La Ryder Cup, épreuve fascinante et envoûtante
La Ryder Cup cultive les paradoxes. Dans le monde ultra-individualiste du golf professionnel, voilà une compétition qui se joue en équipe et qui ne distribue aucun prize money.
Publié le 28-08-2012 à 04h15 - Mis à jour le 28-08-2012 à 08h29
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Évocation La Ryder Cup cultive les paradoxes. Dans le monde ultra-individualiste du golf professionnel, voilà une compétition qui se joue en équipe et qui ne distribue aucun prize money. Et pourtant, il n’est pas un joueur qui ne rêve d’y participer. Au vrai, cette épreuve fait partie de l’histoire et de la légende du golf. Elle fascine et envoûte. Elle met en exergue des valeurs d’un autre temps : l’esprit d’équipe, bien sûr, mais aussi l’honneur, la fierté, la passion, le surpassement de soi. Et l’ivresse du match-play, formule magique par excellence, fait le reste. Parlez de la Ryder de Cup à un champion, fût-il blasé et, aussitôt, son visage s’illumine comme celui d’un débutant.
Il faut remonter à 1921 pour trouver les origines de cette compétition qui est au golf ce que la Coupe de l’America est au yachting. Sur le parcours écossais de Gleneagles, quelques professionnels britanniques défient, pour le fun, leurs homologues américains. Le duel n’a évidemment rien d’officiel. Mais, cinq ans plus tard, à Wentworth, les deux équipes se retrouvent néanmoins pour un nouveau défi, baptisé Walker Cup. L’histoire se serait sans doute arrêtée là si un certain Samuel Ryder, fils d’un marchand de maïs, commerçant prospère et modeste joueur de golf, n’était tombé sous le charme de cette compétition. Mécène avant l’heure, le généreux donateur décide d’offrir un trophée à l’équipe victorieuse. Ainsi naît, en 1927, la Ryder Cup, un joyau en or surmonté d’une représentation d’Abe Mitchell, golfeur professionnel et professeur particulier de Samuel Ryder. Personne n’imaginait, à l’époque, que ce vase plutôt élégant allait, de génération en génération, alimenter les fantasmes de tous les golfeurs de la planète
Il est rapidement décidé que la compétition se disputera tous les deux ans, alternativement des deux côtés de l’Atlantique. La première édition se déroule, les 3 et 4 juin 1927, sur le parcours du Worcester Country Club, dans le Massachussets. Emmenés par le grand Walter Hagen et par le mythique Gene Sarazen, les Américains dominent nettement cette pendaison de crémaillère, s’imposant par 9 points et demi à 2 points et demi.
Jusqu’en 1959, la compétition se dispute sur deux jours avec, au menu, 4 foursomes le premier jour et 8 simples le deuxième, chaque fois sur 36 trous ! Depuis 1979, elle se dispute sur trois jours avec 16 doubles (foursomes et fourballs) et douze simples. Les Américains, emmenés par une génération exceptionnelle où l’on retrouve des champions du niveau de Ben Hogan, Sam Snead ou Byron Nelson, dictent leur loi lors des premières éditions, parfois même de façon humiliante, comme en 1947, où ils s’imposent 11-1 !
Jusqu’aux années 80, les succès britanniques se comptent d’ailleurs sur les doigts d’une seule main : en 1929, lors de la deuxième édition jouée à Moortown, en 1933 à Southport et en 1957 à Sheffield. Dans les années 60-70, avec Arnold Palmer puis Lee Trevino et Jack Nicklaus à la barre, la suprématie US frôle carrément l’insolence. C’est précisément Jack Nicklaus qui, en 1979, est à la base d’une vraie révolution. Las sans doute de la suprématie de son pays, il incite la PGA à modifier, avec l’accord des descendants de Samuel Ryder, le format de l’épreuve et à autoriser les meilleurs joueurs européens à venir renforcer l’équipe britannique. Meilleur joueur de l’époque, Severiano Ballesteros participe également au lobbying. Lors de l’édition de 1979, qui se joue en Virginie, c’est donc une équipe européenne certifiée conforme, avec notamment les Espagnols Severiano Ballesteros et Antonio Garrido, qui affronte les Etats-Unis. Sur ses terres, l’Amérique reste la plus forte mais, dans l’esprit de tous les observateurs, la Ryder Cup a acquis une nouvelle dimension et est entrée dans une nouvelle ère. On en a confirmation en 1985 sur le parcours anglais du Belfry où l’Europe - avec quatre Espagnols (Ballesteros, Olazabal, Canizares et Pinero) et un Allemand (Langer) - remporte son premier titre dans une ambiance délirante.
Deux ans plus tard, à Muirfield Village, dans l’Ohio, lors de la 27e édition, la formation européenne réussit un doublé historique, scellant son premier sacre en terre américaine sous les yeux incrédules de Jack Nicklaus, promu capitaine en déroute !
Au fil des ans, l’Europe a confirmé ce nouvel équilibre des forces. Mieux, insensiblement, elle a pris l’ascendant sur son rival US, s’adjugeant même quatre des cinq dernières éditions : au Belfry (2002), à Oakland Hills (2004), au K Club (2006) et au Celtic Manor (2010). Qu’en sera-t-il au Medinah ?