Robin des Bois cible le Brabant wallon
Dans le cadre du décret Robin des Bois, la plupart des écoles du BW donneront plutôt que recevoir. Mais il n’y a pas d’écoles riches, selon les directeurs.
Publié le 31-03-2011 à 04h15 - Mis à jour le 31-03-2011 à 10h06
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Robin des Bois pille-t-il le Brabant wallon ? C’est en tous cas l’avis du vice-président de l’ADIBRA (Association des directeurs du secondaire catholique à Bruxelles et Brabant wallon), Patrick Dekelver, également directeur de l’Institut secondaire des Sacrés-Cœurs à Waterloo. Il a étudié durant trois mois l’effet de ce décret dit "Robin des Bois". Ce décret, d’application dès septembre, fonctionne sur le principe des vases communicants. Les écoles considérées d’un niveau socio-économique élevé donneront plus d’heures et de moyens aux écoles avec un indice moins élevé (voir ci-dessous).
En Brabant wallon, la plupart des écoles feront partie des écoles "aidantes" : "La situation est assez monolithique en Brabant wallon, constate Patrick Dekelver. Ainsi, l’ensemble des écoles secondaires du Brabant wallon ont un indice socio-économique élevé. Elles se retrouvent à peu près toutes dans la classe 17-18 ou 20, soit la classe la plus ponctionnée. En secondaire libre, il y a une exception : une seule école est dans la classe 12, qui ne paie ni ne reçoit. En BW, l’évaluation du coût est assez importante, que ce soit dans le secondaire ou dans le fondamental. C’est ainsi difficilement supportable pour le général. L’enseignement général a des normes moins favorables que le technique et le professionnel. Il devra par exemple organiser des cours avec 24-25 élèves car il n’aura pas suffisamment d’heures pour dédoubler les groupes, si on ponctionne ces heures. On a fait une évaluation pour le secondaire libre dans le Brabant wallon : ce serait une perte de 16 à 19 emplois. Moi-même dans mon école, je devrais perdre23 heures, soit un horaire complet."
Et les écoles devront absorber les conséquences de ces changements . "Et réorganiser le regroupement de classes lors de certains cours, regrouper des options . Ou, pour maintenir des groupes gérables, supprimer les cours de remédiations et d’encadrement des élèves. Je pense que les directeurs vont plutôt choisir cette dernière solution. Donc cette suppression aura un effet pervers, on ira vers une privatisation des cours particuliers. Cela augmente la dualisation, c’est très dommageable." Quant à l’indice socio-économique, le directeur souligne deux confusions : "En fait, ce sont des élèves qui viennent de quartiers à l’indice socio-économique élevé. Je connais aussi les autres types de quartiers, j’ai été directeur à Saint-Gilles. Mais ce n’est pas parce que ces élèves viennent de ces quartiers à l’indice socio-économique élevé qu’ils sont sans problèmes sociaux et familiaux. Il y a une terrible confusion, ces élèves ont aussi besoin d’aide et d’encadrement. J’ai des élèves de 18-19 ans qui sont très malheureux, car ils n’ont pas d’encadrement familial, et chez qui c’est l’éducateur qui joue le papa. Cela existe en Brabant wallon. Cela, cela peut échapper au politique."
En outre, autre confusion, "ce n’est pas parce que l’école enregistre des élèves à l’indice socio-économique élevé, que cette école est riche ! Cela n’a rien à voir ! Il n’y a pas de lien direct. Et je ne connais aucune école riche !" Il insiste : "Ce n’est pas qu’on ne veut pas aider les écoles de classe 1. Elles ont besoin de moyens supplémentaires, mais ce qui est inadmissible c’est que cela se fait dans une enveloppe fermée et qu’on transfère les moyens !"
Et le Brabant wallon est largement, selon lui, la région la plus touchée par cet effet négatif du décret Robin des Bois. "Car nous sommes la région la plus riche ! Dans la zone Bruxelles-BW, nous donnons beaucoup (avec le Brabant wallon) et nous recevons beaucoup (avec le centre de Bruxelles)." Depuis trois mois, les directeurs bruxellois et brabançons du secondaire libre ont d’ailleurs tenté de trouver un système de solidarité interne entre écoles, afin d’atténuer les effets du décret. En réalité, il existe déjà une solidarité entre les écoles libres de Bruxelles et du BW. "On s’était déjà mis d’accord, pour, dans le nombre de période professeur, en retirer 1 % et le mettre dans un pot commun. Nous aidons ainsi les écoles en difficulté à Bruxelles et en BW. C’est une solidarité volontaire. Mais certains P.0., avec Robin des Bois, ont dit "on ne veut pas payer deux fois", et ont voulu qu’on supprime cette solidarité volontaire. Mais nous avons pu la maintenir. Et sur projet, on pourra renvoyer une partie des moyens vers le BW." Exemple concret aux Sacrés-Cœurs : "Moi je paye 16 h à la solidarité volontaire, 23 au décret Robin des Bois, soit 39 au total. Mais j’ai un projet : je vais demander 12 h pour créer une école des devoirs sur fonds propres. C’est une sorte de redistribution après la redistribution. Souvent, c’est le BW qui a aidé Bruxelles, cette fois, c’est Bruxelles qui va aider le BW car le BW est pillé et dans le fondamental, c’est encore plus grave, ( lire par ailleurs) car ils ont moins de moyens." Un espoir, quoi qu’il en soit : que la situation soit transitoire. "La Communauté française a dit qu’elle mettra fin au système lorsqu’elle pourra débloquer des moyens. Mais cela pourrait durer deux ou trois ans, voire plus. Nous souhaitons, nous, que le décret ne soit pas pérennisé."