Remco Evenepoel avant l’étape reine du Tour de San Juan au menu de ce vendredi : “L’Alto Colorado, c’est un test mais sans obligation de résultat”
Le champion du monde incarnera l’un des grands favoris de l’étape reine du Tour de San Juan au menu de ce vendredi.
Publié le 27-01-2023 à 08h01
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Les manches de son maillot arc-en-ciel légèrement retroussées pour mieux profiter d’un soleil qui fait grimper le thermomètre autour de la barre des 35°C, Remco Evenepoel est rentré jeudi d’une légère sortie d’entraînement (40km) quelques minutes avant ses équipiers qu’il jure pourtant ne pas avoir attaqués. “Je n’avais tout simplement pas vu qu’Yves (Lampaert) n’était pas encore en selle quand nous avons quitté la terrasse où nous nous sommes offert un petit café (rires).”
Souriant, disponible et détendu, le champion du monde a pris le temps de préfacer l’étape reine de ce Tour de Juan au menu de ce vendredi lors d’une journée de repos dont il a pleinement profité. “Je me suis accordé une grasse matinée (rires). Après le transfert de près de 300 kilomètres pour rentrer à l’hôtel mercredi soir, nous sommes passés à table sur le coup de 23h. J’ai ensuite eu droit à un joli gâteau pour mes 23 ans. Je me suis donc glissé sous la couette plus tard que de coutume.”
Remco, l’étape reine de ce vendredi proposera l’ascension finale de l’Alto de Colorado. Une montée que vous connaissez bien pour l’avoir déjà gravie en 2019 et 2020. Qu’avez-vous retenu de ces deux premières participations ?
”Qu’il s’agit d’une montée très longue, sur laquelle le vent peut jouer rôle important dès l’approche en phase ascendante. Peut être pas pour, déjà, y opérer une réelle différente mais bien pour éventuellement impacter la suite. Il faudra donc être très attentif.”

Pensez-vous qu’il vous soit possible d’effectuer une décision sur une ascension de cette nature, finalement assez roulante avec une pente moyenne autour des 4 % ?
”En 2019, la différence était tombée après une hésitation dans le peloton. A titre personnel, je ne pense pas pouvoir profiter d’un tel moment de flottement. Je crois donc qu’il me faudra sans doute devoir attendre les 4 derniers kilomètres qui y sont les plus difficiles pour épuiser mes concurrents pour le général. Les équipes Medelin (NdlR : Lopez, Sevilla) et Ineos (Bernal, Martinez, Ganna) possèdent un collectif solide comme les Movistar. Il faudra donc les tenir à l’œil. Il conviendra de trouver le bon moment pour tenter d’opérer une décision mais il est difficile de le prédire avant la course.”
Considérez-vous cette cinquième étape comme le premier test de la saison ?
”Il s’agit surtout d’un test quant à mes sensations. Je veux voir comment je grimpe, cerner le boulot que j’ai encore devant moi et quel est mon niveau de compétitivité par rapport aux Colombiens. Mais il n’y a pas de réelle obligation de résultat derrière. On sait que les Sud-Américains sont toujours très bons dans le début de saison. Ils s’entraînent, pour la plupart, tout l’hiver en altitude et ce n’est pas sans doute pas un hasard si les deux derniers vainqueurs au sommet de l’Alto Colorado sont colombiens (NdlR : Anacona en 2019 et Lopez en 2020). Ils sont assez habitués à pousser de grosses puissances au-dessus de la barre des 2000 mètres et l’arrivée de ce vendredi culmine à plus de 2600m d’altitude. J’ai toutefois l’impression que ce facteur n’est pas aussi impactant qu’à Livigno par exemple. J’ai la sensation d’y avoir plus d’air, de mieux y respirer.”

Peut-on comparer cette montée roulante à une sorte de long contre-la-montre en termes de gestion de l’effort ?
”Il y a certaines similitudes, c’est vrai. Mais quand on reste dans les roues, le niveau de puissance développé est tout de même bien moins important. En comptabilisant l’approche, nous allons monter pendant près de 30 kilomètres, soit un peu plus d’une heure selon moi. Il va donc falloir rester bien concentré. Dès qu’on perd son focus, on perd ses jambes. Cela ne sert à rien de faire le fou dans les premiers kilomètres. A la fin, cela finit souvent homme contre homme. Mais cela reste une course toujours très atypique sur cette ascension.”
En 2020, vous aviez d’ailleurs vécu un moment difficile en étant piégé par un coup de bordure avant de rétablir la situation…
”Oui, je m’étais retrouvé dans un troisième groupe et nous avions dû nous employer pour que je revienne. J’avais bouché le dernier trou à 12 kilomètres de sommet si ma mémoire est bonne et j’avais tout de même pu conserver mon maillot de leader.”

Sentez-vous que le peloton vous regarde différemment cette année, que vous êtes considéré comme l’homme à battre ?
”Avec le maillot de champion du monde, les choses sont forcément différentes. Même dans l’approche des sprints par exemple, je remarque que les autres équipes ont désormais tendance à nous laisser la responsabilité de rouler en tête dans les derniers kilomètres. Mais je ne me suis pas encore véritablement projeté sur le statut que j’aurai vendredi matin au départ. Je ne ressens encore aucune pression.”
"Je suis très satisfait des signaux que me renvoit mon corps"
A quel niveau de forme vous jugez-vous actuellement ?
”Je suis très satisfait des signaux que me renvoie mon corps est espère que c’est bon signe pour la suite de la saison et déjà la journée de ce vendredi (sourire)… Nous avons eu pas mal de longs transferts, vécus une étape exigeante mercredi et roulé sous de fortes chaleurs : la journée de repos est donc tombée à pic tout le monde je pense. J’ai fait beaucoup de longues sorties lors de mes entraînements, je sens que la base est là et que je n’ai pas de problème avec les courses de plus de 200 bornes. Mais je n’ai pas encore véritablement travaillé les intensités. C’est au programme de la semaine prochaine, après mon retour en Espagne. Je pense posséder encore certains acquis en la matière, mais il y a encore naturellement du travail pour être au niveau de la Vuelta et être fin prêt pour le Giro. Il n’y a pas d’urgence (sourire). ”
Quelle impression vous a laissé Bernal sur les quatre premières étapes ?
”Il a l’air bien ! Mercredi, son équipier Ganna a d’abord attaqué mais j’avais le sentiment que c’était pour potentiellement servir de relais au Colombien ensuite. J’ai donc décidé de boucher l’écart. Egan est d’ailleurs passé ensuite à l’offensive. C’était sans doute une manœuvre un peu suicidaire, car on était loin de l’arrivée. Cela démontre cependant son degré de motivation et son envie. J’espère pour lui qu’il n’a pas perdu trop d’énergie pour ce vendredi mais c’est un grand coureur et je ne me fais donc pas trop de souci pour lui (sourire).”
"Mon favori pour ce vendredi si je ne lève pas les bras? Sergio Higuita."
Si ce n’est pas Remco Evenepoel qui s’impose ce vendredi qui incarnera alors votre favori ?
”Sergio Higuita, le Colombien de chez Bora-Hansgrohe. Je le sens motivé et en bonne forme dans la perspective d’un championnat national où il voudra défendre son titre. Il est à l’aise en altitude et possède un bon sprint sur les arrivées en montée.”
On voit à l’arrivée des étapes que les maillots de beaucoup de coureurs sont maculés de sels minéraux. Ce n’est pas votre cas. Travaillez-vous cette faculté d’adaptation ?
”Je crois qu’il y a là-dedans quelque chose de génique mais je mets aussi en place certaines choses spécifiques oui. L’été dernier, à Livigno et Denia, j’ai travaillé sous près de 40°C avec un taux d’humidité très important et je sens désormais que je n’ai plus trop de problèmes avec de telles conditions. J’ai trouvé la bonne stratégie pour m’hydrater, avec énormément d’eau avant et après la course, et m’alimenter. Si le corps est étranger à ce contexte, il peut réagir en faisant de la fièvre ce qui n’est évidemment pas propice à la performance. L’hiver, il m’arrive aussi de m’entraîner sur mon home-trainer à l’intérieur avec une veste en plus.”
Avez-vous déjà précisé les derniers contours de votre préparation pour le Giro ? En amont de Liège-Bastogne-Liège, le lieu de votre second stage en altitude restait par exemple à déterminer…
”Non, pas encore définitivement. Cela se fera probablement à l’hôtel Syncrosfera près d’Alicante (NdlR : l’établissement lancé par l’ancien coureur Kolobnev où des chambres permettent de simuler l’exposition à l’altitude). Il y a des itinéraires propices aux entraînements sur le vélo de chrono. Quand on s’entraîne au niveau de la mer, on peut réaliser des efforts à plus haute intensité sans totalement épuiser l’organisme.”
”La Doyenne sera plus dynamique”
Présenté mercredi par ASO, le parcours de Liège-Bastogne-Liège n’empruntera plus cette année la dernière partie de La Redoute, là où Remco Evenepoel avait placé son attaque victorieuse au printemps dernier, puisque le parcours bifurquera avant vers la côte de Cornémont. “Je pense connaître l’endroit car je crois que la Philippe Gilbert juniors (NdlR : que le Brabançon avait remportée en 2017) passait par là. La course sera différente et je crois que cela pourrait provoquer des attaques dès le pied de La Redoute. Le tracé sera probablement plus dynamique car il n’y aura plus cette longue partie entre la difficulté de Remouchamps et la Roche-aux-Faucons. Sur la Doyenne, il y a un tas de scénari possibles et imaginables, mais ce sont toujours les coureurs qui décident.”
”Dommage de ne pas faire de chrono individuel avant le Giro.”
Un autre changement de parcours enregistré cette semaine est celui opéré par l’UAE Tour, la prochaine étape dans la saison de Remco Evenepoel après ce Tour de San Juan. L’épreuve émiratie a en effet choisi de remplacer le contre-la-montre individuel par un chrono par équipes. “Je vous avoue avoir été un peu déçu en lisant cela car cela signifie que je ne ferai aucun chrono avant le Giro. Or, j’aime toujours prendre certains repères, l’horaire de mon échauffement et de mon alimentation. À titre personnel, je crois qu’un chrono classique m’aurait peut-être permis de réaliser une meilleure opération dans l’optique du classement général mais nous irons là-bas avec une bonne équipe, je serai entouré de bons équipiers en qui je dois avoir confiance. Cela devrait se faire tout de même sur le vélo de chrono et pas une monture classique comme cela arrive parfois sur certaines épreuves exotiques.”