Des chutes à tour de bras au Tour de France… Mais pourquoi ?
Les débuts de Tour sont souvent rythmés par de multiples chutes, comme cette année.
Publié le 28-06-2021 à 13h30
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L’enthousiasme suscité par le Grand Départ en Bretagne et les exploits de Julian Alaphilippe et Mathieu van der Poel a été sérieusement douché par les chutes qui ont frappé le peloton, lors de la première étape. Heureusement, comme si les coureurs et le public avaient été échaudés par ces incidents vécus la veille, la 2e étape a été beaucoup moins dangereuse.
Chaque année, les débuts de la Grande Boucle sont le théâtre de nombreuses chutes, des accidents dont l’impact est bien sûr grossi par la loupe médiatique qui surplombe le Tour. Pourtant, des chutes, les coureurs en connaissent malheureusement tout au long de la saison, en course et même à l’entraînement. Celles de ce samedi ont surtout frappé les imaginations par leur côté spectaculaire puisque par deux fois, une moitié du peloton, au moins, s’est retrouvée au sol.
Depuis des années, ce sont ces chutes, ou leurs conséquences (les tendinites par exemple), qui génèrent la plupart des abandons. Leur nombre élevé est dû à plusieurs facteurs.
1. L’imprudence du public. Dans la première des deux grosses chutes collectives survenues samedi, l’implication du public est évidente. Dans ce cas, le geste irréfléchi d’une spectatrice tournant le dos avec sa pancarte pour se faire voir à la télévision a provoqué l’incident, mais tout au long des 3 400 kilomètres du tracé du Tour, ce sont des dizaines de milliers de situations du même style qui pourraient être recensées. Dans aucune autre course au monde, autant de non-connaisseurs ou de personnes peu, ou pas, habituées aux courses ne se retrouvent en bord de route. Le retour du public après un an et demi de pandémie s’accompagne aussi d’une forme de décomplexion des comportements qui ajoute au risque. Les organisateurs ont d’ailleurs porté plainte contre la spectatrice responsable de la première chute. "Pour faire un exemple et provoquer une prise de conscience", dit Thierry Gouvenou, le directeur de la course.
2. Les enjeux. Le Tour est devenu tellement important, et c’est encore plus vrai cette année, alors que depuis début 2020 le cyclisme est durement impacté par la crise liée au coronavirus, que la nervosité est portée à son paroxysme au sein du peloton. Un stress entretenu par les directeurs sportifs et managers des équipes qui, évidemment, veulent tous voir leurs coureurs aux avant-postes. Les équipiers cherchent en permanence à rester groupés autour de leur leader, à les remonter en tête du peloton, à protéger et à placer leur sprinter dans la finale des étapes.

3. Le niveau moyen. Les coureurs sont de plus en plus forts et le niveau de plus en plus élevé. Peu de coureurs sont lâchés à la pédale, les pelotons restent souvent conséquents dans la finale des étapes. Cette année, il y a une équipe de plus que l’an dernier et le peloton comptait 184 coureurs (avant les quatre abandons), au lieu de 176. Statistiquement, le risque de chute est donc un petit peu plus important. Or il suffit souvent d’un coureur qui bascule pour que la moitié du peloton se retrouve au sol.
4. Le parcours. Thierry Gouvenou a volontairement tracé deux premières étapes favorables aux puncheurs, pour emballer le Tour. Des petites routes, sinueuses, vallonnées, génèrent souvent une épreuve nerveuse. Or, au fil des ans, même le Tour de France avec son aura est contraint de se replier de plus en plus sur des routes moyennes, des départementales plutôt que des nationales. Mais commencer le Tour par un prologue est jugé ennuyant par la majorité des suiveurs et spectateurs.
5. La météo. Dans les deux chutes massives de samedi, une météo capricieuse n’a pas d’implication. Mais en temps de pluie ou de bruine, les conditions rendent les routes plus glissantes, dans les virages, au passage sur des lignes blanches, et réduisent la visibilité. C’est un risque supplémentaire.

6. Les obstacles. Comme en Belgique, les routes françaises sont de plus en plus "polluées" par une multitude d’aménagements (rétrécissements, casse-vitesse, ronds-points, îlots directionnels…) qui rendent le parcours de plus en plus dangereux. Ainsi, rien que dans la première étape, 156 passages délicats avaient été répertoriés sur les 198 km de l’étape.
7. Le bruit. Les coureurs du Tour roulent en permanence dans un environnement très bruyant. Aux bruits des véhicules, voitures, motos, hélicoptères et du public particulièrement enthousiaste, s’ajoute le fait que les coureurs portent, pour la plupart, des oreillettes qui réduisent leur faculté à anticiper les dangers grâce au bruit des coups de freins, des alertes des autres coureurs.