Charcuterie pour enfants: il peut y avoir un danger !
Greenpeace alerte : la consommation de charcuterie est trop importante chez les enfants et nuit à leur santé.
Publié le 02-05-2018 à 06h36 - Mis à jour le 03-05-2018 à 11h41
Greenpeace alerte : la consommation de charcuterie est trop importante chez les enfants et nuit à leur santé.
Trop de sel. Trop gras. Contenant trop de nitrites et phosphates. "Les informations figurant sur l’étiquette ne correspondent pas toujours à la composition réelle de ces produits." Potentiellement cancérigènes si consommés quotidiennement. Les produits de charcuterie à destination des enfants, comme tout autre produit de charcuterie classique, ne sont pas bons pour la santé. C’est ce qui ressort d’un rapport de Greenpeace.Dans le cadre de sa campagne internationale visant à réduire la consommation de viande de 50 % au niveau mondial d’ici à 2050, Greenpeace s’est intéressé à la charcuterie destinée aux enfants. Et spécialement marketée pour attirer l’œil des jeunes consommateurs.
Six produits de charcuterie préemballés (le saucisson de viande Samson, le filet de poulet K3, le saucisson de volaille Maya, le saucisson de volaille Plop, le jambon supérieur Schtroumpfs et les saucisses Knack Schtroumpfs) ont été soumis à des tests en laboratoire par l’ONG de protection de l’environnement.
Deux diététiciennes indépendantes, Gisèle Gual et Mélissa Moretti, ont ensuite fait part de leurs recommandations sans connaître le type de produits pour lesquels elles ont reçu les informations.
Leur verdict est sans appel. "Les conseils des diététiciennes pédiatriques vont dans le même sens", explique Sébastien Snoeck, expert élevage et culture chez Greenpeace. "Elles conseillent d’éviter une consommation quotidienne de ces produits de charcuterie et de n’en consommer qu’exceptionnellement et en petite quantité, dans le cadre d’une alimentation équilibrée et variée. Par exemple, pour les enfants de 4 ans et plus, elles suggèrent de n’en manger qu’une fois par semaine. Un enfant de 3 ans ou moins ne devrait en manger qu’une fois tous les 15 jours, maximum."
Mais que révélaient les résultats des analyses ? D’abord une teneur en viande qui laisse perplexe. "La première chose qui saute aux yeux est que la plupart des charcuteries analysées ne contiennent qu’environ 70 % de viande. Le jambon supérieur Schtroumpfs contient 93 % de vraie viande, ce qui est normal pour un tel jambon, mais les saucisses Knack Schtroumpfs n’en contiennent que 58 %", note Greenpeace.
Ensuite, ils sont riches en sel, parfois bien plus que ce qui n’est rapporté sur l’étiquette. L’ONG déplore : "La plupart des produits contiennent plus de sel que ce qui est indiqué sur l’emballage : le saucisson de jambon Samson a une teneur en sel de 1,9 % (pour 1,7 % indiqué), le filet de poulet K3 de 2,2 % (pour 2 % indiqués) et les saucissons de volaille Maya et Plop de 2,1 % (pour 1,8 % indiqué). Nous considérons les produits testés comme de la charcuterie riche en sel, car ils dépassent tous la limite supérieure de 1,5 g pour 100 g (ou 1,5 %) recommandée."
Ils sont également fort riches en protéines ou additifs. Et gras. "La teneur en matières grasses des produits étudiés fluctue fortement, allant de 1,3 % à 22,1 %", constate Green-peace. "Pour un produit de viande de type charcuterie, cette teneur ne devrait pas dépasser 10 %."
"On devrait capitaliser sur la santé"

En Belgique, on consommerait deux fois trop de viande.
L’organisation internationale de protection de l’environnement souhaite pousser les Belges à consommer moins de viande. Sébastien Snoeck, expert culture et élevage chez Greenpeace, détaille l’action.
Pourquoi avoir lancé cette enquête ?
"C’est suite au lancement de notre campagne pour réduire la consommation de viande, lancée en mars dernier. En Belgique, la consommation de viande est trop élevée : entre 2 et 2,5 fois le maximum recommandé de 400 grammes par personne et par semaine. Les enfants belges âgés de 3 à 13 ans consomment presque deux fois trop de viande. La charcuterie est fort consommée dans notre culture. On estime que le Belge en consomme 210 grammes par personne et par semaine. Nous avons voulu voir ce que nous donnions comme alimentation à nos enfants, en analysant la qualité des charcuteries spécialement marketées pour les enfants."
Quand on est parent et que l’on fait des tartines, on opte souvent pour de la charcuterie qu’on remet plusieurs fois par semaine (pour finir le paquet) et du fromage en tranches…
"C’est vrai. On ne critique pas ça. On aimerait conscientiser les personnes et les pousser à se questionner sur leur manière de consommer. Nous avons grandi dans une société où on entend souvent : ‘Si tu n’as plus faim, finis au moins ta viande.’ On devrait plutôt encourager à finir les légumes. Quand on questionne les consommateurs et les familles, leur préoccupation première est la santé. Or, quand ils font les courses, on le voit, la solution de facilité et des packs de charcuterie préemballés est préconisée. Le portefeuille va aussi être un des premiers critères en rayon. On devrait investir plus sur des produits sains et capitaliser sur la santé. Nous aimerions que les sociétés qui détiennent lesdroits sur les images de personnages le fassent pour des tomates, par exemple. Et qu’ils attirent l’attention des enfants sur des fruits et légumes."
Faire manger des légumes à des jeunes enfants peut être difficile pendant un temps et les alternatives végétariennes ou charcuteries bio ne sont pas plus saines…
"Oui. On a analysé une alternative végétarienne et nous sommes arrivés aux mêmes conclusions que Test-Achats : ce n’est pas plus sain et recommandable. Nous constatons, cependant, une demande de plus en plus forte pour le bio."
Un retrait du marché

Les charcuteries Aubel estampillées Schtroumpfs ne seront plus dans les magasins.
Dans son rapport, Greenpeace se réjouit : "En réaction au présent rapport, la société IMPS, détenant les droits exclusifs d’exploitation des personnages Schtroumpfs, nous a fait savoir qu’elle avait mis un terme aux licences concernant les produits visés dans ce rapport et qu’elle n’avait plus de licence ou de partenariat quelconque avec la société Aubel-Detry, qui produisait les charcuteries Schtroumpfs. IMPS nous a par ailleurs informés que ces produits n’étaient plus commercialisés ni disponibles dans les magasins où ils étaient distribués."
Murielle Detry, directrice de la communication de la société Detry (charcuterie Aubel), elle, tient un discours plus économique, qui va à l’inverse de celui relayé par Greenpeace. "Nous n’arrêtons pas la collaboration à cause de cette étude, étude dont je n’ai pas connaissance", dit-elle. "Nous avons décidé d’arrêter la production parce que ça ne se vendait pas. Les volumes de vente n’étaient pas suffisants pour poursuivre la production. Nous n’avons pas trouvé notre public."
La firme, située à Aubel, a décidé d’arrêter la production des saucisses knack de volaille et du jambon estampillés Schtroumpfs. "La collaboration a pris fin en bons termes. Ce sont des ventes trop faibles qui ont poussé à l’arrêt de cette production."
Murielle Detry poursuit : "Nous sommes très contents de la collaboration avec IMPS et les Schtroumpfs. Nous sommes belges tous les deux et nous trouvions sympa de développer un produit avec une identité telle que les Schtroumpfs. Malheureusement, il n’y a pas eu suffisamment d’acheteurs pour ces produits destinés aux enfants."
IMPS s’est refusé à expliquer "les raisons qui l’ont poussée à mettre fin aux licences concernées, ou à la date de prise d’effet de cette décision", note encore Greenpeace. Contactée, la société n’a pas donné suite à nos appels.
Alternatives végétariennes pas plus saines
Un produit végétarien a été analysé : il contient trop de sel.
Les produits de charcuterie qui veulent être un substitut à la viande ne seraient pas meilleurs pour la santé que la charcuterie. "Nous avons également analysé une alternative végétarienne contenant des protéines à base d’œufs. Il s’agit d’un produit en tranches ultratransformé destiné à ressembler le plus possible à de la charcuterie", détaille Greenpeace.
Ce produit "contient également beaucoup de sel, a une teneur en graisse similaire aux autres (mais nettement moins de graisses saturées, car elles sont d’origine végétale) et contient tout au plus la moitié de protéines. Point positif, ce produit ne contient pas de nitrites ni de phosphates, ce qui est logique, puisqu’il ne contient pas de viande. Tout bien considéré, d’un point de vue nutritionnel, ce produit se situe dans la moyenne des autres produits testés; dès lors, les conseils des diététiciennes pédiatriques sont les mêmes : éviter une consommation quotidienne, n’en consommer qu’exceptionnellement et en petite quantité, dans le cadre d’une alimentation équilibrée et variée."
Greenpeace, à l’instar de Test-Achats qui avait réalisé une étude similaire, suggère de lire attentivement les étiquettes et de s’assurer que le produit qu’on achète contient idéalement "les valeurs nutritionnelles suivantes pour 100 grammes : au moins 12 g de protéines, maximum 10 g de graisse, pas plus de 5 g de graisse saturée et pas plus de 1,25 g de sel."