Le jour où Jacky Ickx a failli mourir, prisonnier des flammes
Lors du GP d’Espagne 1970, le Belge s’est sorti seul, miraculeusement quasi indemne, du brasier de Jarama.
Publié le 23-05-2020 à 10h15
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Lors du GP d’Espagne 1970, le Belge s’est sorti seul, miraculeusement quasi indemne, du brasier de Jarama.
Jarama, 19 avril 1970, il y a un peu plus de cinquante ans. Le départ du GP d’Espagne, dans la banlieue de Madrid, a été donné depuis sept tours. Jackie Stewart au volant de sa March est en tête ; Jacky Ickx sur sa Ferrari pointe au 5e rang.
Soudainement, alors qu’il s’apprête à déborder Rodriguez dans un gauche en léger dévers, la monoplace du Belge se fait harponner par la BRM en perdition de son équipier des 24 Heures du Mans, Jackie Oliver. Un porte-fusée de la monoplace du Britannique a cédé. Il perd le contrôle, traverse l’herbe et vient taper, heureusement pas trop vite, la F1 rouge de son ami Ickx, qu’il envoie en tête-à-queue.
Le réservoir de la Ferrari explose sous le choc et les deux voitures s’embrasent instantanément dans un gigantesque brasier.
Si Oliver parvient à s’extraire rapidement de son habitacle et court se mettre à l’abri, Jacky, lui, a le souffle coupé par l’impact. Il a le réflexe, dans un premier temps, d’actionner son extincteur, mais, vu la hauteur des flammes et l’importance de l’incendie, c’est complètement inutile.
Harnais coincé
Coincé dans son baquet, il tente alors de décrocher son harnais d’une seule main. En vain. Sans extincteur, les commissaires assistent impuissants à la scène. Le champion belge est en train de mourir dans son épave, livré à lui-même. Personne ne peut lui porter secours dans cette effrayante fournaise.
Épuisé, Jacky Ickx est envahi par la douleur. La peinture de son casque, sa visière, ses gants fondent rapidement. Les secondes paraissent des minutes dans cet enfer. Il se sent partir.
Au bord de l’asphyxie, dans un ultime effort, il parvient, au énième essai, à enfin ouvrir sa ceinture de sécurité. Dans un réflexe quasi instinctif, tel un animal blessé, il bondit soudainement de sa coque, court à travers l’incendie, tombe, se relève et traverse la piste la combinaison en feu. La course n’a pas été arrêtée et il risque de se faire faucher par une monoplace.
Brûlé au 2e degré
Il se jette au sol, se roule dans l’herbe. Un gendarme tente de lui porter secours et d’éteindre les flammes avec son képi, en se brûlant les mains. En vain. C’est finalement un pompier arrivé avec sa lance à incendie qui retourne le corps du malheureux avec la puissance de son jet d’eau et parvient à le sauver.
Brûlé au deuxième degré, notre héros sera soigné à l’institut Edith Cavell à Bruxelles.
Trois semaines plus tard, le futur vice-champion du monde 1970 se retrouve au départ du GP de Monaco, portant quasi aucune séquelle de cet effroyable accident.
Il aurait pu y laisser la vie comme Roger Williamson, Jo Schlesser, Piers Courage et d’autres morts prisonniers des flammes ou être défiguré comme Niki Lauda quelques années plus tard au Nürburgring. Mais rien de tout cela.
Jacky Ickx n’aime pas aujourd’hui raconter ces histoires du passé. Mais comme il l’a souvent répété : "Je suis un survivant, j’ai eu beaucoup de chance dans ma carrière."
Cet après-midi-là en Espagnece fut un véritable cauchemar. "Le feu, c’est la plus grande horreur."
Les flammes emporteront son ami et copilote Christian Tarin quelques années plus tard lors d’un accident au Rallye des Pharaons, en 1991.
Mais, il y a plus d’un demi-siècle déjà, elles ne sont pas venues à bout de Jacky Ickx, le miraculé de Jarama.