Benfica : une armée de recruteurs et le meilleur centre de formation
Le montant fait tourner la tête. Sur les cinq dernières saisons (dernier mercato de janvier compris), Benfica a vendu pour 706 millions d'euros en joueurs. Personne n'a fait mieux dans le monde (Monaco et l'Ajax complètent le podium avec 656 et 609 millions). Ensemble, sur la même période, le Club Brugeois et Genk, les deux clubs belges qui ont de loin touché le plus dans les ventes, ont reçu 377 millions.
Publié le 15-02-2023 à 08h57
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Quelle est la recette de Benfica pour atteindre de tels chiffres ? On s’est plongé dans le mode de fonctionnement, parfois surprenant, du meilleur vendeur de la planète foot. Ce qui est certain, c’est que tout cela ne doit rien au hasard.
Une armée de scouts sans limites (mais en équipe)
Pendant longtemps, Benfica a fait de l’Amérique du Sud son terrain de chasse. Comme beaucoup de clubs portugais. Mais la direction, notamment sous l’impulsion du président Rui Costa, a décidé qu’il fallait se diversifier et pêcher dans le monde entier. Cette saison, les Lisboètes ont recruté en Argentine, au Brésil, mais aussi au Danemark, aux Pays-Bas, en Norvège et en Tchéquie.
Pour quadriller la planète, Benfica peut compter sur une armée de… 200 recruteurs. Des salariés, des indépendants et même parfois des occasionnels. Avec une stratégie particulière : le directeur sportif envoie des équipes de 10 recruteurs dans un pays pendant plusieurs semaines. Sur place, chaque équipe tourne pour voir plusieurs fois les joueurs repérés. En moyenne, chaque scout voit cinq matchs par jour, au stade ou sur ordinateur. Le but est de limiter les erreurs et d’homogénéiser le recrutement.
Une académie où on apprend même à danser
C’est l’autre fournisseur de talents. Le Benfica Campus est devenu le meilleur centre de formation du pays, piquant le titre au voisin du Sporting. Pour ça, le futur adversaire du Club a mis les moyens : 10 millions sont injectés dans l’académie chaque année. Pour qu’elle reste à la pointe à l’approche de son vingtième anniversaire, mais aussi pour recruter les meilleurs jeunes du pays.
Benfica a des terrains d’entraînement sur cinq autres sites dans le pays. Pour ne pas déraciner les jeunes trop tôt, mais aussi pour ne pas leur laisser l’occasion de s’attacher au club de leur région et d’avoir l’idée d’y faire leurs premiers pas chez les pros.
Au Benfica Campus, on veut aussi maximiser la formation. Pour ça, les jeunes ont des entraînements variés, parfois étonnants comme des séances de danse. Le but est de tout tenter pour faire éclore un talent, en s’adaptant au développement physique, mais aussi à la personnalité de chaque gamin.
Et ça marche plutôt bien : Benfica a joué 4 des 9 finales de Youth League depuis la création de la compétition et a sorti des talents comme Ruben Dias, João Felix, João Cancelo et Bernardo Silva.
Un équilibre compliqué dans le bureau du directeur sportif
C’est un choix de riche, mais un choix quand même. Le directeur sportif de Benfica doit se transformer en équilibriste pour ne pas donner l’impression de privilégier le centre de formation ou l’équipe de scouting. Si, par exemple, le recrutement de talents à l’étranger bouchait trop les perspectives des meilleurs jeunes, ils pourraient rapidement s’en aller. Porto, le Sporting et Braga sont à l’affût.
Le directeur sportif doit aussi oser. Si Benfica vend cher, il achète cher également. Enzo Fernandez, vendu pour 121 millions à Chelsea, avait été acheté 44 millions un an plus tôt. Pareil avec Darwin Nunez (acheté 34, vendu 80). Chaque erreur peut donc se payer au prix fort vu les sommes investies.
Un modèle envié en Belgique, mais risqué
Selon la dernière étude de Deloitte, Benfica est le 24e club le plus riche d'Europe, juste entre Brighton et Wolverhampton, des Anglais gavés par les droits TV. Une position qui fait rêver les grands clubs des petits pays européens, notamment en Belgique. Bart Verhaeghe aimerait un jour s'incruster dans ce prestigieux top 30. Le président du Club Bruges sait à quel point le modèle de Benfica est exemplaire et… risqué.
L’an passé, Benfica a touché 240 millions en recettes, mais a quand même réussi à perdre de l’argent (-17 millions). La direction sait à quel point elle dépend des transferts. Le départ de Fernandez à Chelsea va (largement) combler le trou, mais l’équilibre est fragile. Si le club se plante deux ou trois mercatos de suite, les pertes pourraient rapidement devenir gigantesques vu les montants investis en amont.
C’est ce qui est arrivé au FC Porto ces dernières années. Le grand rival du Benfica a connu une vraie récession financière.
Quelques ratés sur le marché des transferts, des pépites moins bien vendues que prévu et des résultats sportifs décevants ont coûté des millions. Benfica en a profité pour s’imposer comme le club numéro un du pays, mais en restant conscient que la même mésaventure est possible au bord du Tage.