Self-service au verger
Relever la pomme, ne pas tirer vers le bas pour éviter d’arracher un bout de branche, veiller à ce que les fruits ne se heurtent pas, pour échapper aux coups et garantir une conservation d’environ un mois et demi. Les quatre premiers week-ends d’octobre, la famille Jadoul distillera ses conseils sur la cueillette de la pomme.
- Publié le 25-09-2010 à 04h17
- Mis à jour le 25-09-2010 à 08h40
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Relever la pomme, ne pas tirer vers le bas pour éviter d’arracher un bout de branche, veiller à ce que les fruits ne se heurtent pas, pour échapper aux coups et garantir une conservation d’environ un mois et demi Ne pas forcément mettre de côté les pommes tachées Les quatre premiers week-ends d’octobre, la famille Jadoul distillera ses conseils sur la cueillette de la pomme. Elle accueillera, à l’entrée de ses deux hectares de vergers à Autre-Eglise (Ramillies), les amateurs de Jonagold ou d’Elstar.
Ceux-ci auront toute latitude pour cueillir eux-mêmes les fruits. Les Jadoul ont inauguré l’année dernière ce système apparemment inédit dans la région : la vente directe avec cueillette sur le verger, par le client lui-même. "J’ai eu cette idée l’année dernière, explique Christian Jadoul, agriculteur traditionnel à qui le fruit apporte une diversification depuis une dizaine d’années. En une même journée, j’avais reçu la visite de mon marchand de bétail, et de mon marchand de fruits. Aussi bien l’un que l’autre avaient critiqué mon travail ! Pour le marchand de fruits, mes pommes n’étaient jamais assez grosses, ou trop grosses, avaient des taches, étaient déformées Pour lui, elles n’étaient pas de toute bonne qualité, "je ne sais pas en faire grand-chose", me disait-il. Quand je suis rentré le soir, j’ai dit à mon épouse : il faut trouver une solution !"
La demande dans le circuit conventionnel est en effet très calibrée. "Le marchand lui veut un produit parfait, et puis on peut récolter de grosses pommes alors qu’il faut des petites pour le client, ou des petites, alors qu’il faut justement des grosses pour l’exportation ! Il peut aussi y avoir la pression des maladies, des petites taches. La grande surface veut des fruits luisants, bicolores, sans tache, sans coup Donc la grande surface fait pression sur le marchand qui retourne cette pression sur nous " La situation, dit-il, est très dévalorisante : "On a l’impression de faire de la mauvaise qualité, alors que ces produits sont de qualité !" En outre, "on est dans un pays où il pleut beaucoup, et donc un fruit parfait, ça implique des traitements, il n’y a pas photo ! Même pour le bio dans les grandes surfaces, ils doivent pulvériser très régulièrement, mais avec d’autres produits." Christian Jadoul, lui, n’a jamais été très favorable au fait de traiter ses fruits systématiquement une ou deux fois par semaine. Il faut dire que sa maison se trouve dans le verger. Pas idéal donc ! Il a en tous cas adopté depuis longtemps la lutte intégrée, qui implique un cahier des charges précis par exemple sur les produits, et le verger est contrôlé. Depuis peu, par choix personnel, il va plus loin, ce que lui permet la vente directe. "Cette année et l’année dernière, j’ai arrêté de traiter au mois de juin. Depuis trois mois, je n’ai plus rien mis sur les pommes. Mais il y a davantage de taches sur les fruits ou les feuilles. J’accepte que mes fruits soient moins beaux. Ce que les gens comprennent, mais que le marchand ne comprendrait pas. Et puis de toute façon, même si je mettais du produit une ou deux fois par semaine jusqu’à la récolte, j’aurais un peu de maladie "
Cette maladie, liée aux conditions humides, c’est la tavelure, de petites taches brunes sur la peau du fruit. "Quand les gens voient la tache, je leur explique qu’elle partira avec l’épluchure ! Ce n’est qu’une tavelure, et la majorité des traitements ont pour but d’enlever ces taches. Et ce n’est pas cette tache qui va donner le mauvais goût. Ce n’est pas dangereux, ce n’est qu’une question de présentation !" Si 50 % des clients viennent pour l’aspect sain et convivial (voir épinglé), l’autre moitié vient pour le prix. Les pommes sont en effet vendues à 40 cents le kilo. "Les gens nous disent, à ce prix-là, on peut vraiment manger des fruits, faire des compotes, faire manger des fruits aux enfants, faire des jus. On ne va pas faire du jus avec des pommes vendues 1, 50 euros en grande surface "
L’opération est aussi moins "aberrante". "Tout d’abord, je peux directement apporter les pommes au consommateur. Sinon, je dois engager du personnel pour cueillir, mettre les pommes sur des palettes. Les fruits devront être amenés chez un grossiste qui les triera, elles seront conduites à la centrale de la grande surface, puis dans les magasins où les clients les achèteront. Parfois une pomme fait des centaines de kilomètres ! Et mes fruits vont peut-être se retrouver dans le panier de ma voisine ! " Economiquement, c’est aussi plus intéressant pour lui, calcule-t-il. "Un marchand, pour de la toute bonne qualité, payera 28 cents. Il faudra aussi payer 5 cents pour la cueillette. Et puis les fruits de première catégorie, ce n’est que 60-70 % du verger Le "rebut"peut être utilisé pour le jus, mais le prix est d’environ 15 cents. 40 cents, pour moi, c’est un prix équitable, on m’a dit à 50 cents, vous les vendriez aussi, mais faire ça, c’est pas le but". Et d’ajouter : "moi, pour vendre mon produit, je court-circuite le système, car le système est mal fait"
L’année passée, les Jadoul ont vendu plusieurs tonnes de pommes à des centaines de clients venus sur le site. A l’avenir, Christian souhaiterait vendre uniquement ses fruits aux clients-cueilleurs. Et pouquoi pas replanter d’anciennes variétés qui lui sont demandées ?