Les pompiers en colère ce matin sur la petite ceinture de Bruxelles : “On est des pions et les pions n’en peuvent plus”
Entre 200 et 300 manifestants ce matin au pied du bureau de Rudi Vervoort. Nous en avons rencontré quelques-uns. Tous dépités, tous fatigués, tous en colère…
Publié le 27-01-2023 à 12h48
Les pompiers manifestaient à Bruxelles ce vendredi matin. Entre deux blocages de la petite ceinture au niveau d’Arts-Loi, Frédéric Rousseau, venu de Tournai avec une trentaine de collègues, nous raconte les conditions de travail des soldats du feu. “Un même homme passe parfois à trois postes en une journée, ambulance, puis incendie puis balisage. quand j’ai commencé on était à 3000 sorties d’ambulance maintenant on est à 11 000. En 7 ans on est passé de 93 professionnels et 60 volontaires à 72 professionnels et 20 volontaires. Les missions augmentent et les effectifs ne suivent pas. On est vraiment devenu des taxis.” Pour les soldats du feu, l’absence de moyen et humain et de reconnaissance du travail nuit avant tout à la sécurité publique. Son secteur est encore épargné par les agressions d’agent “pour le moment. Mais on est aussi venu soutenir nos collègues qui se font agresser lors d’intervention.”

”Maintenant je ne fais plus ça que pour l’argent”
C’est justement le cas de Christophe. Basé à Delta, il est pompier à Bruxelles depuis 20 ans. Il nous raconte entre deux explosions de pétards que les agressions physiques lors d’interventions augmentent, lui-même en a été victime. “Et les agressions verbales, on ne les relève même plus tellement c’est fréquent.” Depuis que j’ai commencé, les sorties en ambulance ont plus que doublé. Le personnel, lui, a augmenté de 5 %. “On ne recrute pas assez vite et les nouveaux postes compensent à peine le départ. Aujourd’hui les gens nous appellent pour de la fièvre ou un mal de dents, ils pensent qu’ils seront plus rapidement pris en charge s’ils arrivent en ambulance. Et nos centralistes ne sont pas couverts donc ils ne prennent pas de risque.”
Pour Christophe la déconnexion entre le terrain et le politique y est pour beaucoup. “On nous dit : 'vous avez tant d’ambulances pour Bruxelles'. Ok mais on a besoin de plus, prenez des ambulanciers… 'Oui mais ça coûte cher…' On se retrouve dans des situations aberrantes. Il y a quelque temps, je faisais un tronçonnage. De retour à la caserne on me fait sauter dans une ambulance et me changer pour partir faire un massage cardiaque à un gamin. J’avais encore de l’huile de moteur sur moi.”

”On essaye de bien faire, nos véhicules sont encore assez bons mais on manque vraiment de bras. Dès qu’il y a un malade ou un blessé, les congés d’autres sautent. Moi, cas m’est arrivé 6 ou 7 fois en un an. On ne manifeste pas pour les horaires ou quoi, juste pour plus de monde. Beaucoup sont en train de perdre la passion, de tomber en dépression. Moi maintenant je ne fais ça que pour la paye. On est des pions et les pions n’en peuvent plus. En tant que pion on ne peut rien faire, comme les soignant, les policiers… mais on n’en peut plus ça ne peut pas durer”.

Retour devant le gouvernement bruxellois, où se tenait normalement la manifestation qui finit par bouger dans les rues aux alentours. Ça cafouille un peu entre ceux qui veulent bloquer la petite ceinture et les autres. Alors que le cortège se divise de part et d’autre du boulevard du Régent, Frédéric Spinette, délégué SLFP nous donne les raisons du mouvement. (Le syndicat était le seul à appeler à la mobilisation ce vendredi.)

Frédéric partage le constat de ses collègues. “Nos interventions augmentent et ça ne va pas s’arranger. Avec le réchauffement climatique, les inondations sont de plus en plus fréquentes, les feux de broussailles nous prennent une après-midi au lieu de 40 minutes, les tempêtes se multiplient… Tout le personnel mobilisé pour ça ne l’est pas pour autre chose. C’est la sécurité des citoyens qui trinque à la fin. Il faut une vraie analyse des besoins du terrain pour adapter les effectifs à chaque réalité.” Le représentant syndical reste sceptique sur la mobilisation du jour. “On est beaucoup (entre 200 et 300 personnes environs) mais si juste un galop d’essai. On verra bien ce qui sort des réunions mais il y aura sûrement d’autres mobilisations.” Le syndicat rencontre ce vendredi le ministre président de la région bruxelloise Rudi Vervoort (PS) et la ministre de l’Intérieur Annelies Verlinden (PS).
