Remco Evenepoel savoure sa victoire à Liège-Bastogne-Liège: "Gagner la course de ses rêves en solitaire, c’est le summum"
Un an et demi après sa lourde chute en Lombardie, Remco Evenepoel est de retour.
Publié le 24-04-2022 à 21h53 - Mis à jour le 25-04-2022 à 08h35
/cloudfront-eu-central-1.images.arcpublishing.com/ipmgroup/W4JJXUOSMNDRVGHSY4XNAMB4JU.jpg)
C’est un Remco Evenepoel particulièrement détendu et heureux qui s’est présenté à la conférence de presse, une bonne heure après son succès. En une course, le Brabançon venait d’effacer tous les tourments qui avaient suivi sa terrible chute au Tour de Lombardie.
Quel est votre sentiment après cette grande victoire ?
"C’est formidable et en plus, je m’impose en solitaire, ce qui me rend vraiment fier. Je suis super heureux de gagner cette course. Celle que je voulais enlever depuis toujours au moins une fois. C’est super de gagner seul la course de mes rêves, c’est le summum."
Vous aviez prévu cette attaque de si loin ?
"Nous avions établi une tactique hier (samedi) et je l’ai suivie. Je pensais partir avec un groupe sur la Redoute et attaquer encore pour finir seul sur la Roche-aux-Faucons. Comme je me sentais bien, j’ai placé une petite bombe, je suis parti fort et l’écart s’est vite creusé, j’ai décidé de continuer. J’ai fait un contre-la-montre ensuite même si c’était dur avec beaucoup de vent de face. Dans la Roche-aux-Faucons, les gens m’ont encouragé. J’ai continué et j’ai retrouvé de nouvelles forces. Je savais que dans les cinq kilomètres de plat, ils ne pourraient pas me prendre beaucoup de temps, ni dans la descente. C’est spécial de gagner après avoir fait la décision dans la Redoute. C’est une des mes côtes favorites, une de mes préférées au monde."
Racontez-nous cette course.
"La journée s’est déroulée parfaitement, pour ma première participation. L’équipe m’a super bien aidé, protégé du vent en allant vers Bastogne puis jusqu’à Vielsalm. Malheureusement, il y a eu cette chute terrible. C’est un endroit que je connaissais on en avait parlé lors des reconnaissances, je savais qu’il fallait rester au milieu de la route, qu’elle était moins mauvaise à cet endroit. J’espère que ce n’est pas trop grave pour ceux qui sont tombés."
Vous aimez vous entraîner dans la région. Combien de fois aviez-vous escaladé la Redoute ?
"Je peux la gravir les yeux fermés. J’ai reconnu les routes de la finale je ne sais combien de fois, les montées mais aussi les descentes. J’étais là avec mon soigneur la semaine passée, je savais que tous ces entraînements pouvaient porter leurs fruits. En fait, je connaissais le parcours, sauf entre la Roche et Bastogne. J’aime m’entraîner en Ardenne, depuis que je suis junior. Ce dimanche matin, j’ai envoyé un SMS à mon premier entraîneur, Fred Vandervennet (NdlR : ancien champion de Belgique de marathon). Je lui ai dit que si je gagnais, il aurait une petite part dans mon succès, car nous étions tellement venus ici autrefois."

Justement, étiez-vous aujourd’hui dans un état de confiance comparable à celui que vous aviez chez les juniors ?
"Non, c’est différent. Le niveau est tellement plus haut. Ce n’est pas évident de gagner en WorldTour, c’est un monument, mais je me suis prouvé que je fais partie des meilleurs du monde sur ce genre de courses. Chez les juniors, je gagnais course après course, mais je suis occupé à retrouver la confiance. Heureusement, j’ai atteint mon pic de forme au jour J."
Comment avez-vous vécu la période allant de votre terrible chute au Tour de Lombardie jusqu’à ce succès ?
"Jusqu’à ma chute, tout s’était très bien passé, pendant un an et demi. Je me surprenais moi-même continuellement. En 2020, je n’avais pas été battu (NdlR : il avait gagné coup sur coup les Tours de San Juan, Algarve, Burgos et Pologne) quand je suis tombé. À partir de là, ce fut différent. Mentalement, j’étais dans le creux. J’ai dû me retrouver, être patient afin de redevenir le meilleur Remco (NdlR : il parle de lui à la troisième personne). Ça m’a stressé. Je n’étais pas le Remco que je voulais être. Mon retour s’est fait avec des hauts et des bas, même si, cette saison, je trouvais qu’il y avait de plus en plus de hauts. Parfois, c’était très difficile de continuer à me motiver, de retrouver mon niveau. Heureusement, ma famille, mon entourage et mon équipe m’ont toujours soutenu. Remco est de retour."
Vous avez douté ?
"J’ai réellement dû travailler très durement. Vous pouvez avoir tout le talent possible, seul le travail finit par payer. Jour après jour. Ce furent des moments très difficiles, pendant lesquels, j’ai pleuré de nombreuses fois sans même savoir pourquoi. Tout cela, parce que je ne savais plus qui j’étais. Je ne me retrouvais pas. Heureusement, j’ai pu vaincre cette période compliquée et je me retrouve ici avec ce beau trophée que je souhaitais conquérir."
Pensez-vous que vous avez changé après cette chute ?
"Un nouveau type de muscles s’est développé, ce qui me permet de courir de manière plus explosive sur des côtes comme La Redoute. Mon endurance n’en a pas souffert. En fait, cela a fait de moi un type de coureur différent de celui d’avant la chute. L’hiver dernier, nous avons travaillé volontairement sur l’explosivité, mais aussi sur mes capacités de contre-la-montre. Précisément les deux atouts dont j’avais besoin ce dimanche à Liège. Je suis peut-être devenu un autre coureur, même si ma deuxième partie de saison, avec le Tour de Suisse et la Vuelta, sera plus axée sur mes qualités de grimpeur."
