Un piquet de grève à 10 000 € par jour
La grève de sous-traitants SNCB perdure en dépit de deux décisions de justice.
- Publié le 03-09-2014 à 22h26
- Mis à jour le 04-09-2014 à 07h55
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"Un huissier est venu, accompagné de la police et de travailleurs de la firme BM&S. Ils ont commencé à descendre vers l’atelier, nous avons marché devant eux pour les ralentir. C’était chaud ici."
Le syndicaliste jubile. Présent mercredi matin sur la rampe du Lion, à l’entrée de l’atelier SNCB de Schaerbeek, il raconte comment le piquet de grève a tenu bon. "C’est une victoire historique pour les droits syndicaux !" réagira la CGSP-Cheminots de Bruxelles, solidaire de la FGTB, en pointe du combat.
La grève perdure donc, en dépit de deux décisions de justice : l’une enjoint de lever le piquet. L’autre condamne la Ville de Bruxelles et la commune de Schaerbeek à une astreinte de 10 000 euros par jour de retard dans la mobilisation des services de police.
"Le conflit social et économique est devenu politique", disait, quelques jours auparavant, l’avocat et porte-voix de la société BM&S, Me Grégoire. Cette dernière est sous-traitante de la SNCB depuis avril 2014. Avec le contrat, elle a dû reprendre le personnel déjà actif à l’atelier de Schaerbeek.
Jusqu’il y a deux semaines. BM&S licencie alors deux délégués syndicaux (FGTB) pour faute grave. Elle précise dans la lettre de licenciement que les hommes ont "déjà donné des enveloppes contenant de l’argent à certains fonctionnaires de la SNCB en charge du site".
Choqués, les syndicalistes réfutent l’accusation. L’opérateur ferroviaire entame, lui, un audit interne, toujours en cours.
Les travailleurs se lancent alors dans une grève le 21 août, au petit matin. Ils réclament la réintégration des employés et celle de trois intérimaires non prolongés malgré, disent-ils, "une promesse d’engagement".
Lundi, après de nombreuses péripéties, une première et véritable réunion de conciliation s’achève sur un échec. Les travailleurs ont refusé les propositions de BM&S. La grève, suspendue durant le week-end et lundi, reprend ses droits mardi matin.
Jusqu’à hier. Lorsque pour la énième fois, un huissier se présente. La police bruxelloise l’accompagne mais les grévistes ne lâchent rien. Leurs remplaçants - des jaunes dans le jargon - ne persévèrent pas, "menacés" selon Me Grégoire, "solidaires" d’après les syndicats…
Pas d’intervention du bourgmestre
Yvan Mayeur (PS), bourgmestre de Bruxelles-Ville a, par ailleurs, réagi par voie de communiqué. Il estime que ce n’est pas le rôle du bourgmestre ni celui de la police d’intervenir dans les conflits sociaux. "Ceux-ci doivent se résoudre entre les dirigeants des entreprises, le personnel et leurs représentants. Il est par ailleurs interpellant que le pouvoir judiciaire, par le biais des astreintes (10 000€ !), s’immisce dans le fonctionnement des services de police lorsqu’ils sont appelés à prêter main-forte à un huissier. Ces derniers sont amenés, dans l’exercice de leurs fonctions au quotidien, à remplir avec des moyens humains limités des missions de services publics au bénéfice des citoyens. Il n’incombe pas à la justice d’organiser le travail de la police locale au risque de mettre à mal l’organisation et l’exécution des tâches quotidiennement menées. La Ville de Bruxelles a donc décidé de faire tierce-opposition à l’ordonnance."