Espace privé, succès public

Avant les représentations, c'est Léolo, 13 ans, qui se charge de la vente des tickets, pendant que sa soeur, Lisalou, 11 ans et son frère Livio, 9 ans, conduisent les spectateurs à leur place et leur proposent les programmes. Pierre, le père, joue au régisseur, tandis que la maman, Hilde, est au bar.

Sophie Devillers

Avant les représentations, c'est Léolo, 13 ans, qui se charge de la vente des tickets, pendant que sa soeur, Lisalou, 11 ans et son frère Livio, 9 ans, conduisent les spectateurs à leur place et leur proposent les programmes. Pierre, le père, joue au régisseur, tandis que la maman, Hilde, est au bar.

La salle de l'Espace privé, qui accueille spectacles, expositions et concerts depuis 2002, se trouve juste sous la maison de la famille Gonay, à Piétrebais. La salle - design sobre et murs blancs dépouillés - donne sur le jardin familial, les balançoires des enfants, les champs et les vaches de la campagne incourtoise. Pierre Gonay, architecte ardennais «en transhumance», a imaginé et fait construire cette maison sur pilotis, sur les hauteurs du village, en 1996.

En toute intimité

Mais il y a trois ans, l'architecte décide de murer l'espace, le transformant en pièce pouvant accueillir une cinquantaine de personnes.

Pourquoi, alors, ne pas en faire une salle de spectacle? L'idée paraît naturelle à ce passionné de culture, qui, pendant plusieurs années, a accueilli des artistes dans son domicile ixellois de la rue de Livourne.

«Je recevais parfois des comédiens pour des séries de 20 représentations, comme n'importe quel autre théâtre de Bruxelles. Cette maison de maître s'y prêtait très bien. Quant aux spectateurs, ils ne voyaient même pas qu'ils étaient dans mon salon! Mais là, après chaque spectacle, je devais ranger les chaises des spectateurs et les accessoires, pour laisser la place à notre mobilier.»

A Piétrebais, aucun problème de manutention: la famille s'est réservée le niveau supérieur de la maison. Si Pierre Gonay a décidé de partager son espace familial avec des artistes et le public, ce n'est pas pour les bénéfices, inexistants, mais bien «pour le plaisir». «C'est d'abord un projet familial. Je le fais pour mes enfants. J'ai envie qu'ils vivent ce que j'ai vécu à Ixelles, qu'ils découvrent des choses...»

Léolo, Livio et Lisalou peuvent ainsi partager le repas des comédiens après les représentations, ou assister aux répétitions du chanteur Claude Semal et des musiciens de la Chapelle Reine Elisabeth. «Yossif Ivanov a joué ici, avec un Stradivarius, deux mois avant le concours Reine Elisabeth, alors qu'il était encore inconnu. Il était à deux mètres des spectateurs. Presque à leur niveau, car ici, il n'y a pas réellement de scène. Les gens avaient le souffle coupé...»

Pour découvrir les artistes dans ce cadre intimiste, le public vient des environs, de Jodoigne, Louvain-la-Neuve ou parfois de Bruxelles. Et, la plupart du temps, la salle est pleine. «Parfois, on doit même refuser du monde. Pourtant, il faut s'habituer à l'endroit. Ici, c'est à pied qu'on grimpe jusque chez nous. C'est au bout d'un tout petit chemin, dont même les gens du village ignoraient l'existence, avant la création de l'Espace privé!»

© La Libre Belgique 2005

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