Deabeas Owusu-Sekyere, prêt à défier les Mauves: "Lang va tout me raconter sur Anderlecht"
Le Néerlandais Deabeas Owusu-Sekyere est le joueur le plus dangereux de Paide. Formé à l’Ajax, il connaît bien Anderlecht.
Publié le 04-08-2022 à 07h42
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Même si Paide Linnameeskond n’a pas marqué un seul but en 210 minutes de football contre les Arméniens d’Ararat au tour précédent, Anderlecht devra se méfier de Deabeas Owusu-Sekyere, le meilleur joueur offensif des Estoniens. Le Néerlandais aux origines ghanéennes n’est pas n’importe qui : il a été formé par l’Ajax, où il était l’une des perles de la génération 1999.
Vu que Paide est encore un petit club sympa, son chef de presse a autorisé La DH à avoir une longue interview avec le joueur qui doit bientôt lui rapporter une petite fortune. Souriant, rigolo mais aussi ambitieux, Owusu-Sekyere est un bon client comme on les aime. Et si on le voyait bientôt dans le championnat belge ?
Deabeas, on ne vous a pas vu sur la feuille de match ce dimanche en championnat.
"Non. Le coach a mis plusieurs joueurs au repos pour qu’on soit à 100 % contre Anderlecht pour notre match de l’année. Les matchs contre les Arméniens ont coûté beaucoup d’énergie. En Arménie, on jouait dans les montagnes. On avait du mal à respirer. Et au retour, on a dû attendre les tirs au but pour nous qualifier."
Combien de chances sur dix avez-vous d’éliminer Anderlecht ?
"Je suis un garçon honnête. Anderlecht est un club d’un autre niveau que le nôtre. Il suffit de comparer nos budgets. Tout est plus grand chez vous qu’à Paide. Tout le monde pense qu’Anderlecht va facilement gagner. Mais je peux vous promettre qu’on va tout donner. Et si on atteint les tirs au but, Paide sera favori (rires). On s’est qualifiés trois fois de suite aux tirs au but ces derniers mois (NdlR : une fois en Coupe et deux fois lors de ces préliminaires)."
Que savez-vous d’Anderlecht ?
"Que Kompany a été son coach. Et j’ai vu que deux compatriotes sont à Anderlecht : Hoedt et Verbruggen. Je ne connaissais pas Verbruggen, mais je sais évidemment qui est Hoedt. Et Ashimeru est un Ghanéen, comme mes parents. Mais quand je pense à Anderlecht, je me souviens surtout des nombreux matchs de jeunes qu’on a joués avec l’Ajax contre eux."
On a retrouvé un 0-2 pour Anderlecht en demi-finale de la Future Cup à Amsterdam, en 2016. Bornauw et Corryn avaient marqué. Vous avez perdu le match pour la 3e place contre Barcelone avec Riqui Puig. Anderlecht a perdu la finale contre Arsenal à l’issue des tirs au but.
"Maintenant que vous le dites, je me souviens de ce tournoi. Le meilleur Anderlechtois était Antonucci. Ses prestations ne sont pas restées inaperçues à l’Ajax, puisqu’ils l’ont transféré cette saison-là. Même chez nous, il était le meilleur. Maintenant, je l’ai un peu perdu de vue. Il est parti à Monaco, mais je ne sais pas comment il va maintenant."
Il joue à Volendam où il est prêté par Feyenoord. Qui avez-vous eu comme entraîneurs ?
"J’ai eu des entraînements de Ronald De Boer, de Winston Bogarde. Et surtout de Simon Tahamata. Vu qu’il a joué au poste d’ailier - notamment chez vous au Standard - il s’occupait surtout de joueurs comme moi. On rigolait toujours parce qu’il avait un accent moluquois, mais qu’est-ce qu’il m’a appris beaucoup !"
Vous étiez dans la même équipe que Noa Lang.
"Ah Noa… Il venait de Feyenoord, ce qui n’était déjà pas évident. Je ne vais pas dire qu’il avait une mauvaise attitude, mais il avait un sacré petit caractère. Il disait déjà ce qu’il pensait. S’il n’a pas percé à l’Ajax, cela n’a rien à voir avec ses capacités footballistiques."

Vous êtes encore en contact ?
"Oui ! Surtout via les réseaux sociaux. Je vois qu’il joue bien à Bruges. Je vais l’appeler pour en savoir plus sur Anderlecht. Il a déjà gagné quelques fois contre le Sporting, il va certainement me dire leurs points forts et faibles. Il va peut-être regarder le match à Anderlecht."
Dans le stade ? Ce n’est pas une bonne idée. Il n’y est pas très aimé.
"J’imagine (rires). Non, à la télé. J’aurais aimé le revoir, parce que nous étions proches. Nous allions de temps en temps manger un bout ensemble."
Matthijs De Ligt du Bayern était aussi dans votre équipe.
"Lui, il était déjà une bête à ce jeune âge. Je trouvais que c’était un défenseur irritant aux entraînements. Il était grand et fort. Généralement, des gars pareils ont de moins bons pieds, mais pas pour lui. Hors du football, il était plus distant."
Et Justin Kluivert, le fils de Patrick, prêté par Rome à Nice ?
"Quand je suis arrivé à l’Ajax à onze ans, il jouait sur le flanc droit, et moi sur le flanc gauche. Puis, il a préféré jouer à gauche. C’est normal : un droitier aime rentrer dans le jeu pour enrouler des tirs. On devait permuter mais il préférait rester à gauche. Finalement, il a percé à cette position et moi j’ai dû partir. Je suis content pour lui qu’il ait réussi."
Vraiment ? Lang, De Ligt et Kluivert ont tous les trois joué la Ligue des champions.
"Le fait d’avoir joué avec eux me rend fier. et me donne de la confiance. Un jour, je jouerai aussi la Ligue des champions. Je sais que j’ai les qualités pour le faire. Mais à cause de certaines circonstances, j’ai dû parcourir un autre trajet. Je ne me gêne pas pour cela."
"On s’est moqué de moi : je suis arrivé ici en grosse veste"
Deabeas a vécu des cauchemars au Portugal et a relancé sa carrière à Paide.
Owusu-Sekyere n'a toujours que 22 ans, mais son parcours pourrait faire l'objet d'un livre. "Après l'Ajax, je suis parti à Twente, mais j'ai demandé de partir à l'étranger, à 17 ans. Braga me proposait un contrat. Mais au moment de partir, je ne trouvais plus mon passeport. Ma maman était en vacances en Afrique et les liens étaient coupés avec mon papa. Entre-temps, on s'est réconciliés. Résultat : Braga a attendu une semaine et a, ensuite, pris un autre joueur."
Le plan B était Leixoes, aussi au Portugal. "Mais là, j'ai dû attendre six mois - jusqu'à mes 18 ans - avant de signer soi-disant pro. Finalement, je n'ai pas reçu de salaire pendant six ou sept mois. Non, je ne les ai pas attaqués devant la FIFA. Je n'avais pas envie d'être mêlé à un combat juridique."
La prochaine étape fut un prêt à Freamunde, club de D4 au Portugal. "Cette fois, c'est ce club qui a perdu mon passeport. C'était vraiment une période noire dans ma vie. C'est une leçon pour tous ceux qui veulent partir très jeunes. Réfléchissez. D'un autre côté, j'ai appris à vivre seul. Et je parle le portugais."
Le sauvetage devait venir de l'Angleterre. "J'ai fait deux tests concluants à Barnsley et Middlesbrough, en D2 anglaise. Ils me voulaient, mais soudainement, ils devaient payer une indemnité de formation car le contrat que j'avais signé à Leixoes n'était finalement pas un contrat pro. Encore une arnaque ! Je suis devenu fou. Je n'avais plus confiance en quel club que ce soit."
Puis, Paide s'est manifesté. "Quand mon agent m'a cité le nom de ce club, je n'étais pas très chaud. Je n'avais jamais entendu parler de Paide. Mais c'était la crise du Covid et je n'avais pas beaucoup d'options. J'ai accepté d'aller voir pendant une semaine. Et j'étais impressionné par le professionnalisme du club, par les ambitions, par le projet dont j'étais un élément clé."
En bateau à Helsinki pour du shopping
Il n'oubliera jamais ses premiers pas sur territoire estonien. "Sur Google, j'avais vu que c'était un pays froid. J'avais donc mis un gros training et une grosse veste. Sauf que c'était l'été. On s'est bien moqué de moi. 'Que fait ce gars ?' disait-on."
En hiver, en revanche, ce n'est pas la rigolade. "Heureusement, le championnat a lieu en été. Les matchs de préparation en hiver, on les joue en salle. J'ai déjà joué trois fois dans la neige, avec un ballon orange. Ce n'est pas très agréable, mais j'assume. J'ai déjà vécu de belles choses ici, notamment la victoire en finale de la Coupe, le premier trophée de l'histoire du club. Et la vie hors du foot ? Super ! Je prends le bateau pour aller faire du shopping à Helsinki."
Les stades, eux, sont presque vides. En championnat, Paide joue devant 200 ou 300 personnes. Owusu-Sekyere : "Contre Ararat, je crois qu'il y en avait 3 000. Et contre Anderlecht, dans le stade national, il y en aura plus. Les Estoniens ne sont pas de grands amateurs de foot, mais nous sommes la dernière équipe du pays active en Coupe d'Europe. J'aimerais me montrer pour réaliser un transfert. Je suis prêt pour une nouvelle étape dans ma carrière. En D1 belge ? Pourquoi pas ! Si je peux faire ma pub : je suis fort en un contre un, je garde bien le ballon, j'ai une bonne frappe et je marque facilement."