"Si le nombre de cas de rougeole continue à croître, on risque d’avoir un décès en Belgique"
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Publié le 23-08-2018 à 13h45 - Mis à jour le 23-08-2018 à 14h40
Clément Brasseur, infirmier, est collaborateur du programme vaccination à l’ONE (Office de la naissance et de l’enfance).
La situation concernant la hausse des cas des rougeoles dans notre pays vous préoccupe ?
"Cela nous préoccupe dans le sens où c’est toujours désolant d’avoir des cas alors que la rougeole est une maladie qui est évitable par la vaccination. On pourrait être à des taux beaucoup plus bas. On est à un taux de 8 cas pour un million d’habitants. Ce n’est pas comme lors de l’épidémie en 2017 mais c’est déjà élevé. On n’est pas non plus à des situations comme en Italie ou en France, et on a la chance de ne pas avoir eu de décès en Belgique. Malheureusement, si le nombre de cas continue à augmenter, statistiquement, on risque d’en avoir un. C’est cela qui nous inquiète. D’avoir aussi des enfants hospitalisés, avec des séquelles importantes… On suit la situation."

L’ONE attribue la recrudescence de la rougeole au recul de la vaccination. De quelle façon ?
"L’élément principal est le taux de couverture de la vaccination qui n’est pas assez haut. Pour la rougeole, il faut que 95 % de la population soit vaccinée. Le gros souci c’est qu’il y a deux doses pour cette vaccination. Chez nous, en 2015, du côté francophone, on l’atteint pour la première (à un an), mais pour la deuxième dose (à 11 ans), on n’y est pas, on est à 75 %. C’est à cause de cette deuxième dose que l’épidémie se développe. L’épidémie de l’an passé s’est déclarée dans près de 50 % des cas chez des ados et des adultes. C’est une population très vulnérable."
Cette couverture insuffisante s’explique par la tendance "antivaccins" ?
"Une explication pourrait être l’arrivée des antivaccins, mais je ne pense pas que ce soit la seule cause. Il n'y a pas qu'eux. Il y a aussi la mauvaise estimation du danger. Car c’est une des maladies que l’on ne voit plus beaucoup et qui reviennent. Comme on n’a plus peur, on ne pense plus qu’il faut se protéger et donc elles réapparaissent. En plus, avec la rougeole, dès qu’on passe sous les 95 %, elle réapparaît rapidement. C’est le deuxième élément : la rougeole est une maladie très, très contagieuse, dix fois plus que la grippe. Les symptômes, au début, sont comme un rhume, donc on va continuer à aller au travail, etc. Une personne peut en contaminer une quinzaine. [...] A partir du moment où on ne vaccine plus contre une maladie, on aura toujours un risque qu’elle revienne. On a eu des cas de coqueluches en Belgique, ces dernières années, avec des morts. C’est le paradoxe de la vaccination : elle est victime de sa réussite. Tant qu’on vaccine, la maladie n’est plus là. Et comme les gens pensent que la maladie n’existe plus, ils se vaccinent moins, donc on a une recrudescence, puis une épidémie et les gens recommencent alors à se vacciner. Alors que le but de la vaccination, c’est d’éviter d’arriver à l’épidémie !"
