UCL : "Pas une croissance à tout prix"

Philippe Barras est responsable du développement régional à l’UCL. Il confirme que si LLN a été modifiée avec l’arrivée de l’Esplanade, la cité nouvelle n’a pas fini d’évoluer.

Sophie Devillers
UCL : "Pas une croissance à tout prix"
©Christophe Bortels

Entretien Philippe Barras est responsable du développement régional à l’UCL. Il confirme que si LLN a été modifiée avec l’arrivée de l’Esplanade, la cité nouvelle n’a pas fini d’évoluer.

A l’UCL, avec le projet de l’Esplanade, quelles étaient les préoccupations ?

Au niveau de l’UCL, il y avait des préoccupations tout à fait légitimes. Car au-delà du centre, il y avait la création de la rue Charlemagne et du cinéma. Et dès le départ, fin des années 90, il était prévu d’avoir en parallèle une seconde rue qui sont les Jardins de la Source et une extension sur la partie en friche du côté du boulevard de Wallonie (voir sous-papier). L’avantage, c’était de faire cela avec un promoteur unique. L’inconvénient, c’était qu’en cas d’échec, tout le projet tombait à l’eau ! Et ce n’était pas lui donner un projet, mais un ensemble en plein centre urbain. Cela allait fondamentalement changer la physionomie et l’organisation du centre urbain, non seulement dans l’immédiat,mais aussi avec des perspectives jusqu’a 15 ans après l’inauguration du centre. Et parallèlement à cela, il y avait la cession, et la reprise et rénovation des parkings, ainsi que leur gestion.

Des regrets à ce sujet ?

C’est toujours facile après coup de dire qu’on aurait pu faire autrement et mieux. Ce qui est certain, c’est qu’ il y avait une urgence à les rénover et les sécuriser, nous n’avions pas les moyens de le faire à court terme, et nous avions l’opportunité d’avoir un opérateur pour les parkings. S’il y a des critiques aujourd’hui, ce n’est certainement pas à propos de leur confort, de leur sécurité, de leur fonctionnement, c’est qu’ils sont devenus payants, et c’est le pendant des investissements... On peut discuter longuement de la tarification, du fait il y a un monopole de fait. Il y a certainement des choses qu’on peut améliorer en la matière, et il y a un dialogue permanent avec Gespark. En attendant, le problème a été traité. Si c’était pour rester propriétaire et gestionnaire avec des parkings moins en moins utilisé... Ceci dit, il y a eu des mesures prises, la zone bleue avec la Ville, et l’UCL a investi dans des terrains pour des "parkings malins" gratuits. Et les parkings payants, ça n’empêche pas les gens de venir.

Qu’a apporté l’Esplanade ?

Cela a apporté un plus au niveau urbanisme indéniable, surtout au niveau de la perception de la ville. Elle était perçue jusqu’en 2005 comme une ville universitaire. Maintenant, on la considère comme une ville à part entière avec une multiplicité de fonctions. On attire maintenant des gens qui ne venaient jamais à LLN. Peut-être ne fréquentaient-ils que l’Esplanade, mais désormais, ils en sortent pour aller ailleurs dans le centre de la ville. Les acteurs se sont concertés (NdlR : au sein de la Gestion Centre-ville), et ont augmenté les animations sur la dalle, de façon à faire sortir les gens de l’Esplanade, ou faire venir des gens à LLN. Fondamentalement, la perception a changé. En outre, la surface piétonne a augmenté, ce qui dans les enquêtes clientèle est considéré comme le premier facteur d’attractivité. La quantité et la diversité de l’offre commerciale vient en deuxième. On a relativement peu de plaintes, dans les enquêtes. Aujourd’hui, pour les gens qui arrivent à LLN, le centre commercial fait partie de Louvain-la-Neuve.

Quid des critiques de l’époque, au niveau de la qualité de vie, de l’esprit “68” ?

Aujourd’hui, on les entend très peu. Elles sont très marginales. Mais il faut reconnaître que l’image de marque de LLN est devenue beaucoup plus bourgeoise. C’est aussi un changement fondamental. Mais l’esprit néolouvaniste de solidarité et de convivialité est toujours là. Et doit rester. Néanmoins, nous sommes aujourd’hui dans un milieu urbain. Le cachet de l’Esplanade, de la rue Charlemagne, des nouvelles promotions immobilières en cours, cela change un peu l’image de marque, il y a une évolution architecturale qui donne une impression plus bourgeoise. Il n’empêche que LLN a gardé son identité soixante-huitarde, même si je n’aime pas cette expression. Le quartier de la Baraque est resté tout à fait fidèle à lui-même. Un habitat alternatif s’y trouve toujours, et la volonté et de l’UCL est bien de maintenir à l’avenir. On veut garder ce qui a fait le charme et la spécificité de LLN tout en empêchant pas le développement, mais un développement concerté et régulé. Et on reste fidèle au plan directeur.

Après l'Esplanade, il reste encore pas mal de morceaux de ville à terminer...:

Le premier, en cours, c’est terminer la dalle, en face du musée Hergé, avec les Jardins de la Source en construction et la dernière partie de Ladeuze. Le deuxième projet, chronologiquement, c’est près du lac. C’est à dire le musée de LLN. A côté, il y a le parking du Lac pour lequel on a un projet qui doit terminer la dalle avec un projet mixte dont un hôtel ( flat-hôtel et par nuitée). Mais également une résidence avec des services pour personnes âgées, un centre "wellness", des appartements... A l’est, il y a le parking relais de la SNCB, dont les études sont en cours, au dessus, il y aura une nouvelle dalle, sur le parking. Dessus, il y aura un gros projet de 600 logements, avec un peu de bureaux, une résidence de personnes âgées, des commerces de proximité... Ce sera le quartier Courbevoie, entièrement piétonnier, sur 3 ha, et avec une rue interne... On va en profiter pour faire un parc public sur des champs actuels, au quartier de la Baraque. On a négocié pendant deux ans avec l’association qui regroupe les trois sites d’habitats alternatifs cette coexistence entre ceux-ci et un quartier dense. Le parc sert de transition entre les deux. Non, ne va pas diminuer diminuer les habitats alternatifs, on garde l’espace actuel. Ils sont relativement concentrés. Ce que les habitants doivent faire, c’est entreprendre les démarches auprès de la Région wallonne afin de donner un statut de logement à ces habitations, car aujourd’hui, ils ne correspondent à aucun statut du Code du logement. C’est donnant-donnant, nous sommes prêts à garder les terrains, ceux qu’ils occupent maintenant, à condition qu’ils soient régularisés. L’ASBL doit discuter avec la Région pour créer un cadre. Il y a une situation de fait, il me semble nécessaire de la régulariser.

Quel est le défi pour l’avenir de LLN ?

Notre objectif ce n’est pas une croissance à tout prix, car on va arriver à la limite de ce qui’on peut absorber sur les voiries et les infrastructures communes à LLN. Nous voulons préserver la qualité de vie, pour les d’habitants, les étudiants, la population active, les personnes âgées... Il faut un bon équilibre de la pyramide des âges. Il faut aussi un bon équilibre entre la population et les étudiants. Il y a un afflux d’étudiants sur LLN - et c’est positif -, mais le but n’est pas la croissance à tout prix. Il faut pouvoir gérer un bon équilibre. On ne voudrait pas que la présence des étudiants empêche la coexistence. LLN reste une ville étudiante, aussi une ville tout court. Un défi, c’est de poursuivre la croissance de Louvain-la-Neuve en accueillant davantage d’habitants et d’étudiants, mais de manière régulée, tout en gardant cette qualité de vie. D’ou le souhait de garder, par exemple, des espaces verts. L’objectif de l’UCL est effectivement d’avoir de plus en plus d’étudiants, mais avec l’académie UCLouvain, nous aurons quatre sites pour l’enseignement. On ne doit pas nécessairement tout faire à LLN ! Rien n’est décidé, mais on aura d’autres possibilités à Namur, Bruxelles, à Mons... Pourquoi pas, à un moment donné, dire : on estime qu’on a des possibilités par exemple à ²Mons pour continuer une croissance des étudiants, pour ne pas arriver à une seuil de saturation à LLN. Rien n’est décidé, mais nous aurons une marge de manœuvre, à l’avenir.

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