André Lotterer: "Une chance extraordinaire"

André, comment êtes-vous arrivé dans le baquet de cette Caterham F1 pour Spa ?

Je suis quasiment aussi surpris que vous. Je suis resté en bon contact avec Colin Kollès depuis 2009 quand j’avais disputé les 24 Heures du Mans avec un seul équipier sur son proto Audi privé. C’est comme cela que je m’étais fait repérer par l’usine. Voici un bon mois, il a repris en main la destinée de l’écurie Caterham. Il réorganise l’équipe et croit apparemment toujours en moi. Il m’a donc téléphoné voici quelques jours pour me demander si un one shot à Francorchamps pouvait m’intéresser. Je lui ai répondu que je n’avais pas d’argent. Mais il m’a dit qu’il n’est pas question d’amener de budget.

Avez-vous réfléchi longtemps avant d’accepter ?

Non, même si je ne pensais plus vraiment à la F1. J’ai pris une autre direction et je n’en suis pas frustré du tout. Mais là, c’est une opportunité extraordinaire qui ne se refuse pas. Surtout à Spa, mon GP. J’ai tout de même appelé le Docteur Ullrich pour lui demander la permission. Audi reste bien sûr ma priorité. Il m’a tout de suite donné son feu vert. J’ai dû aussi prévenir mon team de Super Formula que je ne pourrais pas rouler le week-end prochain la manche de Motegi. C’est dommage car je suis actuellement 2e d’un championnat que j’ai déjà remporté en 2011. Mais ils ont compris mon choix. Une telle chance ne se représentera sans doute jamais.

Vous n’avez pas peur de sauter comme cela dans un baquet de F1, avec la plus modeste écurie ?

Bah ! Cela reste une voiture de course. J’ai déjà disputé une quinzaine de jours de tests en F1 en 2001 et 2002 lorsque j’étais réserviste chez Jaguar. Cela remonte certes déjà à bien longtemps, mais en parallèle au Championnat du Monde d’Endurance, j’ai toujours continué à rouler en Formula Nippon. Ces monoplaces vont aussi vite aujourd’hui que des F1 comme la Caterham. Je vais devoir m’habituer aux nouvelles technologies, aux pneus Pirelli. J’ai passé quelques heures dans le simulateur à Leafield ce lundi et cela s’est bien passé. Et puis, même si je tiens la lanterne rouge sur la monoplace actuellement dernière du classement, personne ne se moquera de moi. J’estime que je n’ai rien à perdre. Je suis excité de relever ce défi, d’avoir l’occasion de faire de la F1 la même année que ma 3e victoire au Mans, comme les grands de l’époque. Je suis un pilote polyvalent.

Quelle est la finalité ?

Faire le mieux possible et vivre une expérience inoubliable. La Caterham bénéficiera ici d’une grosse évolution : museau avant, capot moteur, aileron arrière, pontons, tout a changé. Il n’existe qu’un exemplaire de cette version B et il sera pour moi. Le team espère bien sûr pouvoir récupérer la 10e place du Championnat constructeurs mais pour cela, il faudra faire mieux que la 9e place de Bianchi à Monaco. Dans des circonstances normales, cela ne s’annonce pas évident. Mais à Francorchamps, tout est possible.

Allez-vous terminer la saison ?

Non, normalement seule la course de Francorchamps est prévue. Je ne rêve plus de faire carrière en F1. Même si l’on me proposait une saison complète en 2015 chez Caterham, je ne quitterais pas mon statut de pilote officiel Audi. Je ne veux pas paraître arrogant, mais ce serait débile de laisser tomber un grand constructeur et de risquer de me retrouver à pied un an plus tard. Je suis trop conscient de la chance que j’ai d’être professionnel en WEC. Mais bon, au cas où cela se passe pas trop mal, je suis encore dispo pour Monza et Suzuka qui ne tombent pas en même temps que des courses d’Endurance…