Didier Queloz, prix Nobel de Physique: "Je me suis trouvé embarqué dans une aventure qui ne fait que commencer"

Didier Queloz, pionnier de la recherche des exoplanètes, professeur à l'Université de Cambridge, est partenaire du projet Speculoos. Ce Suisse de 52 ans a remporté ce mardi, avec James Peebles et Michel Mayor, le Nobel de physique pour son travail fondateur dans le domaine des exoplanètes. Il a découvert la première exoplanète dans les années 90. La Libre l'avait rencontré lors de son passage à Liège en décembre 2018. Voici l'entretien qu'il nous avait accordé.

Didier Queloz, pionnier de la recherche des exoplanètes, professeur à l'Université de Cambridge, est partenaire du projet Speculoos. Ce Suisse de 52 ans a remporté ce mardi, avec James Peebles et Michel Mayor, le Nobel de physique pour son travail fondateur dans le domaine des exoplanètes. Il a découvert la première exoplanète dans les années 90. La Libre l'avait rencontré lors de son passage à Liège en décembre 2018. Il était venu participer à l'inauguration du tout nouvel observatoire de l'Université de Liège. Voici l'entretien qu'il nous avait accordé. Qu'est-ce qui vous a poussé, à l'origine, à vouloir rechercher des exoplanètes ?
Ce qu'il faut comprendre, c'est quand j'ai fait ma thèse, le domaine n'existait pas. La question de chercher des planètes était vraiment très exotique, un domaine dans lequel très peu de chercheurs s'aventuraient. Pour l'essentiel, il y avait beaucoup de fausses annonces... Ce n'était pas vraiment un domaine de recherche. Moi, j'ai eu la chance d'arriver à un moment donné où il y a eu une convergence technologique. Où il y avait une possibilité de construire des instruments qui permettaient de détecter des planètes. J'ai eu l'opportunité de construire un instrument avec Michel Mayor. Et cet instrument, s'est révélé encore plus performant que ce qu'on avait rêvé. Et cela nous a permis de mettre en place un programme de recherche d'exoplanètes. C'était très enthousiasmant, parce que c'était nouveau. Mais il faut que vous compreniez bien que, quand on a démarré le programme, en 1993, Michel m'a dit : "Didier, tu ne trouveras pas de planètes". Parce que les planètes comme Jupiter mettent des années pour faire leur orbite complète - et il fallait une orbite complète pour que l'exoplanète soit détectée. Mais moi, le projet m'intéressait. Après, pour la petite histoire, on commence le programme et Michel part en congé sabbatique. Il me laisse les clés de l'instrument, et puis quand il revient de sabbatique, je lui dis : "Michel on a trouvé une planète". Personne n’imaginait que ces planètes à courte période existaient. C'est un concours de circonstances. Et je me suis trouvé embarqué dans une aventure qui ne fait que commencer.

Et justement, l'aventure, elle mènera à trouver de la vie sur ces exoplanètes ?
La question de la vie, de ce qu'on appelle maintenant la vie universelle, c'est une question absolument centrale, qui est probablement la prochaine grande révolution scientifique qui arrive. Elle est liée aussi à un facteur de convergence. Elle est d'abord liée à un développement spectaculaire de toute la génétique et de la biochimie. On a maintenant une compréhension extraordinairedes mécanismes du vivant. On peut même modifier quelque part le code humain, comme on l'a appris récemment, ce qui est un petit peu angoissant, je dois dire. Par ailleurs, on n'est aussi quelque part pas très loin d'être capable de faire de la vie dans les laboratoires. Donc on a une approche de la vie, telle qu'on la connaît maintenant, qui est juste phénoménale. De l'autre côté, on a ce mystère absolu : on a très peu d'idées de comment la vie est apparue sur Terre. Donc, maintenant, on a cette énorme communauté, qui à présent a les moyens de se poser des questions et d'apporter des réponses. Et puis l'astronomie, en parallèle, a fait des progrès spectaculaires, ces trente dernières années. Il y a 40 ans, si vous demandiez à un physicien quel était le grand domaine de la physique, il vous disait : "la physique des hautes énergies", avec le Cern, ces grandes expériences... Maintenant, si vous demandez à un physicien où sont les prochaines frontières de la physique, ce sera en astronomie. Parce que les progrès sont fulgurants : il y a des avancées technologiques, on a accès à des instruments qui n'existaient pas du tout, à des longueurs d'onde qui n'existaient pas du tout; on a accès à des dimensions qui étaient impalpables, on parle de ces ondes gravitationnelles détectées... Et puis il s'avère qu'une partie de l'astronomie traite de la détection des planètes, et de la question de la vie sur ces planètes. Et là, vous rapprochez les deux communautés à plus forte croissance actuellement, celle de l'émergence de la vie du point de vue terrestre et la question de la vie extraterrestre.

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