se résout à mouiller son maillot, c’est avant tout pour améliorer sa condition physique (78 %), se sentir mieux (64 %) ou encore contrôler son poids voire maigrir (63 %).
Quels renseignements vous ont été demandés ?
Au moment de l’inscription, la principale question posée aux nouveaux membres concerne leurs objectifs personnels (69 %), suivis de leur activité physique habituelle (61 %). Dans à peine plus de la moitié des cas, on les questionne sur leur état de santé général (54 %) et dans moins de la moitié sur leurs éventuelles blessures antérieures (48 %). Quant à savoir si le candidat sportif est fumeur, seuls 37 % se sont vu poser la question. " Ces informations sont pourtant indispensables pour offrir un encadrement approprié , fait remarquer Test Santé. Des exercices mal réalisés ou trop intensifs peuvent en effet provoquer des dégâts permanents . L’établissement d’un profil de santé devrait être automatique. "
Que reprochez-vous à ces clubs ?
Plus de deux répondants sur cinq regrettent de ne pas avoir reçu davantage d’explications sur les exercices et les appareils; ils déplorent le manque d’encadrement.
Pourquoi avez-vous résilié votre abonnement ?
Près d’un quart (23 %) des ex-membres évoque comme raison de leur résiliation le manque d’attention personnalisée. Autres raisons : le manque de temps (45 %), de motivation (40 %) ou d’argent (28 %).