Méfiez-vous de ces aliments riches en fer, en vitamines, en calcium...mais parfois richissimes en sucre et en graisses
Publié le 26-01-2018 à 13h55 - Mis à jour le 26-01-2018 à 17h35
Riche en céréales, fer, calcium & 5 vitamines. Waow, cette boîte de biscuits pour enfants, gaiement décorée d'un ourson bleu, ne peut, à première vue, que séduire les parents pressés mais soucieux de donner le meilleur à leurs bambins. A première vue, disait-on, car à bien y regarder, les lunettes sur le bout du nez pour déchiffrer les minuscules caractères du tableau des valeurs nutritionnelles qui se trouve au dos de l'emballage, ô (mauvaise) surprise, que lit-on? 25 % de sucre!
Des exemples comme celui-là, il y en a en veux-tu en voilà, comme le révèle l'enquête qui sera publiée dans le numéro de mars du magazine Test Achats.
C'est que les allégations nutritionnelles et de santé qui figurent sur les aliments sont parfois étonnantes d'originalité. Genre: "participe aux fonctions intellectuelles". C'est ce qu'affiche sans scrupule cette barre chocolatée flanquée du célèbre lapin signant aussi la fameuse boîte jaune de poudre cacaotée qui contribue "au maintien d'une ossature normale" ainsi qu'à "une fonction cognitive normale comme la mémoire et la concentration". Si si. Mais c'est aussi, et surtout, près de 75 % de sucres qui vont "compléter les bienfaits du lait". Dans ce cas...
Si les produits pour enfants rivalisent d'ingéniosité pour mettre en avant des allégations nutritionnelles et/ou de santé alors que, globalement, le produit est malsain (car trop gras, trop sucré, trop salé...), ils sont loin d'être les seuls. A peu près tous les rayons en sont en réalité remplis.
Des ingrédients alibi
Une autre tactique utilisée pour berner le consommateur consiste à incorporer des ingrédients alibi. Lorsqu'une allégation n'est pas encore autorisée, c'est-à-dire qu'elle est en attente de validation par l'EFSA, l'agence européenne de sécurité des aliments, les fabricants peuvent les utiliser sous leur propre responsabilité.
Lorsqu’une allégation a été refusée, comme établir un lien entre probiotique et immunité, elle ne peut plus être utilisée. Dans ce cas, le fabricant peut essayer de "contourner" le refus en ajoutant un autre produit qui permet d’utiliser l’allégation. C'est ainsi que certains n'hésitent pas à ajouter une petite quantité d'un autre ingrédient, dit alibi, pour pouvoir malgré tout placer leur allégation. Exemple avec cette boisson lactée " avec vitamines C, B6 et D pour soutenir le système immunitaire", aucune allégation n'étant autorisée pour les probiotiques, contrairement aux vitamines qui peuvent, elles, faire référence à l'immunité.
La boisson énergisante qui " fait pousser des ailes" a, elle aussi, trouvé la parade. "Appréciée dans le monde entier par les athlètes de haut niveau et les étudiants, dans les moments professionnels très exigeants et durant de longs trajets", la cannette peut contenir jusqu'à 27 g de sucre et 80 mg de caféine, dont les allégations nutritionnelles sont toujours non réglementées. Et donc? On sort le carton des vitamines, "l'ingrédient magique pour pouvoir soutenir leur apport bénéfique", selon Julie Frère, porte-parole de Test Achats.
"A partir du moment où un produit contient une plante et que le lien invoqué avec cette plante se trouve dans la liste des allégations de santé "on hold", le produit peut continuer à afficher les allégations de santé", expliquent encore Test Achats et le BEUC (Bureau européen des unions de consommateurs), qui avaient organisé, ce vendredi matin, une conférence de presse pour dénoncer une fois encore l'immobilisme qui règne dans ce dossier pourtant vieux de bientôt dix ans, lorsqu'il a été mis pour la première fois sur la table.
Une situation inacceptable
"Les allégations que nos organisations membres ont repérées en masse à travers l’Europe leurrent les consommateurs. Elles déguisent des aliments trop sucrés ou gras en options saines. C’est inacceptable, s'est exclamée Monique Goyens, Directrice Générale du BEUC . A l’heure où l’obésité grandit en Europe, il est capital que les consommateurs puissent faire confiance à ces messages attractifs. Seuls les profils nutritionnels européens peuvent le garantir, alors il est plus que temps d’agir".
Car en effet, la solution proposée pour éviter que des produits peu recommandables pour la santé puissent mettre en avant des allégations qui les font passer pour plus positifs qu’ils ne le sont, serait d’utiliser des profils nutritionnels, à l'image par exemple du "Nutriscore" en France ou des "feux tricolores" au Royaume-Uni. "Il s’agit d’outils concrets permettant de juger en fonction de teneur maximum en graisses, sucres, sel, etc., dans quelle mesure un produit est véritablement un plus pour la santé, et s’il peut ou non se prévaloir d’une allégation, explique-t-on du côté des organisations de défense du consommateur.
Pour des nutriments comme le sucre, les matières grasses ou le sel, ces profils permettraient en effet de déterminer des seuils au-delà desquels un produit ne serait plus considéré comme globalement bon pour la santé. "Il faut des seuils pour les nutriments qui sont sources de préoccupation, a insisté Emma Calvert, du BEUC. Et si les produits dépassent ces seuils, ils ne doivent plus être autorisés à stipuler ces revendications".
Evoqués pour la première fois en 2006 au niveau européen, ces profils devaient être mis en œuvre en janvier 2009. "Neuf ans plus tard, toujours rien. Pire même puisqu’en été 2017, le Parlement européen a carrément rejeté les profils nutritionnels", se sont insurgés Test-Achats et le BEUC, qui comptent bien voir ces profils adoptés sous peu, alors que le rapport de la Commission est annoncé pour mi-2018.
"A la Fevia, nous ne sommes pas opposés à la mise en place de profils nutritionnels, a déclaré à l'agence Belga Nicholas Courant, porte-parole de la Fevia. Mais il faut mener une discussion ouverte sur base scientifique et pas sur base de préjugés sur certaines catégories de produits".