Max Verstappen, programmé pour devenir champion du monde
Un parcours atypique pour ce surdoué limbourgeois d’à peine 24 ans.
- Publié le 12-12-2021 à 18h51
- Mis à jour le 13-12-2021 à 09h50
Max Verstappen est donc devenu champion du monde de F1 pour la première fois. "Enfin", selon son père Jos qui le voyait, lors de son entrée dans le monde des Grands Prix à 17 ans 5 mois et 15 jours, vite devenir le plus jeune champion de tous les temps. Faute d'une Red Bull compétitive les années précédentes, il lui aura fallu cependant attendre sa septième saison pour décrocher la timbale.
Plus jeune à marquer des points, à monter sur un podium, à gagner une course ou même dix, il a été battu par Sebastian Vettel, Lewis Hamilton et Fernando Alonso dans le record de précocité pour accéder, à 24 ans, au titre de roi du monde.
Vingt-quatre ans d’attente et d’investissement pour papa Jos, un ex-pilote de F1 (107 départs et 2 podiums) réputé pour sa tête brûlée, connu pour avoir été l’équipier de Michael Schumacher, pour s’être sorti indemne d’un spectaculaire incendie de sa monoplace lors d’un ravitaillement et pour son côté bagarreur. Et pas qu’en piste…
Mais le plus bel accomplissement de “Jos The Boss” en F1, c’est Max !
Né le 30 septembre 1997 à la maternité d’Hasselt, d’un papa néerlandais coureur de F1 (Jos a roulé en GP de 1994 à 2003) et d’une maman belge ancienne championne de karting, Max était prédestiné pour le sport moteur. Toute sa famille a toujours été bercée dans ce monde. De son papy Frans, doué en karting, à son grand-oncle Paul Kumpen, ancien champion de rallycross dont le fils Anthony a aussi décroché quelques couronnes nationales en Belcar avant d’être privé de licence pour “dopage”.
"Max pilotait un quad ou un kart avant de savoir lire et écrire", raconte aujourd'hui sa maman Sophie.
Sur la piste de Genk à 3,5 ans
À trois ans et demi, il tournait déjà sur la piste de Genk, très vite devenu son jardin après que ses parents soient revenus de Monaco pour habiter à Maaseik, dans le Limbourg, près de la frontière belgo-néerlandaise. "Il a dû disputer sa première course en Mini, avec une dérogation, à l'âge de 4 ou 5 ans", se souvient le photographe Fritz Van Eeldik qui a suivi en image son ascension. "Je n'ai commencé à réellement le soutenir que lorsque j'ai vu qu'il était réellement doué", poursuit son papa, qui a obtenu sa garde lors de son divorce en 2006.
Tous les week-ends, chaque jour après l'école, Max et son papa qui habitaient alors à Bree se retrouvaient à Genk pour s'entraîner, par tous les temps. "Max était un surdoué, il gagnait tout", se souvient le propriétaire de la piste de kart de Genk, Paul Lemmens. "Une année, il a remporté 59 courses sur 60. Il ne vivait que pour cela. Il était assez réservé et ne parlait que de go-kart. Il voulait tout comprendre sur les réglages, le fonctionnement de son engin."
"Il avait un caractère fort, un véritable teigneux. Il n'était pas dans le paddock pour se faire des amis. Il savait ce qu'il voulait : gagner", s'exclame son oncle Anthony.
Un entraînement "à la dure" par son père qui prenait les chronos, réglait le châssis et n'hésitait pas à l'engueuler quand cela ne tournait pas comme il voulait. "Il lui interdisait de dépasser ses rivaux en ligne droite. Il ne pouvait doubler qu'en virage, si possible à des endroits où on ne l'attendait pas, par surprise…", a-t-il un jour raconté à notre collègue Jo Bossuyt.
"Il lui arrivait de mettre le kart en panne, de mettre exprès des mauvais réglages pour donner la vie un peu plus dure à son fils qui survolait trop la concurrence", reprend Fritz.
À l'école Boomgard de Maaseik, Max était un élève "discret, travailleur ne recevant jamais de punition", se souvient un de ses anciens professeurs. "Il était fier quand, le lundi, il revenait avec un trophée qu'il montrait à ses camarades de classe devenus ses premiers supporters."
"Mais il était déjà volontaire", embraye son prof de gymnastique. "Il a une fois refusé de faire un exercice qu'il jugeait trop dangereux car il avait peur de se faire mal avant une compétition de kart."
L’école était obligatoire, mais très vite, une fois arrivé en secondaire, avec la multiplication des courses internationales, il a dû passer aux cours particuliers en ligne car il n’avait plus le temps de se retrouver sur les bancs.

Un procès pour un titre de champion de Belgique
En 2012, il décroche plusieurs titres nationaux, en Belgique ou dans le Benelux. Son père doit faire un procès au RACB dont le directeur refuse de lui donner la coupe de champion de Belgique car il est Néerlandais. Mais le championnat était "open" et ouvert aux étrangers. Par l'intermédiaire de son oncle Paul Kumpen, alors président de la fédération belge, il demande à intégrer le RACB National Team. Mais cela lui est refusé car il a trop l'image néerlandaise. À cette époque, en plus d'avoir du sang belge, d'être né chez nous, d'y avoir toujours résidé, d'y être scolarisé et de posséder le passeport belge, Max était sans doute le plus belge de tous les néerlandais. Mais son papa, très populaire outre-Moerdijck, lui a vite fait comprendre où étaient l'argent et son intérêt. "J'aime la Belgique où j'ai grandi, mais je me suis toujours senti néerlandais. Je supporte quand même les Diables rouges, sauf quand ils jouent contre les Pays-Bas", nous a confiés Max.
En 2013, à 16 ans, alors qu'il vient d'être sacré champion du monde de karting (KZ à boîte de vitesses) et double champion d'Europe KZ et KF, Max teste en secret une Formula Renault au Pays de Galles. S'en suivront des tests en monoplace un peu partout, notamment à Francorchamps avec l'équipe belge KTR. "Je n'ai jamais vu pareil phénomène", nous avait prévenus le patron Kurt Mollekens. "J'avais déjà fait rouler une année Stoffel Vandoorne, mais ce Verstappen était encore un ton au-dessus. Il ira très loin."
Après avoir été invité à un stage Ferrari et participé aux Florida Winter Series où il remporte ses premières victoires en monoplace, son papa décide de l’engager, avec le soutien de Fritz Van Eerd (le patron des magasins Jumbo) directement en F3 Euro Series en 2014. Il termine troisième du championnat suite à quelques abandons, derrière Esteban Ocon et Tom Blomqvist. Mais il impressionne en remportant dix manches dont les trois de Francorchamps et, après des discussions avec Toto Wolff de chez Mercedes, finit par signer un contrat à long terme avec Red Bull.
Changement de règlement à cause de lui
En 2015, il dispute son premier Grand Prix en Australie avec Toro Rosso alors qu’il n’a pas encore l’âge du permis de conduire. Cela provoque un tollé de la part de ses collègues estimant qu’il est trop jeune et la FIA change le règlement à cause de lui. Désormais, il faut avoir son permis de conduire et un certain nombre de points acquis dans les formules inférieures pour accéder à la F1. Grâce à cela, Max est certain de rester à jamais le plus jeune pilote de F1…
Pour l’anecdote, à ce moment, le président du RACB lui avait proposé de lui offrir sa Super Licence s’il roulait en F1 sous les couleurs du drapeau belge. Inutile de vous préciser la réponse du clan Verstappen !
SOPHIE KUMPEN “Il est très sensible et pleure quand il voit des animaux mourir à la télévision”

À cette époque, sa maman Sophie nous raconte : "Max est encore mon petit garçon. Quand il revient dormir à la maison parfois le week-end, il me demande s'il peut dormir avec moi…" Et ajoute : "Il est très sensible. Quand il voit par exemple un film où un animal meurt, il ne peut pas s'empêcher de pleurer."
Peut-être est-ce une des raisons pour lesquelles, l’année dernière, il a fait une donation à une association pour la protection des koalas menacés par les feux de forêts en Australie.
Max devient très vite le plus jeune pilote à marquer des points, mais se fait aussi remarquer par son tempérament agressif et quelques crashes spectaculaires rappelant ceux de son papa.
En 2016 à Barcelone, Red Bull profite d’un accrochage de Daniil Kvyat avec son équipier Daniel Ricciardo pour promouvoir à sa place, à Barcelone, leur jeune prodige. Le Russe sera poursuivi toute sa vie par Max qui, aujourd’hui, vit une belle histoire d’amour avec Kelly Piquet (fille du triple champion de F1, sept ans plus âgée que lui), son ancienne compagne et mère de leur petite fille.
Dès son premier GP pour Red Bull, Max, qui réussit l'exploit de s'imposer, devenant ainsi à 18 ans et 227 jours le plus jeune lauréat de l'histoire de la F1 : "J'ai essuyé quelques larmes ce jour-là, chose que je n'avais pas fait à sa naissance, car je savais que Jos et lui avaient atteint une partie de leurs objectifs", confie sa maman qui, avant chaque course lorsqu'elle n'est pas sur place, va allumer un cierge pour son fils à l'église Sainte Gertrude de Maaseik. "Ils n'avaient pas sacrifié treize ou quatorze ans de leur vie pour rien."
ANTHONY KUMPEN “Je le vois bien décrocher dix titres mondiaux”
Mais ce n'était qu'un début pour Max, un gamin irrévérencieux, sûr de lui, sans complexe tombé dans la période de dominance de Mercedes et Lewis Hamilton qu'il allait défier à quelques reprises sans jamais pouvoir rivaliser pour le titre mondial avant cette année. La stabilité des règlements et le travail de sape du motoriste Honda ont permis à Red Bull de revenir doucement à hauteur des Benz. Le talent de Max, un brin trop arrogant pour faire l'unanimité, a fait le reste. Cette année, il compte plus de victoires, de podiums, de points et de kilomètres en tête que son grand rival. Il a donc cent fois mérité cette première couronne pour laquelle il avait été programmé quasi le jour de sa naissance. "Et ce n'est qu'un début", estime Anthony Kumpen dans une interview accordée à la RTBF. "Si Red Bull ne se loupe pas avec la nouvelle voiture, je le vois bien en remporter dix. Dans une décennie, il n'aura que 34 ans."
Tout est donc possible pour ce résident monégasque qui, grâce à un salaire estimé à 45 millions d’euros avec les primes de victoires, voyage en jet privé, possède quelques belles voitures de collection dans son garage (une Aston Martin DB11, une Vantage, une Porsche 911 GT3 RS…) et gâte sa famille. Il avait notamment promis un sac Louis Vuitton à sa petite soeur Victoria-Jane lors de son premier succès.
Énorme merchandising
En plus des rentes de son team, “Super Max” (un tube créé par trois fans et qui a fait un carton à l’occasion du retour du GP au Pays-Bas à Zandvoort où il a été accueilli par une véritable marée orange) et son manager Raymond Vermeulen ont développé un énorme business autour du “merchandising” Verstappen avec notamment une casquette changeant toutes les trois courses et la location de tribunes entières réservées uniquement aux fans de Max, le premier Limbourgeois sacré champion du monde.
