Bruxelles, capitale subversive…
- Publié le 12-12-2016 à 09h12
- Mis à jour le 12-12-2016 à 09h14
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Sans aucun doute, Bruxelles est la ville du monde où se déroulent le plus de manifestations… Des quatre coins du continent européen, des mécontents de la "politique de Bruxelles" s’y rassemblent pour y clamer tout le mal qu’ils pensent des décisions de l’Union européenne. sans oublier bien sûr, les nombreuses concentrations syndicales belges, singulièrement depuis la mise en place du gouvernement de Charles Michel.
Tous ces contestataires ne savent cependant pas que cette capitale décisionnelle de l’Europe et de la Belgique est aussi un lieu qui a accueilli parmi ses habitants des révolutionnaires "pur jus" comme Karl Marx mais aussi parmi ses résidents un certain Lénine.
Bruxelles porte précisément les traces de bien des cultures subversives qui s’y sont succédé.
Dès la Réforme
Cela remonte très haut dans l’histoire puisque dès la Réforme, des prédicateurs rebelles vinrent la prêcher sur place. Et à la Révolution française, des sans-culottes ont organisé le sac de Ste-Gudule alors que sous la Restauration, c’est toujours chez nous que s’installèrent les révolutionnaires français comme Jacques-Louis David. Et ainsi de suite pendant tout le XIXe siècle et bien entendu aussi pendant le XXe siècle où notre capitale devint le lieu de concentration de bien des exilés politiques…
Cet esprit particulier a continué à souffler et aujourd’hui, il s’exprime encore notamment de manière plus artistique par le Street Art.
Les batailles des Marolles…
Là encore sous toutes ses formes puisqu’il y a des œuvres plus ou moins commandées mais aussi des créations qui apparaissent en sortant de nulle part comme un certain organe génital masculin sur une façade de Saint-Gilles.
Enfin, il ne faut pas oublier que depuis au moins un demi-siècle, Bruxelles se caractérise aussi par ses luttes urbaines. Avec des mobilisations qui s’inscrivent dans l’esprit frondeur local.
Qu’on pense ainsi à "la bataille des Marolles" dans ses multiples déclinaisons, de l’opposition au palais de justice de Bruxelles à la gentrification du quartier…
Cela valait bien un colloque et aussi, dans la foulée, un ouvrage de synthèse qui s’interrogerait sur les espaces et les lieux qui, au fil des ans, ont accueilli ces révolutionnaires - belges et étrangers - ainsi que leurs activités. Un grand "pow wow" historico-sociologique qui puisse aussi mettre en relief les interactions entre la géographie sociale de Bruxelles et la pratique politique transgressive.
Pour diriger cette opération, "the right woman at the right place" était sans conteste l’historienne Anne Morelli qui dirigea les opérations à partir du Centre d’histoire et de sociologie des gauches et qui, pour la circonstance, fut assistée par Chloé Deligne.
Le résultat - le livre en l’occurrence… - vaut le détour puisqu’il rassemble quelque 40 contributions originales.
"Faute d’être belle, la capitale peut être re-belle" titre, non sans une once de provocation mais à bon escient, la scientifique de l’ULB qui rappelle aussi le propos de Guy Debord, l’âme de l’Internationale situationniste qui évoquait, lui, "une autre ville pour une autre vie".
Le mérite de l’ouvrage est qu’il nous rapporte non seulement pas mal d’événements historiques mais s’attarde aussi sur divers lieux devenus révolutionnaires qui font encore partie du paysage quotidien de la capitale.Christian Laporte
"Le Bruxelles des révolutionnaires. De 1830 à nos jours", CFC éditions, environ 40 €