"Quel beau dimanche!" Le véhicule lunaire Orion a réussi son amerrissage dans le Pacifique

Le voyage autour de la Lune de la capsule Orion a été un succès, et le vaisseau a passé le défi du retour dans l’atmosphère. Un amerrissage à suivre en direct sur notre site.

Après un voyage de 25 jours et demi au total, s’être approché de la Lune à quelque 130 km d’altitude et avoir battu le record du vaisseau habitable s’étant éloigné le plus de la Terre (à 432 210 km), Orion a effectué son retour sur Terre ce dimanche. Cette mission, baptisée Artemis 1, est la première étape du programme prévoyant le retour sur la Lune de l’être humain vers 2025.

L’amerrissage de la capsule inhabitée a eu lieu dans l’océan Pacifique, au large des côtes de Basse-Californie du Mexique, près de l’île Guadalupe, à 18 h 40, heure belge. "Elle a l'air d'être en bon état", a estimé la Nasa après l'amerrissage, après que les hélicoptères avaient survolé la capsule et alors que le navire de récupération était en approche. "Tout a l'air très bien, tout à fait comme on s'y attendait", a jugé de prime abord Jeremy Vanderkam, un des responsables du bouclier thermique d'Orion.

"C'était une entrée selon les règles", estime l'agence américaine. "C'est un jour historique, car nous retournons maintenant dans l'espace profond", a commenté ensuite le patron de la Nasa. "Quel beau dimanche", s'est amusée une autre responsable de la la Nasa. Les années de préparation ont vraiment payé. Maintenant, il faut se préparer pour lorsqu'on aura un équipage lors d'Artemis 2."

La descente de la capsule a été freinée par une série de 11 parachutes, puis elle sera récupérée et hissée à bord d’un navire de la marine américaine. Des mannequins pourvus de capteurs "habitent" pour l'instant la capsule.

Il faudra à présent de longs mois pour mener l'analyse. Récupérer la capsule permettra en effet de recueillir de nombreuses données déterminantes pour les missions suivantes. D'abord en détaillant l'état du vaisseau après son voyage, mais aussi en analysant les enregistrements de capteurs des accélérations et vibrations subies à bord, ou encore les performances d'une veste anti-radiation.

Certains éléments du vaisseau doivent en outre être réutilisés pour la capsule d'Artémis 2, déjà bien avancée.

Orion devait après son amerrissage être laissé deux heures dans l'eau, soit bien plus que si des astronautes étaient à bord, afin de collecter des données - notamment sur la chaleur induite à l'intérieur de la capsule.

Puis des plongeurs devaient y attacher des câbles afin de la remorquer jusqu'à l'intérieur du navire, dont l'arrière est en partie immergé. L'eau devait être ensuite pompée, permettant que la capsule soit lentement déposée sur un support prévu à cet effet. Les opérations devaient prendre entre quatre et six heures à partir du moment de l'amerrissage.

L'USS Portland devait prendre ensuite la route de San Diego, sur la côte ouest américaine, où la capsule devait être débarquée. Un navire de la marine américaine, l'USS Portland, avait été pré-positionné pour les opérations de récupération, auxquelles la Nasa s'entraîne depuis des années. Des hélicoptères et des bateaux pneumatiques ont également été déployés.

Le reste de la mission en lui-même s'est en tout cas déroulé parfaitement, ont estimé vendredi l’agence spatiale américaine (Nasa) - qui salue “un plein succès” - et son homologue européenne (Esa) qui participe aussi à la mission. Après le premier grand défi du décollage avec une toute nouvelle fusée, venait toutefois le second grand défi : la rentrée de l’atmosphère de la capsule Orion, qui doit à terme amener des astronautes sur la Lune.

Le risque de la vitesse

”Le jour de la rentrée, nous réaliserons notre objectif prioritaire un, qui est de démontrer le véhicule dans des conditions de rentrée lunaire, ainsi que notre objectif prioritaire trois, qui est de récupérer le vaisseau spatial”, a ainsi expliqué cette semaine Mike Sarafin, Artemis I mission manager à la Nasa.

”Le but principal de la mission est de tester le bouclier de rentrée d’Orion dans l’atmosphère, nous expliquait ainsi l’ingénieur de l’Esa, le Belge Philippe Deloo, avant le décollage. On va rentrer à des vitesses beaucoup plus hautes que lorsqu’on rentre de la station spatiale internationale, située en orbite basse terrestre (40 000 km/h contre 27 000, NdlR). C’est la chose qui n’a pas pu être testée et sur laquelle on a le moins d’informations. Il faut vraiment faire le test en vol, en situation réelle, pour s’assurer que cela marche bien.

In this image released by NASA on November 28, 2022, flight day 13, the Orion spacecraft reached its maximum distance from Earth (R rear) during the Artemis I Moon (C rear) mission when it was 268,563 miles (432,210kms) away from our home planet. Orion has now traveled farther than any other spacecraft built for humans. (Photo by Handout / NASA / AFP) / RESTRICTED TO EDITORIAL USE - MANDATORY CREDIT "AFP PHOTO / NASA" - NO MARKETING NO ADVERTISING CAMPAIGNS - DISTRIBUTED AS A SERVICE TO CLIENTS
Dans cette image publiée par la NASA le 28 novembre 2022, jour de vol 13, le vaisseau spatial Orion a atteint sa distance maximale de la Terre lors de la mission Artemis I alors qu'il était à 432 210 km de notre planète natale. Orion a maintenant voyagé plus loin que tout autre vaisseau spatial construit pour les humains. ©AFP or licensors

Dans ce contexte, le bouclier thermique devait affronter – et résister à, c’est le test crucial – une chaleur culminant à 2760°C. De son côté, la Nasa s'est préparée avec tout le soin habituel : vendredi soir, les contrôleurs de vol ont par exemple effectué l’analyse finale sur le module d’équipage et le module de service d’Orion à l’aide de caméras sur chacun des quatre panneaux solaires du vaisseau spatial. Lors de l’inspection du module d’équipage, les contrôleurs de vol ont examiné la coque arrière composée de 1 300 tuiles du système de protection thermique et protégeront l’engin spatial du froid de l’espace et de la chaleur extrême de la rentrée.

”Nous attendons vraiment avec confiance les tout derniers mètres de cette course de 100 mètres”, a commenté vendredi David Parker, responsable de l’exploration habitée à l’Esa.

Pas de retour pour le module européen

Juste avant la rentrée, le module d’équipage et le module de service se sont séparés et seul le module d’équipage devaient revenir sur Terre tandis que le module de service (qui fournit la propulsion, l’alimentation électrique, le contrôle thermique…) , fabriqué par les Européens, a brûlé comme prévu dans l’atmosphère terrestre lors de sa rentrée au-dessus de l’océan Pacifique. "Le module de service européen a fonctionné parfaitement", a indiqué Philippe Deloo, responsable du programme ESM (module de service européen d’Artemis) à l’Esa, après l'amerrissage.

Pas de regret de cette "disparition" du module dans l'atmosphère du côté de l’équipe européenne, même après des années de travail pour construire ce module de service : “J’en suis heureux, c’était prévu ! Toute vie a une fin, et pour autant que la vie était un succès, il n’y a pas de regret. Et ici, c’est un succès. C’était une mission exceptionnelle, nous avons beaucoup appris sur le comportement du véhicule, se réjouissait vendredi Philippe Deloo. Et parce que cette mission s’est déroulée sans problème majeur, nous en avons profité pour effectuer de nombreux tests afin de caractériser davantage le véhicule. Nous avons pu avoir le temps pour comprendre quelles sont les capacités réelles du véhicule.”

Après s’être séparé du module de service, le module d’équipage devait exécuter une technique inédite “de rebond" sur l'atmosphère (skip entry) qui permet au vaisseau spatial de s’écraser avec précision sur le site d’amerrissage sélectionné. À 121 km d’altitude, Orion devait plonger dans la partie supérieure de l’atmosphère terrestre et utilisera cette atmosphère, ainsi que la levée de la capsule, pour sauter hors de l’atmosphère, puis entrera à nouveau pour la descente finale, avec les parachutes, avant le “grand éclaboussement”. “Cette technique permettra une rentrée en toute sécurité pour les futures missions Artemis, peu importe quand et où elles reviendront de la Lune”, commente la Nasa. Elle permettra aux astronautes, lorsqu'ils seront présents dans l'habitacle, de ne subir “que” une décélération de 4 g contre 7 g lors d’Apollo.

Ce schéma montre les principales parties du vaisseau de la mission Artemis I. Le 11 décembre, à proximité de la Terre, la capsule Orion (en haut) se séparera de son module de service ESM (European Service Module) fourni par l’Agence Spatiale Européenne (ESA). Celui-ci (avec la pièce de liaison) se consumera dans les hautes couches de l’atmosphère. La capsule, protégée par un bouclier thermique, amerrira dans l’océan Pacifique sous 3 parachutes
Ce schéma montre les principales parties du vaisseau de la mission Artemis I. Le 11 décembre, à proximité de la Terre, la capsule Orion (en haut) se séparera de son module de service ESM (European Service Module) fourni par l’Agence Spatiale Européenne (ESA). Celui-ci (avec la pièce de liaison) se consumera dans les hautes couches de l’atmosphère. La capsule, protégée par un bouclier thermique, amerrira dans l’océan Pacifique sous 3 parachutes ©Cité de l’espace d’après un schéma ESA

L’atmosphère terrestre a ralenti d’abord le vaisseau spatial à une vitesse d'environ 500 km/h, puis les parachutes se déploieront successivement à partir d’une altitude de 8 km. Les trois derniers, dit principaux, de 35 mètres de diamètre, ont accompagné Orion jusqu’aux eaux du Pacifique, à une vitesse d’environ 30 km/h. Leurs rayures blanches et rouges étaient clairement visibles à l'image.

La trajectoire Artemis I a été conçue pour garantir que toutes les pièces restantes ne présentent aucun danger pour la terre, les personnes ou les voies de navigation.

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