Tout, tout, tout... vous saurez tout sur le microbiote. Une expo, d'après "Le charme discret de l'intestin"
Publié le 18-02-2019 à 11h54 - Mis à jour le 19-02-2019 à 11h13
Mmmmh… Sexy !”. A peine entré dans le vestibule au centre duquel est exposé un appareil digestif conservé dans ce qui ressemble à du formol, le jeune homme tourne les talons. Comme gêné, devant sa copine, d’abriter, lui aussi, ce “vilain organe” dans son si joli corps. Plus loin, même réaction de gêne, voire de dégoût, de la part de cette adolescente à la vue d’un alignement d’étrons de formes diverses mais de couleur uniforme – vert pomme, en l’occurrence. “Beurk, qu’est-ce qu’on s’en fout de la consistance des crottes !”. Ben non.
Son copain de classe, lui, trouve ça plutôt rigolo. Et c’est avec amusement et sans complexe qu’il va tout naturellement s’asseoir (sans se déculotter) sur l’un des deux WC installés dans l’expo ‘Microbiote”, qui se tient actuellement à la Cité des sciences et de l’industrie à Paris. Histoire de montrer comment il convient de se positionner correctement sur une lunette de toilette. “Ah, je vais faire un petit popo”, lance le gamin tout guilleret.

Mais s’il peut a priori y avoir de quoi se marrer ou se sentir gêné – c’est selon -, l’exposition en question, élaborée d’après le best-seller (paru en 2015 et traduit en plus de 40 langues) “Le charme discret de l’intestin”, de Giulia et Jill Enders, n’a rien de gratuitement scatologique ou d’impudique. Avant tout didactique, cette exposition qui a été conçue en collaboration avec les auteurs du célèbre ouvrage tiré à quelque 1 200 000 exemplaires, repose sur de solides bases scientifiques.
S’il y trône dans le “cacabinet” deux cuvettes de WC, ce n’est pas pour le plaisir de rire. Non, c’est (simplement ?) pour montrer combien la posture est importante. Car oui, on peut parler de “l’art du bien chier”, comme indiqué sur une pancarte. Assis ou accroupi : quelle position est préférable ? “Un muscle enserrant l’intestin crée un coude de fermeture du rectum”, explique-t-on. Dessin de notre anatomie à l’appui, on s’aperçoit très vite que, en position debout ou assise, le muscle maintient ce coude. En revanche, en position accroupie ou les pieds légèrement surélevés posés sur un tabouret, le muscle se relâche et “la voie est libre pour la défécation”. Voilà comment – en un dispositif intitulé “Bien en selles” – expliquer une de ces choses très prosaïques – mais pas anodines pour autant – de la vie quotidienne.

Notre deuxième cerveau
Et tout est à l’avenant dans cette très instructive exposition qui dévoile sur 600 mètres carrés tous les mystères de ce que l’on appelait auparavant la flore intestinale. Un univers microscopique dont on découvre de jour en jour combien il joue un rôle crucial dans notre santé, au point d’être aujourd’hui considéré comme notre “deuxième cerveau”.
De la bouche à l’anus, tout le processus digestif est scanné. Sans tabou, on montre tout. On explique les super pouvoirs de la salive, pare-feu protecteur pour le système immunitaire. On apprend que, entre la dégustation d’un morceau de pomme et son aboutissement au fond de la cuvette, il s’écoule en moyenne une journée. En tirant sur le long boudin vert qui sort du bonhomme, on s’étonne de ces 8 mètres d’intestins qui se cachent dans nos entrailles.
Plus loin, en glissant une carotte, quelques frites, un morceau de viande ou une tranche de pain dans la bouche d’un personnage, on découvre tout ce qui se trame de la mastication à l’expulsion, en passant par le broyage, la déglutition, le plongeon, le rebond, la transformation… Le tout sous forme de chorégraphie de la digestion.
Il suffit de faire basculer un autre pantin, pour que s’en échappe un rot, histoire d’expliquer de manière ludique la poche de guingois, cette petite bulle d’air dans la partie supérieure de l’estomac.
Et tant qu’on y est, parlons du vomi, “le plan d’urgence de l’appareil digestif”. “C’est le résultat d’une réaction en chaîne préventive pour protéger le corps des substances toxiques détectées par les récepteurs de l’estomac”, explique-t-on encore dans cette exposition.

Bonnes et mauvaises bactéries
Puis, c’est dans une portion d’intestin hérissée de villosités que se poursuit le parcours en immersion. On fait connaissance avec les bonnes et les mauvaises bactéries. Sur une grande image scientifique de microbiote intestinal, intégrée à un mur interactif, on peut voir les huit bactéries stars du microbiote.
Enfin, la troisième partie de cette exposition dont la conception a pris deux ans, vise à sensibiliser les visiteurs aux soins qu’ils peuvent apporter à leur microbiote. Entre autres conseils : manger des fibres. “Non digéré par les enzymes, cet ensemble nourrit le côlon qui, bien alimenté, produit de bons acides gras et des vitamines”. Et c’est ainsi que, via un jeu multimédia, le visiteur est invité à choisir des aliments pour consommer les 30 grammes de fibres alimentaires recommandés par jour.

Des animations pour compléter l’exposition
Outre les astuces simples à retenir et à s’approprier pour entretenir au mieux son microbiote, le visiteur pourra en apprendre davantage encore sur les derniers développements de la recherche dans ce domaine en pleine mutation.
En marge de l’exposition, les animations ou médiations d’une durée de 45 minutes chacune sont également proposées. Ainsi, “Microbiote, nous ne sommes pas seuls” aborde les questions relatives à l’immunité et la digestion, l’objectif de cette animation étant d’aborder le rôle du microbiote et ses fonctions sur le corps, comme les corrélations avec la santé.
Quant à “La cantine du microbiote”, cette médiation vise à expliquer quelles sont les influences de nos habitudes alimentaires et culturelles comme le jeûne, la consommation de produits fermentés, l’application des médecines chinoises ou encore l’utilisation des pré et probiotiques, sur le microbiote intestinal et donc sur la santé.
Et si, après ça, il reste encore des questions…

A savoir
L’exposition Microbiote, d’après l’ouvrage “Le Charme discret de l’intestin” des Allemandes Giulia et Jill Enders, se tient jusqu’au 4 août 2019 à la Cité des sciences et de l’industrie à Paris. L’exposition partira ensuite en itinérance à Lisbonne puis à Helsinki. Exposition trilingue : français, anglais et portugais. À partir de 10 ans.
Giulia Enders, née en 1990, est avant tout une passionnée de gastro-entérologie. Motivée par sa propre guérison d’une grave maladie de peau grâce à un changement radical d’alimentation, la jeune chercheuse a consulté de très nombreuses études sur le sujet.
Le livre : En 2017 est parue chez Actes Sud une nouvelle édition augmentée, de l’ouvrage de Giulia et Jill Enders, paru en 2015. Surpoids, dépression, diabète, maladies de peau… Et si tout se jouait dans l’intestin ? Dans cette nouvelle édition augmentée, qui a inspiré l’exposition, Giulia Enders, jeune doctorante en médecine, fait état des recherches récemment publiées, notamment celles qui précisent l’influence de ce “deuxième cerveau” pour notre bien-être. Elle nous invite à changer de comportement alimentaire, à éviter certains médicaments et à appliquer quelques règles très concrètes pour faire du bien à notre ventre. Ce livre est illustré avec humour par la sœur de l’auteur, la graphiste Jill Enders. Traduit de l’allemand par Isabelle Liber, 350 pages, 21,8 €.