Action devant le tribunal de Bruxelles: un amas de sacs à dos pour dénoncer un déni du droit d'accueil

Des centaines de sacs à dos ont été déposés mercredi devant le tribunal du travail de Bruxelles, pour symboliser les centaines de requêtes unilatérales introduites par des demandeuses et demandeurs d'asile auprès de ce tribunal.

Action devant le tribunal de Bruxelles: un amas de sacs à dos pour dénoncer un déni du droit d'accueil
©Belga

Ceux-ci n'ont d'autre choix que de saisir la justice parce que l'État belge refuse de leur accorder l'accueil auquel ils ont pourtant droit, selon diverses associations qui sont à la base de l'action. "Malgré une condamnation judiciaire de l'État et de Fedasil en janvier dernier, les demandeurs d'asile qui ne sont pas considérés comme vulnérables ne sont pas enregistrés auprès de l'Office des étrangers, et surtout, ne sont pas prioritaires pour se voir attribuer par Fedasil une place d'accueil dans un centre", a expliqué l'association Médecins du Monde. "Le résultat est que des centaines de personnes sont laissées à la rue, en dehors de tout cadre légal, alors qu'elles ont droit à l'accueil matériel sans délai, en vertu des directives européennes et du droit national en la matière."

Action devant le tribunal de Bruxelles: un amas de sacs à dos pour dénoncer un déni du droit d'accueil
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Pour faire valoir leur droit, les demandeurs d'asile qui se voient refuser une place d'accueil n'ont d'autre choix que d'introduire une requête unilatérale en extrême urgence contre Fedasil devant le tribunal du travail, essentiellement celui de Bruxelles. Depuis janvier dernier, ce tribunal a reçu environ 700 requêtes de ce type, auquel il doit impérativement répondre, ralentissant ainsi grandement son fonctionnement.

Le tribunal a alerté de cette situation intenable, dans un communiqué diffusé il y a quelques jours. "Ce contentieux, qui noie le tribunal du travail francophone de Bruxelles, ne permet à Fedasil que de 'gagner' quelques jours avant d'héberger les demandeurs d'asile. Dans l'intervalle, les acteurs judiciaires s'épuisent, aux frais de l'État, à rendre des décisions de justice dans des dossiers que l'administration ne traite pas ou met en attente", avait-il entre autres déclaré.

Pour les associations qui ont organisé l'action de mercredi, notamment Médecins du Monde mais aussi la Ligue des droits humains et le Ciré, il est clair que la saturation quasi permanente du réseau d'accueil est une volonté déguisée de décourager les personnes de demander une protection internationale en Belgique.

L'Association syndicale des magistrats a également pris la parole lors de cette action, ainsi que des avocats. "Cette crise de l'accueil dure depuis octobre 2021 et elle fait suite à d'autres crises. Elle était prévisible et rien n'a été mis en place pour l'anticiper, ou pour y remédier", a notamment déclaré Hélène Crokart, avocate spécialisée dans le droit des étrangers. "Le système judiciaire est actuellement pris en otage et nous, avocats, magistrats, greffiers, huissiers, sommes désormais en charge des missions administratives de Fedasil, et c'est inacceptable. Que l'on soit attaché aux droits humains fondamentaux, à l'État de droit, au respect des décisions de justice, ou simplement préoccupé par le gaspillage d'argent public, l'arriéré judiciaire, la lenteur de la justice et l'impact de ce nouveau contentieux sur le fonctionnement des cours et tribunaux, personne ne peut rester insensible à cette crise de l'accueil dont sont victimes ces hommes que l'on prive de dignité et d'humanité en toute impunité", a-t-elle appelé.

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