Manu Stockbroekx avant Dragons - Bloemendaal : "Je ne voulais plus voir mon stick"
Publié le 28-03-2018 à 20h35 - Mis à jour le 29-03-2018 à 06h57
Après un burn out de deux mois, Manu Stockbroekx a retrouvé le plaisir du jeu. Derrière le Beatrixpark à Amsterdam, Manu Stockbroekx, 24 ans, a trouvé refuge du jeudi au dimanche soir dans une maison typique sise dans une rue calme de la capitale. Depuis 1 an et demi, il partage son appartement avec trois de ses coéquipiers dont Xavi Leonart qui laissera sa place l’an prochain à Arthur Van Doren. La décoration est très sommaire. Les affaires sont rangées à l’exception d’un vélo dans le couloir. "Je me suis acheté un vélo de vitesse car je me suis fait voler mon vélo traditionnel", confie le défenseur.

Le frigo regorge de produits sains, mais il mange tous les soirs au club-house de Bloemendaal. La vue depuis la salle à manger qui fait office aussi de salon ne vaudrait pas une carte postale. Le logement est à près d’une heure du club. "Je ne suis pas souvent à Amsterdam. Je fais un peu de yoga. Parfois, je prends un café au coin de la rue avec des coéquipiers."
A trois jours d’un huitième de finale explosif en EHL entre son ancien club du Dragons et son employeur actuel de Bloemendaal, le Red Lion ne montre aucun signe de nervosité. Durant une demi-journée, il nous a fait partager sa vie qui file à toute vitesse. Tantôt derrière un volant, tantôt derrière son guidon, tantôt en Belgique, tantôt aux Pays-Bas, il vit à 100 % pour le hockey avec un plaisir retrouvé.
"Souvent, le soir, je suis cassé", souligne-t-il d’emblée sans chercher à se plaindre. Sa vie, il ne l’échangerait pour rien au monde. Du lundi au jeudi midi, il joue le rôle de back droit des Red Lions avant de se transformer en libero à Bloemendaal du jeudi soir au dimanche soir. "Je passe mon temps entre les meetings, le fitness, les entraînements sur le terrain et la route."
Entre Anvers, Amsterdam et Bloemendaal aussi. "Suis-je heureux ? La question est difficile ! Je fais partie de deux équipes fantastiques. J’ai la chance de me consacrer à 100 % au sport que j’aime. Cela demande aussi des sacrifices. Beaucoup de sacrifices."
Il a arrêté ses études l’année qui précédait les Jeux olympiques. Il a réduit au minimum les interactions avec ses amis. Il vit loin de Margot, sa petite amie. Il entretient son corps comme s’il s’agissait d’une formule Un.
Un abandon volontaire de stick au Bee
En décembre dernier, le ressort s’est cassé. L’édifice de sa vie s’est effondré à la suite d’une défaite cruelle en quart de finale de la finale de World League à Bhubaneswar. Cette vague était trop rapprochée d’une autre déception majeure en finale des Championnats d’Europe à Amstelveen. Ces revers ont mis en relief un ras-le-bol de cette vie de sportif. A quoi bon se tuer aux entraînements si la médaille d’or se refusait à lui ?
"J’étais fatigué et vraiment déçu. J’ai discuté avec Ellen Schouppe. Je faisais un burn out." Forfait pour le stage hivernal en Nouvelle-Zélande, il a entamé une cure de deux mois sans hockey tout en gardant un programme physique. "Je suis parti travailler dans l’entreprise de mon papa pour découvrir un autre monde et relativiser mes difficultés."
Après avoir tout donné pour son sport, Stocki a tout lâché en un coup. "La pression sur l’équipe nationale est colossale." Au niveau de son club, les discours étaient très compréhensifs car d’autres joueurs ont traversé cette phase avant lui. De décembre jusqu’en février, Manu Stockbroekx a goûté à une vie classique. L’objet de ses tortures avait même été abandonné à Kontich. "Après le tournoi en Inde, j’ai laissé mon stick au Beerschot. Je ne voulais plus le voir. A la mi-janvier, j’ai commencé à ressentir un manque. Je suis parti le retrouver."
Sorti plus fort de cette crise existentielle, le libero jouit à nouveau de chaque seconde passée sur le terrain.

Back droit en Belgique, libero aux Pays-Bas
Entraîneur-adjoint de Shane McLeod, Michel Van den Heuvel est également le T1 de Bloemendaal. Avec un faciès fermé et des traits durcis par son caractère dur, l’homme a joué un rôle dans les deux dernières saisons de Manu Stockbroekx. Le joueur apprécie la méthode Van den Heuvel.
"Ce gars est authentique, dit l’Anversois. Assurément, il figure parmi les meilleurs entraîneurs au monde. S’il est dur, il est surtout juste. Pour nous, il est un personnage central car nous avons besoin de lui pour évoluer. Il instaure la discipline avec une rigueur de tous les instants. Quand il est en Belgique, son attitude est différente car son poste n’est pas le même."
Michel Van den Heuvel, qui nous a priés de quitter le club mercredi en début de soirée lorsque l’entraînement démarrait, a pris un risque en plaçant Stockbroekx dans l’axe de la défense, comme libero. "J’ai appris à regarder le jeu avec un angle différent. Je dois le diriger."

Il n’en a pas perdu pour autant ses pointes de vitesse, qui sont la marque de fabrique de son jeu. "Je peux sortir dans l’axe une fois par quart-temps en moyenne."
Chez les Red Lions, Shane McLeod lui demande surtout de fixer le jeu. "Je suis moins en contrôle. Je peux filer comme un dingue sur mon flanc", analyse Stocki qui avait été repris chez les Red Lions lors de la World League II à Paris. "Charlier s’était blessé. En moins de 24 heures, je me suis retrouvé sur le terrain."
Avenir : "Un jour, je jouerai à… Bruxelles"
Né sportivement au Dragons à 6 ans grâce à une famille hollandaise domiciliée à Brasschaat, il a grandi avec cette équipe jusqu’à ses 22 ans avant de partir à Bloemendaal où il honore un contrat de 4 ans qui le mènera jusqu’aux Jeux olympiques de Tokyo. Contrairement à d’autres joueurs, Manu Stockbroekx désire découvrir un maximum d’horizons sportifs. Quand il reviendra en Belgique, il ne jouera pas au Dragons. "Je ne suis pas vraiment connecté avec le Dragons. Je sais que le club est en deuxième position en DH. J’aimerais plutôt jouer pour un club bruxellois ou le Watducks. Parfois, je fais des choses illogiques (rires). J’aime sortir de ma bulle de confort. Chaque nouvelle expérience te fait grandir."
Au soir de sa carrière de sportif, il entend prolonger l’expérience en tant que coach mental. "Pendant mes matches, je repense à mes moments de galère pour y puiser plus d’énergie."

Infrastructures : Bloemendaal, un club petit et puissant
Néerlandophone et sociable, Manu Stockbroekx n’a éprouvé aucune difficulté à s’intégrer à Bloemendaal. Propriétaire de 23 titres, le club attend le 24e depuis 2010. Son club-house témoigne d’une tradition forte. A l’échelle des Pays-Bas, les infrastructures sont petites avec seulement 4 terrains et 1 500 membres. A cause des voisins, le club ne peut même pas se doter de tribunes, ce qui en fait une exception parmi les matricules du top 5.
Les supporters forment une véritable famille qui ne manque pas de se serrer les coudes en cas de besoin. "Nous sommes en deuxième position ce qui nous plaît car le premier à la fin du championnat régulier ne gagne plus depuis 20 ans. Après la déception d’Amstelveen où nous avons perdu en finale des championnats d’Europe, j’étais content de retrouver les Pays-Bas pour changer d’air. Je sens que je grandis ici tant aux niveaux sportif qu’humain", conclut celui qui vise le doublé Hoofdklasse-EHL.
Dragons-Bloemendaal (samedi 18h15) : "Je laisserai mes émotions au vestiaire"
Un Dragons - Bloemendaal en huitièmes de finale de l’EHL n’amuse pas beaucoup l’Anversois Manu Stockbroekx. "Au moment du tirage, je regrettais que ce match tombe si tôt dans la compétition. Cette affiche est digne d’une demi-finale ou d’une finale. Le gagnant de ce match possédera tous les atouts pour être le futur champion en EHL." Il rejette d’un flick les émotions que certains veulent placer dans ce match forcément spécial pour Stocki. "J’ai appris à laisser mes émotions au vestiaire. On attend de moi que je preste à un haut niveau quel que soit le nom de l’adversaire. Comme les joueurs du Dragons sont suffisamment connus, je n’ai pas dû tuyauter le coach ou mes coéquipiers. Nous poserons notre jeu comme d’habitude."
Néanmoins, il cite ses amis de l’équipe nationale comme "plus grandes menaces". "Denayer s’entraîne très bien avec les Red Lions. Wegnez est très rapide." Il oublie Arthur Van Doren. "Il ne faut pas trop attirer l’attention sur lui." S’il reconnaît ne pas avoir suivi les matchs du Dragons cette année, il se méfie des Anverois. "Les grands joueurs comme Denayer, Van Doren, van Aubel, Thijs et Hendrickx répondent toujours présents dans les grands matchs."