La petite fille, "pas très propre" parce qu’elle dormait dans la rue, n’allait plus à l’école...
Une petite centaine d’enfants, essentiellement roms, se retrouvent sans toit à Bruxelles depuis le 1er juin.
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Publié le 14-06-2021 à 20h30 - Mis à jour le 14-06-2021 à 22h44
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L’histoire commence par l’absence depuis quelques jours d’une petite fille de six ans, élève de première primaire à l’école communale n°3 de Schaerbeek, en Région bruxelloise. Le directeur s’inquiète. Vendredi dernier, Eduardo Cachapa appelle la maman d’origine roumaine pour en savoir plus. "Elle m’a expliqué que le centre d’accueil qui hébergeait la famille avait fermé. Sans domicile, ils dormaient dans une station de métro depuis une semaine. Elle m’a dit que la petite n’était pas très propre à cause de ça et qu’elle ne voulait pas l’envoyer en classe dans cet état. Je lui ai dit qu’elle pouvait se débarbouiller à l’école, que ce serait mieux qu’elle soit ici pendant la journée, qu’elle aurait un repas chaud à midi", nous raconte Eduardo Cachapa.
Lundi matin, la petite élève était là, au grand soulagement du directeur de l’école fondamentale schaerbeekoise. Avant cela, M. Cachapa avait remué ciel et terre et contacté de nombreux organismes pour tenter de trouver un toit pour cette famille de trois enfants. En vain. Vendredi midi, le directeur postait un message urgent sur Facebook. "Aucune solution n’a pu être trouvée à l’heure actuelle. Si l’un d’entre vous avait une piste, un contact, une solution à proposer, je vous en serais extrêmement reconnaissant… N’hésitez pas à me contacter…" Il a aussi organisé une collecte de fonds ("Jamais 3 sans moi") pour la famille.
L’appel a été entendu. Plusieurs personnes se sont manifestées. Des parents d’élèves ont hébergé la petite, ses parents et ses deux frères pendant le week-end. Des propositions similaires ont été faites pour les jours qui viennent. Une solidarité qui fait chaud au cœur. Mais ce sont des bouts de ficelle, qui ne résoudront pas durablement la situation de cette famille rom.
Impasse
Renseignements pris au Samusocial de Bruxelles, des dizaines de familles roms se trouvent aujourd’hui dans la même impasse. Le 31 mai, le financement extraordinaire dégagé par la Région bruxelloise en 2020 pour ouvrir des structures d’accueil supplémentaires en raison de la crise sanitaire a pris fin. Le centre pour familles situé dans le quartier nord a ainsi vu sa capacité réduite de 400 à 250 places. Soit 150 personnes sans solution d’hébergement, dont 93 enfants...
"Il y a plein de familles en rue, se désole Rafael Duverlie, coordinateur des équipes mobiles du Samusocial. Au cours des maraudes, on peut leur distribuer de la nourriture, des vêtements, des couvertures. Mais pour l’hébergement, on n’a rien à leur proposer." C’est d’autant plus dommage que, dans les centres d’accueil, les travailleurs sociaux ont réussi à accrocher ces gamins à l’école, poursuit-il. "Sans logement, 90 % vont laisser tomber la scolarisation : pour des questions de rythme, d’hygiène, etc."
La grande majorité sont des familles roms, qui ont quitté la Roumanie, la Slovaquie, la Bulgarie ou la Hongrie. Des ressortissants européens, indésirables dans tous les États membres où ils se posent. Le phénomène de ces familles en errance dépasse largement les capacités d’action du Samusocial de Bruxelles. La situation de ces personnes est insoluble à son niveau. "On met juste une rustine sur un trou béant", illustre Rafael Duverlie. Les réponses ne pourront être que politiques.