Syndex prie pour nous
A défaut de pouvoir administrer la potion magique qui sortirait la sidérurgie liégeoise du marasme, le gouvernement wallon diligente des études. Après un rapport intermédiaire du bureau Syndex, déjà abondamment commenté, les prochaines semaines apporteront les conclusions de la contre-expertise demandée aux mêmes experts sur la viabilité de l’acier principautaire. La raison d’être de ces mémoires est double : donner au moins l’illusion d’un pouvoir qui agit et entretenir le moral des troupes. Le consultant Laplace n’avait pas compris le deuxième objectif : il a reçu son C4 avec, tout de même, 65.000 euros d’honoraires sur les 195.000 réclamés. C’est à présent Syndex qui prie pour nous avec 73.000 euros dans son tronc.
Publié le 19-05-2012 à 04h15
A défaut de pouvoir administrer la potion magique qui sortirait la sidérurgie liégeoise du marasme, le gouvernement wallon diligente des études. Après un rapport intermédiaire du bureau Syndex, déjà abondamment commenté, les prochaines semaines apporteront les conclusions de la contre-expertise demandée aux mêmes experts sur la viabilité de l’acier principautaire. La raison d’être de ces mémoires est double : donner au moins l’illusion d’un pouvoir qui agit et entretenir le moral des troupes. Le consultant Laplace n’avait pas compris le deuxième objectif : il a reçu son C4 avec, tout de même, 65.000 euros d’honoraires sur les 195.000 réclamés. C’est à présent Syndex qui prie pour nous avec 73.000 euros dans son tronc.
La première copie rentrée de ce nouveau fournisseur a reçu d’emblée un large satisfecit de la CSC comme de la FGTB et pour cause : l’une et l’autre y ont retrouvé leur CQFD. Le bureau français soutient que l’arrêt définitif de la phase liquide ne se justifie pas économiquement et que la sidérurgie liégeoise, avec ses atouts spécifiques (qualité de la main-d’œuvre, position géographique, recherche ) est viable, à condition qu’elle soit intégrée et qu’on y investisse davantage. De quoi convaincre qu’il y a une vie après Mittal et relancer le rêve d’une grande industrie publique ? C’est probablement parce qu’il sent le vent de ce boulet-là que Jean-Claude Marcourt s’est montré beaucoup moins enthousiaste à la réception du document Syndex. "Alors, quoi ?", lui ont demandé trois députés en séance plénière du Parlement wallon le 9 mai. "Je peux répéter pour la trentième fois, à mon avis, la même chose", leur a répondu le ministre PS de l’Economie. Et de relever que si le rapport intérimaire "pense que la sidérurgie liégeoise est rentable, il ne dit pas que c’est la plus rentable". Nil novi sub sole, en somme. Belle douche froide !
Et de fait, les arguments du bureau français ne changeront rien à une conjoncture qui ne s’est nullement améliorée depuis octobre dernier. La surcapacité et les prix de revient trop élevés ne sont pas des formules creuses inventées pour contrarier le redéploiement liégeois. Carsid à Marcinelle n’a pas trouvé de repreneur et chez nos voisins du sud, au pied des deux hauts-fourneaux de Florange à l’arrêt depuis plusieurs mois, on saura bientôt ce que valent les promesses des candidats à la présidence.
Il est vrai, et le rapport Laplace tant honni le soulignait aussi, que les facteurs économiques invoqués par ArcelorMittal ont pu être fortement sollicités, voire exagérés, pour servir de paravent à la vraie raison de la fermeture, qui est d’augmenter les capacités de production de Dunkerque, Gand et Brême. Mais le même Laplace soulignait tout autant la perte de fiabilité sociale de notre bassin et la lourde responsabilité du complexe syndicalo-politique liégeois à cet égard. L’autre cabinet, qui s’est spécialisé dans les conseils aux membres des organes de concertation sociale et qui affiche clairement, sur son site Internet, que "Syndex est du côté des salariés", ne pouvait évidemment pas arriver à un tel constat. Il est toujours bon de savoir d’où les gens parlent.
Mais si les comptables amis des syndicats soufflent bien le chaud sur la sidérurgie en bord de Meuse, ils n’en sont pas moins lucides au chapitre des coûts de sa viabilité. La rénovation jugée indispensable de la cockerie et de l’agglomération (le four où le minerai est aggloméré avant de passer dans le haut-fourneau) ainsi que l’investissement dans une nouvelle centrale d’énergie représenteraient plus de 300 millions d’euros. Par comparaison, la liaison Cerexhe-Heuseux/Beaufays, jugée impossible financièrement (et politiquement), avait été estimée à moins de 200 millions.
Et voilà pourquoi Jean-Claude Marcourt continue d’entonner la même chanson