Allez les rouges et bleus
Au moins, les choses sont claires. Tant ceux qui restent, comme Daniel Bacquelaine, que celui qui part, Didier Reynders, l’ont dit et redit ces derniers jours : la majorité communale de leurs rêves, à Liège, sera celle qui associera "les deux forces principales", entendez le PS et le MR. Abattre aussi clairement ses cartes avant un scrutin, voilà qui est trop rare pour ne pas être souligné. Du côté socialiste, on se garde bien de manifester le moindre empressement à répondre à cette parade amoureuse. Mais dans les coulisses, informellement, cela se discute et depuis quelque temps déjà. Qu’en sera-t-il désormais ?
- Publié le 14-01-2012 à 04h15
Au moins, les choses sont claires. Tant ceux qui restent, comme Daniel Bacquelaine, que celui qui part, Didier Reynders, l’ont dit et redit ces derniers jours : la majorité communale de leurs rêves, à Liège, sera celle qui associera "les deux forces principales", entendez le PS et le MR. Abattre aussi clairement ses cartes avant un scrutin, voilà qui est trop rare pour ne pas être souligné. Du côté socialiste, on se garde bien de manifester le moindre empressement à répondre à cette parade amoureuse. Mais dans les coulisses, informellement, cela se discute et depuis quelque temps déjà. Qu’en sera-t-il désormais ?
Avant l’officialisation du départ du grand homme vers une destinée bruxelloise - que "La Libre" fut la première à annoncer dès l’été dernier -, les gros bras libéraux liégeois l’imaginaient demeurant en Cité ardente jusqu’aux élections communales. Ce scénario a volé en éclat, tout simplement parce qu’il n’était pas crédible. On ne peut pas d’une main briguer le maïorat d’une ville et de l’autre remplir ses cartons de déménagement. Electoralement, l’émigration du nouveau chef de notre diplomatie risque donc de coûter cher aux bleus. Où retrouver les 17.250 voix que rapportait Reynders en 2006, loin devant les 3992 voix de Christine Defraigne, deuxième score de la liste ? En outre, comme l’a relevé d’emblée et avec joie un Michel Firket, c’en est fini de la bipolarisation qui avait caractérisé le précédent scrutin, ramené au combat des deux chefs, Willy Demeyer et son pire ennemi (souvenez-vous des affiches "Didier Reynders, votre bourgmestre") . Une bipolarisation qui avait été favorable tant au PS (+ 3,14 %) qu’au MR (+ 4,80 %), alors que le CDH (- 5,15 %) et Ecolo (- 3,20 %) en avaient fait les frais.
Le paradoxe, c’est que le recul électoral prévisible du MR pourrait bien, en termes d’occupation du pouvoir local, jouer en sa faveur. Comme on le sait, il n’y a pas de désintéressement en politique. Le verrou de l’incompatibilité Demeyer-Reynders ayant sauté, la pierre d’achoppement principale à une majorité violette, c’est un rapport de forces qui, s’il demeurait identique à ce qu’il est aujourd’hui, permettrait aux libéraux de réclamer davantage d’échevinats que ne peut le faire le CDH. L’équation est simple : au Conseil communal, actuellement, on compte 21 sièges PS, 14 MR et 7 CDH. Dans une configuration PS-CDH, les humanistes représentent à la grosse louche 25 % du collège (3 sur 11 en fait). Si le PS s’associe au MR, ce dernier pèsera 40 % Et d’autres structures comme les intercommunales seront aussi concernées. Reste donc, pour Christine Defraigne, Michel Foret et les autres candidats échevins, à espérer une solide érosion de leur parti le 14 octobre prochain ! Pour l’heure, cela s’annonce plutôt bien.
Dans la foulée, il est plus que probable, comme ce fut déjà le cas il y a six ans, que la préférence pour les coalitions "laïques" se manifestera en bien d’autres lieux. A la Province, bien sûr, où tout est déjà emballé, pesé. A Verviers, où les échevins libéraux se comportent en bons petits soldats de Claude Desama. A Saint-Nicolas, où l’opposition MR a accueilli à bras ouverts le transféré Michel Daerden. A Ans (avec le troisième larron CDH venu s’ajouter), à Esneux (la reconduction PS-MR serait déjà conclue), à Chaudfontaine A la Région même, où le MR s’est aligné sur les plans d’Alain Mathot en matière de logement social.
Hors de la principauté, le rouge-bleu constitue déjà la donne à Charleroi, Mons, Namur. Avec Liège, la dorsale wallonne serait quasi couverte. Il est loin, le discours reyndersien sur le "déplacement du centre de gravité politique en Wallonie", en d’autres termes la fin de l’hégémonie PS. C’était lors de la campagne pour les fédérales de 2007. Autant dire une éternité. Le modèle qui a les faveurs aujourd’hui, c’est bien davantage celui du bon temps où André Cools et Jean Gol, tout en échangeant des invectives pour la galerie, régentaient en parfaite harmonie et fraternité le pays de Liège.
Même si Papa n’est (presque) plus là, il y a de grrrrrands accords dans l’air.