Borlée, Ickx, Evenepoel et bien d’autres rendent hommage à Philippe Gilbert: "Il a marqué le sport belge et fait vibrer tout le pays"
Qu’ils soient athlètes, hockeyeurs, président du COIB ou, bien sûr, cyclistes, ils parlent tous de Philippe Gilbert avec plein d’admiration.
Publié le 15-10-2022 à 07h54 - Mis à jour le 15-10-2022 à 07h55
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Ce samedi, Philippe Gilbert rangera définitivement son vélo. À l’issue d’un critérium organisé dans le Cauberg, là où il a gagné quatre fois l’Amstel Gold Race (2010, 11, 14 et 17) et où il est devenu champion du monde il y a dix ans. En préambule à ce jubilé, il a eu droit à de nombreux témoignages dithyrambiques de sportifs.
Kevin Borlée: "Sa fougue a fait du bien"
"Philippe, que j'ai pu croiser en quelques occasions, a marqué le sport belge, il a fait vibrer tout le pays", nous explique l'athlète. "Je ne veux pas isoler un souvenir précis, mais plutôt souligner le caractère exemplaire de sa carrière dans son ensemble. L'image que j'ai de lui, c'est un coureur au tempérament offensif dont la fougue a fait beaucoup de bien et amené de la fraîcheur à un cyclisme parfois trop aseptisé avec les oreillettes, les données scientifiques, etc. Il se connaissait parfaitement et on le sentait habité d'une grande confiance. Sa longévité est admirable aussi : il n'est pas évident de rester motivé quand on sait ce que cela représente de rester au plus haut niveau. Il a beau être très pro, très rigoureux dans son approche et avoir un bon encadrement, même avec l'âge, les kilomètres, il faut les avaler ! Et non, je ne lui en veux pas de m'avoir devancé deux fois pour le titre de Sportif de l'année en 2010 et 2011 (rires). La Belgique doit juste mesurer sa chance d'avoir pu compter sur un sportif de cet acabit."
Jean-Michel Saive: "Quelle superbe carrière"
"Je vais enlever un instant ma casquette de président du COIB et parler d'athlète à athlète en disant à Philippe : bravo, respect et quelle superbe carrière !" lance Jean-Michel Saive. "Je sais combien il est difficile de durer au plus haut niveau - ça me parle ! - et sa longévité témoigne de son amour et de sa passion pour son sport. Je ne suis qu'un modeste cycliste amateur - j'ai surtout roulé avec le frère de Phil -, mais je peux très bien m'imaginer les efforts que cela suppose de se maintenir au top. Ou de revenir après un coup du sort comme lors de sa chute au Tour de France. Si j'ai bonne mémoire, il avait d'ailleurs gagné sa course de rentrée, ce qui en dit long sur son caractère. Quand je passe dans le Cauberg ou dans la Redoute, j'ai forcément une pensée pour lui ! J'ai en mémoire quelques souvenirs plus personnels, lorsque nous nous sommes côtoyés aux Jeux olympiques de Londres en 2012 après sa course ou, l'an dernier, lors d'un dîner de gala à la veille des championnats du monde. On s'apprécie l'un l'autre et c'est un champion qui a toute mon admiration."
Victor Wegnez: "On regardait les courses pour le voir"
Le champion olympique de hockey a grandi avec les exploits de Philippe Gilbert. Âgé de 26 ans, il n'a jamais oublié cette saison 2012 lorsque Philippe Gilbert s'est envolé dans le Cauberg vers le titre de champion du monde. "Quand j'étais jeune, il incarnait le cyclisme à mes yeux. Pour moi, il est le plus grand que je voyais car je n'ai pas connu Eddy Merckx. Dès qu'il y avait une course, on la regardait avec les potes en pensant que Phil était capable de l'emporter. La plus belle, c'est bien évidemment celle de 2012. C'était de la folie quand il est devenu champion du monde. Moi, j'avais 16 ans. Je démarrais doucement ma carrière pro. Phil, ce sont aussi des échappées d'anthologie sur le Tour de France. Je crois surtout qu'il a inspiré une génération. Il a toujours été un exemple sur son vélo et en dehors. Il peut partir fièrement car il a inspiré beaucoup de gens. En plus, la relève est assurée avec Wout van Aert et Remco Evenepoel."
Jacky Ickx: "Il a sa place parmi les géants"
On pense inévitablement à Jacky Ickx quand on songe à un sportif belge de légende. Tout comme Eddy Merckx, le célèbre coureur automobile, qui présente le plus beau palmarès dans sa discipline avec notamment six victoires aux 24 Heures du Mans, est un monstre sacré du sport national. D'ailleurs, "Monsieur Le Mans" et "Le Cannibale" sont deux très bons amis. Le sport cyclisme ne laisse dès lors pas indifférent Jacky, qui ne cache pas son respect et son admiration pour Philippe Gilbert. "De toutes les fois où je l'ai rencontré, je garde le souvenir d'une très bonne personne qui mérite amplement la carrière qu'il a vécue", nous a confié "Mr. X". "Notre pays revendique une place de premier ordre dans le monde du cyclisme et Philippe a tout à fait sa place parmi les géants qui ont marqué notre histoire sportive nationale sur deux roues. Grâce à lui, la Belgique a rayonné dans le monde entier. Sa carrière est exceptionnelle par sa longévité et ses nombreux succès prestigieux. Malgré le poids des ans, il a continué à gagner pas plus tard que cette année, sans parler de quelques beaux exploits sur le plan humain. L'hommage que de nombreuses personnes lui réservent à l'heure où il est sur le point de raccrocher son vélo est dès lors amplement mérité. Assurément, le cyclisme belge doit une fière chandelle à Philippe Gilbert, et je suis ravi d'avoir pu échanger quelques mots avec lui à plusieurs reprises."
Patrick Lefevere: "Un exemple de jusqu’au-boutisme"
C'est sous la houlette de Patrick Lefevere que Philippe Gilbert a remporté le Tour des Flandres en 2018 et Paris-Roubaix douze mois plus tard. Entre le manager roularien et le champion remoucastrien, il y a toujours eu une relation forte. "Phil a rejoint le Wolfpack à un moment où je ne pensais plus pouvoir l'attirer chez nous, se souvient le patron de la formation belge. C'est lui qui m'a appelé en me disant qu'il avait trois trous à boucher pour compléter son palmarès et qu'il ne pourrait y parvenir qu'avec nous. Il n'en faisait pas une question d'argent." Du coup, le stratège flandrien et le coureur ardennais ont collaboré pendant deux ans. Pour le plus grand bonheur des deux parties. "Beaucoup de gens pensaient que Philippe était fini. Nous, on a cru en lui." Et au Ronde, comme dans l'Enfer du Nord, Gilbert a exprimé tout son potentiel. "C'est un exemple de jusqu'au-boutisme. Quand il veut quelque chose, il est redoutable. Il ne lâche jamais sa proie."
Wout van Aert: "Il a la classe"
Wout van Aert fait partie des coureurs qui ont vu les exploits de Philippe Gilbert à la télévision avant de le côtoyer au sein du peloton. Il a été marqué par la victoire du Liégeois à Paris-Roubaix. "Je me trouvais avec lui dans le groupe de tête lorsqu'il a attaqué, se souvient l'Anversois. C'est à ce moment-là que j'ai pris conscience de l'étendue de ses qualités. J'ai pu constater de visu à quel point il avait la classe. Phil, c'est un très grand coureur. En outre, c'est un gars sympa avec qui il est agréable de parler."
Remco Evenepoel: "Une chance immense d’avoir été son équipier"
Remco Evenepoel entretient une relation privilégiée avec Philippe Gilbert. Il faut dire que ce dernier l'avait pris sous son aile lorsqu'il fit ses débuts professionnels en 2019. "Ça a tout de suite cliqué entre nous, explique le récent champion du monde. Philippe, c'est un monument du vélo. Quand il parle, tu te tais et écoutes ce qu'il dit. Il m'a aidé à progresser plus rapidement que prévu, il m'a guidé et je ne peux que l'en remercier." Les liens entre eux se sont solidifiés à l'occasion des championnats du monde 2019. Sous le déluge de Harrogate, le jeune Brabançon s'était mis au service de son aîné et avait même été très affecté par son abandon. "Quand tu vois le palmarès de Phil, tu ne peux qu'éprouver un immense respect. Je l'admirerai toujours."
Certaines victoires de Gilbert sont encore très présentes dans la mémoire du vainqueur de la Vuelta. "Même si je jouais au football à l'époque, je me souviens de sa victoire au championnat du monde et à Liège-Bastogne-Liège. Ce succès et l'ambiance qu'il y avait ce jour-là restent quelque chose de très fort et je suis très fier d'avoir pu vivre ça moi-même (NdlR : lors de sa victoire d'avril dernier)." Même s'il bat des records de précocité et qu'il se construit déjà un palmarès exceptionnel, Evenepoel reste fasciné par son aîné. "Phil a toujours été tellement calme dans sa gestion des courses ! C'est impressionnant." Et de conclure : "Ça a été une chance immense pour moi de connaître Phil et d'avoir été son équipier."
Christian Prudhomme: "Le symbole du courage"
Christian Prudhomme, le patron du Tour de France, a lui aussi tenu à rendre hommage à l'immense carrière de Philippe Gilbert. "C'est un coureur que tout le monde apprécie", a-t-il déclaré dans le cadre de Paris-Tours. "Avec un très grand palmarès et une formidable longévité. Pour moi, il est aussi le symbole du courage des coureurs cyclistes. Avec l'exemple de sa chute au Tour de France 2018, quand il chute dans un ravin, remonte sur son vélo, franchit deux cols, termine l'étape avant d'apprendre qu'il souffre d'une fracture de la rotule."
Maxime Monfort: "D’un professionnalisme incroyable"
Maxime Monfort a roulé chez les jeunes avec Philippe Gilbert, avant de faire carrière chez les pros avec lui et de devenir son directeur sportif chez Lotto-Soudal. "Quand j'ai commencé le cyclisme, je ne venais pas d'une famille de vélo. Mais cela a directement bien matché avec Phil. C'est avec lui et sa famille que j'ai acquis mes connaissances du vélo. Ensuite, tout le monde le sait, il a fait une carrière exceptionnelle. Il m'a impressionné quand il est arrivé chez Lotto-Soudal. Dans mon esprit, il n'avait plus rien à gagner au niveau du palmarès ou de l'argent. Mais il a continué à se battre malgré ses difficultés, les chutes, les maladies. Il est resté d'un professionnalisme incroyable. J'estimais être très pro dans ma carrière. Mais je crois qu'à sa place, avec tous les coups du sort de sa fin de carrière, j'aurais dit stop… Il s'est battu, il a visité 25 000 kinés, il a passé des heures dans la salle de muscu pour régler son problème de genou. J'ai un respect incroyable pour son professionnalisme. Et, bien évidemment, pour son palmarès."
Johan Museeuw: "Il aimait vraiment son métier"
Notre consultant Johan Museeuw a toujours eu beaucoup de respect pour Philippe Gilbert. "Je l'ai vu arriver chez les pros. Il avait déjà une solide réputation, un peu comme Tom Boonen, car il avait des références chez les jeunes. J'ai tout de suite vu son potentiel. Je m'étais dit qu'il gagnerait des grandes courses. Il a vraiment été un champion. Il a gagné sur tous les terrains des classiques. Il a été explosif dans les Ardennes et les montées, mais aussi très bon sur les pavés ou dans les bordures des Flandriennes. Cela a été un coureur exceptionnel. Avec une longévité remarquable : il aimait son métier !"