"Frappée, trainée par les cheveux, j’étais une femme battue": Ana accuse l’ex-député Thierry Warmoes, qui assure que sa femme "dit n’importe quoi"
Son mari, l'ancien député Thierry Warmoes : "Ma femme dit n'importe quoi"
- Publié le 07-09-2023 à 09h17
- Mis à jour le 07-09-2023 à 09h47
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Ce 26 avril 2019, un vendredi, Ana est entrée vers 21 h 30 dans le commissariat de la rue de Bricgniot à Namur. L'inspecteur Sébastien l'a reçue, l'a écoutée et a allumé son ordinateur.
Ana Lara Erazo, d'origine péruvienne, a 51 ans. Le mois d'après, son mari, Thierry Warmoes, serait élu député fédéral sur la liste PTB.
Depuis lors le couple a divorcé. Mais à l'époque, le mariage tient depuis vingt-sept ans.
Aujourd'hui, Thierry Warmoes n'est plus député. Il a remis son mandat le 14 juillet dernier mais reste actif en politique au niveau local. Quand nous l'interrogeons à propos de la plainte déposée par celle qui était encore son épouse, Thierry Warmoes nie. "C'est n'importe quoi. Elle essaie de me noircir avec des histoires inventées de toutes pièces ".
Déposition
Retour au 26 avril 2019, ce soir où le policier Sébastien recueille la déposition : "Mon mari a toujours été violent verbalement envers moi. A la maison, je ne peux rien dire dans le ménage. Il décide de tout et il fait comme il le souhaite. Il prend mon argent. Il ne participe pas aux tâches ménagères ni aux frais des enfants. Il m'a toujours rabaissée et humiliée. (...). La nuit passée, vers minuit trente, il est rentré à la maison venant d'où je ne sais. Il sentait fortement l'alcool. Il m'a dit qu'il était au conseil communal. Je lui ai alors dit que lorsque je l'avais appelé plus tôt dans la soirée pour voir où il se trouvait, il n'avait pas bien raccroché son GSM et j'ai entendu qu'il disait à d'autres personnes que j'étais une vieille, chiante et folle. Je lui ai demandé pourquoi il avait dit cela. Suite à cela, il s'est énervé, il m'a crié fortement dessus et il m'a tiré les cheveux, me faisant très mal. Il m'a traînée de la cuisine jusqu'au corridor situé près de la salle de bains. Ensuite il m'a lancée contre le meuble de la cuisine. Ma tête a fortement touché le meuble. Il a commencé à me filmer alors que j'étais sur le sol et que j'avais fort mal. Il m'a dit qu'il allait publier cela. (...) Mon mari est revenu vers moi. J'ai pris mes chaussures et j'ai commencé à me défendre. Il m'a dit que j'allais crever une fois pour toutes car il n'avait plus besoin de moi et de personne ".
Constat médical
Le lendemain 27 avril 2019, Ana Lara Erazo se présentait au CHR de Namur. Dans le certificat qu'il établissait, le médecin constatait "un hématome au bras droit" ainsi que "des douleurs à la palpation au niveau des muscles trapèzes". Bilan, 5 jours d'incapacité de travail.
Le mois suivant, le dimanche 26 mai, Thierry Warmoes, tête de liste PTB à Namur, créait la surprise avec un score canon de 5 664 voix.
Sa femme, elle, devait revenir au CHR. Alors qu'elle se plaignait de douleurs violentes dans le haut du dos, les médecins délivraient un nouveau certificat : "Douleurs cervicales depuis le mois d'avril après une agression de son mari. Douleur en majoration, elle n'arrive pas à tourner la tête".
Incapable de poursuivre son activité de gardienne d'enfants à domicile, celle qui est alors toujours Mme Warmoes demandait l'intervention de l'AViQ, l'Agence wallonne pour une vie de qualité, suite, est-il précisé, "à une agression le 25-26 avril 2019".
Pas la première fois
Où en sommes-nous quatre ans après : "Je n'ai jamais eu de nouvelles. Je suis retournée au commissariat déposer les certificats médicaux, celui du CHR et celui du médecin traitant, et je n'ai plus rien entendu. (...) On dit que la justice est lente. J'ai pensé que ça prenait du retard à cause de la crise sanitaire".
Elle se trompe. En réalité, M Warmoes a été entendu "trois semaines après le dépôt de plainte", nous a-t-il précisé. Il a nié en pointant "une invraisemblance" : "Vous imaginez que je l'aurais filmée après l'avoir frappée comme elle le prétend, afin de partager ensuite une telle vidéo dans les réseaux sociaux? Réfléchissez. Ça n'a pas de sens".
"Pour me salir"
Bien placé en politique pour connaître la problématique des violences faites aux femmes, l'ancien député PTB réfute "catégoriquement", dit-il, les accusations de celle qui, selon lui, "dit n'importe quoi pour me salir."
"Je ne suis pas un homme violent et les gens le savent", répond Warmoes. "Le mois passé, on m'a vu, au football, m'opposer à un homme qui frappait sa femme. Si j'avais été un mari violent, il y aurait eu d'autres plaintes (que celle de 2019)."
Malheureusement pour lui, il y en a eu d'autres.
Le 26 décembre 2002, sa femme avait porté plainte, déjà à la police de Namur. "Il m'a empoignée, il m'a frappée au visage. J'ai un hématome sous l'œil droit. Ce n'est pas la première fois que mon époux me porte des coups. C'est la troisième fois mais je n'ai jamais déposé plainte ".
Le policier lui avait remis une attestation l'assurant qu'elle serait informée des suites. Ana Lara Erazo n'avait plus rien entendu.
Quelque temps plus tôt encore, un médecin de Vedrin, cette fois, avait constaté "des hématomes au coude gauche, de la fesse et de la cuisse droite" ainsi que "des douleurs au niveau des quatre membres et de la colonne vertébrale basse ".
"Elle voulait toujours plus "
Quant à la plainte d'avril 2019, Thierry Warmoes a tenu à la contextualiser : "Je ne nie pas que quelque chose s'est passé mais ce qu'elle dit, tout ça c'est faux. C'est elle qui m'a frappé. Quand je suis rentré du conseil communal après avoir bu un verre avec une collègue, ma femme m'attendait et elle a directement commencé avec une chaussure. Je l'ai repoussée légèrement et elle est tombée contre le frigo. Je nie catégoriquement. Encore une fois, je ne suis pas un mari violent, je ne suis pas un homme comme ça."
Au final, pour Thierry Warmoes, "c'est de l'argent qu'il y a derrière tout cela. Dès que je suis devenu député, elle a pensé qu'il y aurait de l'argent. Elle voulait toujours plus."
Un prêt de 75 000 euros
Ici, il faut néanmoins rappeler que lorsque madame dépose plainte le 26 avril 2019, Thierry Warmoes est en campagne. Non seulement il n'est pas député fédéral, mais rien n'indique qu'il le deviendra le 26 mai suivant. Au moment de porter plainte, sa femme ne pouvait donc penser, comme il l'affirme, qu'"il y aurait de l'argent."
Mais puisque l'ancien député évoque des questions d'argent, une discussion actuelle, surgie avec le divorce, porte sur un prêt à tempérament de 75 931,80 euros que son ex-épouse conteste avoir signé, sa signature ayant selon elle été imitée. Concernant cette affaire, Ana Lara Erazo a porté plainte au pénal, pour faux en écritures privées. Là-dessus aussi, l'ancien député réfute.
Un enfant (majeur) du couple a été contacté. Il nous dit qu'ainsi qu'une de ses deux sœurs, il "soutient pleinement" sa mère et "bien sûr, partage sa détresse, sans réserve".