Commissariat de police incendié ce mercredi soir : la police a réquisitionné les extincteurs des voitures des riverains
Reportage auprès des habitants de la place Liedts encore sous le choc.
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Publié le 14-01-2021 à 14h10 - Mis à jour le 14-01-2021 à 14h11
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Les stigmates des débordements survenus du côté de la place Liedts, à Schaerbeek, étaient encore bien visibles ce jeudi matin. Une voiture de police était parquée en faction devant le commissariat incendié où un périmètre de sécurité était dressé. Les vitres sont brisées, la façade brûlée, tout comme le distributeur automatique de billets situé juste à côté. Riverains et commerçants étaient encore sous le choc et fustigent tant les agissements des jeunes casseurs que le manque de réaction de la police qui n'a, selon eux, pas anticipé les débordements.

"J'ai assisté à tous les événements alors que j'étais dans mon domicile situé sur la place Liedts, accompagné de mes petits-enfants", explique Erhan Ersahin, riverain du quartier depuis 33 ans. "J'ignorais qu'une manifestation se tenait à 15h devant le commissariat de la rue du Brabant où le jeune Ibrahima a perdu la vie samedi dernier. Vers 17h, j'ai constaté qu'un important groupe de personnes était rassemblé sur la place et que la situation dégénérait. Il s'agit de jeunes âgés de 15 à 30 ans. Des gamins du quartier. Ils s'en prenaient au mobilier urbain, ont cassé deux abribus, saccagé un tram. J'ai appelé la police à 17h30 et à 17h47 pour leur dire qu'il fallait envoyer des renforts de toute urgence, sécuriser le périmètre, les habitations, les commerces, le mobilier urbain. Ils m'ont répondu que la situation était sous contrôle. Mais vers 18h, les jeunes ont mis le feu au commissariat."
Erhan a également vu le véhicule du roi Philippe passer en plein milieu des émeutiers. Une scène hallucinante. "Je le vois régulièrement passer dans le quartier avec sa Mercedes noire qui porte la plaque d'immatriculation "1". Je ne comprends pas comment la sécurité du Roi a fait en sorte qu'il se retrouve en plein milieu des débordements. Ils savaient que c'était chaud... Pourquoi il était là ? C'est incompréhensible", précise Erhan.
Encore plus invraisemblable : selon des témoignages recueillis auprès de riverains et commerçants confirmés par la police, il apparaît qu'afin de maîtriser l'incendie du commissariat, la police a réquisitionné les extincteurs des voitures qui passaient par-là. "C'était tellement le chaos que la police a pris les extincteurs des voitures privées", explique Ulvine, gérant d'un magasin de meuble mitoyen au commissariat. "Mes quatre extincteurs ont également été réquisitionnés. Les pompiers n'étaient pas là à temps. Je déplore le manque de réaction et d'anticipation de la police. Je vis dans ce quartier depuis 11 ans et je n'ai jamais vu pareille scène. J'ai vu une policière frappée au sol par les émeutiers. Cela me rend triste et je ne pense pas que c'est ce que le défunt aurait voulu."
La réquisition des extincteurs par les policiers est confirmée par la zone de police de Bruxelles Nord. "Afin de maîtriser plus rapidement le début d'incendie, des extincteurs ont été réquisitionnés dans le cadre d'une intervention d'urgence. Les pompiers sont arrivés sur place suite à l'incendie du commissariat de quartier mais au vu du début d'incendie et de la situation, les policiers ont estimé qu'il était plus opportun d'utiliser le plus rapidement possible les extincteurs ."
De son côté, Ikrame, qui vit dans le quartier, déplore à la fois l'arrestation de Ibrahima par la police ainsi que les dégradations. "Ibrahima n'a rien fait de mal. Il a juste filmé une intervention policière. Il faut que la clarté soit faite sur ces faits tragiques. En revanche, les dégradations ne sont pas justifiées. On sent une tension croissante entre la police et les jeunes et c'est terrible d'en arriver à une telle violence. A chaque manifestation, c'est pareil. C'est désolant", conclut-elle.

