"C'est une catastrophe": la collégiale Sainte-Waudru de Mons abîmée par une restauration d’amateurs
De nombreuses œuvres ont été dégradées. Une "catastrophe".
- Publié le 27-01-2021 à 08h43
- Mis à jour le 28-01-2021 à 22h55
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L’enfer est pavé de bonnes intentions. Tel est l’adage qui correspond à la situation que connaît la collégiale Sainte-Waudru de Mons. Classé au patrimoine exceptionnel de Wallonie avec son mobilier, l’édifice religieux de style gothique brabançon vient de subir une restauration illégale et amatrice du mobilier intérieur, apportant des dégradations dommageables (et peut-être irrémédiables) à celui-ci. Une affaire qui rappelle l’image de la célèbre restauration ratée d’une représentation du Christ sur le mur d’une église espagnole. Cette fois l’histoire surréaliste n’est plus espagnole, mais bien belge…
L’alerte est donnée par des riverains qui, témoins de restaurations douteuses dans la collégiale par une personne, signalent les faits à l’ASBL de protection patrimoine et environnement en Wallonie "Communauté Historia". Celle-ci apprend qu’à la demande du doyen de la collégiale, un amateur serait depuis plusieurs mois en train de réaliser des travaux de restauration "catastrophiques", en ayant recours à des méthodes jugées "inappropriées et en totale contradiction avec les règles élémentaires de conservation préventive", et de surcroît, sans accord de l’Agence wallonne du patrimoine (Awap) ou de permis d’urbanisme. Tableaux, sculptures, marbres… rien n’est épargné par le restaurateur dépourvu manifestement de toute expertise en la matière.

Avertie lundi par l’ASBL, qui s’est associée au réseau Archeologia.be, la ministre wallonne du Patrimoine Valérie De Bue (MR) a aussitôt fait stopper le chantier de restauration tandis qu’un architecte a été envoyé sur place pour constater les faits. Ce mardi, une équipe d’experts de l’Awap a réalisé un état des lieux de l’ampleur des dégâts à la collégiale. Elle y a rencontré l’ouvrier qui, visiblement de bonne intention, n’a fait qu’exécuter une demande du doyen et n’a pas pris conscience des conséquences de ses interventions maladroites.
Les statues peintes à l’acrylique
Un rapport doit encore être réalisé par l’Awap mais l’ASBL Communauté Historia a déjà pu constater plusieurs dommages. "Un bas-relief au-dessus d’un autel près de la sacristie a été fort détérioré. L’albâtre est marqué par de nombreuses et récentes traces de ponçages excessifs ; la cloche du chœur a été complètement griffée en raison d’un ponçage excessif, l’ange au-dessus de la cloche a complètement été enduite d’acrylique ; plusieurs statues présentent également des traces d’interventions récentes ; des couches de peintures bon marché blanches ont été aussi appliquées sur une grande partie des statues dans la collégiale. De l’acrylique a été utilisé pour remplacer les anciennes dorures. Les autels et statues sont touchés pour la plupart. Enfin, plusieurs volutes ont été arrachées de l’autel saint Hilaire", nous détaille son président Virgil Declercq. "L’ouvrier nous a également fait remarquer que tous les bas-reliefs de l’église ont été poncés à la fibre de verre. Du béton a aussi été employé pour réparer des ornements d’un autel"… "C’est un scandale patrimonial !"

Sauver ce qui peut l’être
La Ville de Mons a été informée des faits ainsi que le fonctionnaire délégué qui pourra enclencher, s’il le souhaite, une procédure contre le doyen pour infraction urbanistique. En attendant, la directrice de l’Awap (zone de Mons) Josiane Pimpurniaux, en concertation avec le cabinet de la ministre Bénédicte Linard (la Fédération Wallonie-Bruxelles étant compétente pour le mobilier), indique vouloir prendre contact avec l’Institut royal du patrimoine artistique (IRPA), spécialisé dans les techniques de restauration, "pour décider des mesures urgentes techniques à mettre en place pour sauver le plus rapidement les biens qui peuvent l’être". Pour la ministre De Bue, en effet, "il est désormais urgent de réaliser un rapport plus précis et d’examiner ce qu’on peut récupérer ou non pour sauver le patrimoine en danger".