Jill Boon: "Ma maman était à ma place au Mondial de 1976"
La n° 27 a été bercée par les récits de sa maman Karin Coudron.
Publié le 30-07-2018 à 08h52 - Mis à jour le 30-07-2018 à 10h08
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La n° 27 a été bercée par les récits de sa maman Karin Coudron. Samedi soir, les Red Panthers n’ont rien changé à leurs habitudes d’après-match, mais trouver le sommeil a été plus compliqué après le succès magistral face au Japon. L’adrénaline a mis du temps à retomber.
"Nous avions préparé le tournoi pour vivre ce scénario, ce qui nous aide à gérer nos émotions", rappelle l’expérimentée Jill Boon. La célèbre numéro 27 dispose d’un atout de choc pour l’aider à relativiser l’enjeu : sa famille. Dans les tribunes londoniennes, Karin Coudron joue son rôle de maman-supportrice. Mieux que tous les autres, elle connaît les émotions qui traversent le stick de sa fille. Lorsque la Belgique avait décroché la 3e place au Mondial argentin de 1978, Karin Coudron était à la place de sa fille sur le terrain. "J’ai souvent entendu cette histoire, se marre Jill Boon. Elle me racontait la différence qu’il existait entre les messieurs et les dames. Pourtant, à l’époque, les dames réalisaient de meilleurs résultats. En 1976 comme en 2018, l’équipe était d’abord une bande de copines ambitieuses."
Si Jillou boucle la boucle quarante ans plus tard, la comparaison s’arrête là. "Le jeu n’avait rien à voir mais toutes avaient cette volonté d’honorer le maillot national. Ma maman me racontait que, lors de championnats d’Europe, elle était rentrée pour travailler un jour avant de reprendre seule la route vers Amsterdam. Elle payait une partie de ses voyages. Nous, nous avons la chance de connaître une époque très pro. Nous bossons durement pour le mériter." Karin Coudron complète la phrase en rappelant qu’elle a logé dans des universités lors de compétitions internationales. "Le confort était sommaire et des rats couraient dans les douches."
Mère et fille n’ont pas besoin de mots pour communiquer. Depuis les tribunes, un geste ou un regard suffit à transmettre un message. "Quand les supporters sont là en tribune, nous les entendons. Ils nous aident à pousser plus loin. Ils ne sont pas toujours nombreux mais on les voit danser et mettre l’ambiance. La présence de ma maman et de Jacques compte beaucoup pour moi."
Au White dans l’équipe de sa maman
Karin Coudron sent les matchs et son analyse est toujours écoutée religieusement par Jill. "Durant les moments de famille, nous refaisons le match en général. Avant, elle était plus dure avec mes prestations. Quand le match se passe mal, elle m’encourage. Aujourd’hui, elle est plus douce. J’attends toujours son feedback avec plaisir. Je vois sa fierté."
Cette fierté, Jill Boon l’avait déjà ressentie en inversant les rôles il y a près de vingt-cinq ans. "En 1978, je n’étais pas née, mais je suis née avec un stick. A Uccle Sport ou au Léo, j’accompagnais toujours ma maman aux entraînements du dimanche matin. A 2 ans, je suivais déjà les matchs. J’ai baigné dans l’ambiance des vestiaires. J’ai été le témoin de sa carrière."
D’ailleurs, quand elle avait 13 ans, elle a joué dans la même équipe que sa maman au White Star. "Le hockey a renforcé les liens de toute la famille. Ma maman, ma grand-mère, mon oncle, mon frère et j’en passe, toute la famille vit pour le hockey."
Elle se sent comprise et soutenue. Ainsi, quand elle a fait le pas vers une vie full hockey, ses parents l’ont accepté alors que les risques étaient élevés. Jill et Tom Boon ont réussi leur pari. La Red Panther, qui évoluera la saison prochaine au Racing, a porté les couleurs de l’équipe nationale qui est passée du Moyen-Age, il y a dix ans, à l’époque contemporaine. "Je peux dire que j’ai connu l’équipe d’avant, qui était déjà contente de participer aux tournois. Aujourd’hui, nous visons toujours plus haut. Je suis heureuse de voir le bonheur qui anime cette équipe. Nous formons une équipe fantastique."
"J’ai pleuré pour Tom à Rio"
Pour en arriver là, Jill Boon a connu quelques tournois catastrophiques, dont une Coupe du monde et une demi-finale de World League. Tout ne s’est pas construit en un jour. "Nous avons d’abord mis le temps à nous bâtir une condition physique qui est la base de tout. Mentalement, nous avons grandi à force de jouer de grandes compétitions. Niels Thijssen a réussi à faire passer l’humain avant la joueuse. Il a récupéré un groupe blessé il y a deux ans. Il a redonné confiance à chacune en lui donnant de l’importance. Il n’a jamais caché qu’on allait s’entraîner plus durement encore. Il ne vit pas dans le monde des Bisounours. Ensuite, il s’est attaqué à la défense avant de travailler le jeu offensif."
L’équipe n’est pas encore arrivée au niveau des Reds Lions, mais elle y travaille sans relâche. "Nous ne sommes que 13e mondiales et conscientes que nous ne battrons pas tout le monde. Nous apprenons à poser notre jeu pour attendre un objectif à long terme : le Top 10 mondial."
Pour atteindre le Top 8 de la Coupe du monde, elle comptera sur un renfort familial de poids, Tom Boon. "Il est revenu de vacances et viendra à Londres pour voir notre match de lundi soir contre l’Espagne." La présence de son frère n’est pas anodine. "Nous nous appelons très souvent. Il me donne toujours son avis sans chercher à me ménager. Nous partageons tout : joie, doute, frustration,… Pour moi, les JO de Rio restent un grand souvenir car il a obtenu la médaille. J’ai pleuré ce jour-là. Des larmes de joie pour lui."

"L’Espagne ? De toute façon, ce sera dur"
La Belgique a une belle carte à jouer lundi soir contre l’Espagne. L’autre match du jour opposera, par exemple, l’Argentine (FIH 3) à la Nouvelle-Zélande (FIH 4). "De toute façon, tous les matchs seront compliqués. J’espère que nous en jouerons encore un maximum", dit Jill Boon. L’an passé, la Belgique avait perdu de justesse contre la Roja en demi-finale de World League à la Rasante, mais elle avait pris sa revanche en quart de finale des Championnats d’Europe. Les deux nations se connaissent très bien. "A ce niveau, nous connaissons tout le monde. Notre staff abat un travail considérable pour analyser nos adversaires. Il nous donne tellement d’infos que nous savons toujours ce que nous devons faire. L’Espagne a récupéré Oliva et Gutierrez par rapport à l’an passé. Les Espagnoles sortent d’une poule très difficile avec l’Argentine et l’Allemagne. Elles ont un très bon pc et sont rapides vers l’avant." Malgré son analyse, Jill Boon ne compte pas baisser les bras. "Nous avons nos qualités et nous miserons dessus. Nos matchs ont toujours été serrés."