Bruxelles avait aussi son zoo
La capitale eut son jardin zoologique au XIXe siècle avec des enjeux déjà "panda"…
- Publié le 01-06-2014 à 18h34
- Mis à jour le 02-06-2014 à 08h55
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Ces derniers mois, la zoologie s’est immiscée dans nos fantaisies linguistico-communautaires avec Xing Hui et Hao Hao, les deux pandas chinois qui, par gouvernement chinois interposé, ont opté, horresco referens, pour Pairi Daiza plutôt que pour Anvers… Si on a pu s’étonner - encore que… - de l’étonnante empathie d’Elio Di Rupo pour les nouveaux pensionnaires du parc d’Eric Domb, que dire alors de Bart De Wever, qui est allé jusqu’à se déguiser en panda avec son chauffeur lors d’une soirée d’éloge aux télés flamandes ?
Bruxelles n’a pas été touchée par ce mélodrame… parce que c’est une des rares capitales européennes sans zoo. Ou plutôt : qui n’en a plus ! Car il y en eut un dans la seconde moitié du XIXe siècle, à l’emplacement du parc Léopold.
L’histoire repasse parfois les plats : elle montre des tensions, encore bien actuelles, entre science, acclimatation et loisirs. Avec - déjà ? - comme toile de fond la question de la rentabilité des zoos et des modèles économiques adoptés par leurs exploitants.
Des guides pas innocents
Le sujet constitue le 77e numéro des "Brussels Studies". L’histoire du zoo de Bruxelles y est narrée sous l’angle de l’image qu’en véhiculaient les guides de l’époque. L’étude est signée Wim Lambrechts, historien et environnementaliste de la Hogeschool-Universiteit Brussel. Son regard sur un aspect méconnu du Bruxelles du XIXe siècle est celui d’un historien soucieux des rapports homme-nature mais également sensible aux enjeux économiques. Constat surprenant : à l’époque déjà, on se plaignait de la pollution tout en faisant du zoo un atout par rapport à d’autres villes et capitales.
Le jardin zoologique de Bruxelles ne vécut qu’entre 1851 et 1878 mais chercha à se positionner comme une institution scientifique. Et pédagogique : il y avait un soin tout particulier pour les descriptions dans les guides vendus comme support de visite. A l’époque, le jardin zoologique c’est un lieu de promenade et de représentation où on marque son statut social.
Mais c’est aussi un lieu de loisirs par la qualité de l’architecture et les multiples activités culturelles organisées tant pour les adultes que pour les enfants. Et pourtant "l’ambition d’un zoo moderne, où les fonctions scientifiques et éducatives s’appuyaient, y compris financièrement, sur un volet récréatif, fut un échec à Bruxelles". "Il y a toujours un pas significatif entre l’utopie et la réalisation, notamment en matière de gestion. Pourtant, le modèle du parc zoologique récréatif tend aujourd’hui à être la référence, mais pas forcément au cœur des grandes villes."
Il aurait fallu un Jacques Kets
Malheureusement, le zoo de Bruxelles ne devint jamais une entreprise florissante. "L’objectif était principalement centré sur le divertissement et la détente, moins sur la science. Il aurait fallu aussi une personne influente et engagée - comparable à Jacques Kets, le premier directeur du zoo d’Anvers - qui puisse reprendre la direction du zoo. A partir de 1861, la bourgeoisie trouva de nouvelles possibilités de loisirs avec l’aménagement de l’avenue Louise et du Bois de la Cambre. Conséquence : le zoo ferma en 1876 et la nouvelle société qui le reprit fit faillite en 1878. En 1879 et 1880, tous les animaux furent vendus. A l’occasion du 50e anniversaire de l’indépendance du pays, le domaine se mua en parc Léopold. Et l’ancien cloître accueillit un un musée d’histoire naturelle, le futur Institut royal belge des Sciences de la nature. Un pôle d’attraction pour d’autres institutions scientifiques, telles l’Institut Solvay de physiologie ou l’Institut universitaire de l’hygiène et l’Institut Pasteur. La fonction demeure aujourd’hui, tout comme le parc Léopold, qui est un poumon vert de la ville…"
Lire l’étude complète dans "Brussels Studies", numéro 77, 2 juin 2014. Rens. : www.brusselsstudies.be.