24H du Mans : le ciel en arbitre de la course du siècle
Ferrari en première ligne, Toyota en favori, Porsche pour la 20e, Cadillac en feu, Peugeot sans aile : on assiste à une renaissance de l’endurance.
- Publié le 10-06-2023 à 14h55
On y est. C’est le jour J. Ce samedi après-midi à 16h pile, la star de la NBA LeBron James donnera, devant 330 000 spectateurs, le départ des 91es 24H du Mans. Une épreuve de légende, l’une des quatre plus grandes courses automobiles au monde avec le GP de Monaco de F1, les 500 Miles d’Indianapolis et le Rallye de Monte-Carlo.
Un double tour d’horloge mythique remporté depuis 1923 par les plus grandes marques (Bugatti, Jaguar, Bentley, Matra, Porsche, Ferrari, Ford, Peugeot, Audi, Toyota) mais aussi quelques cadors du sport automobile. Parmi eux, les Belges Paul Frère, Olivier Gendebien, Lucien Bianchi ou Jacky Ickx toujours surnommé “Monsieur Le Mans” même si son record de six succès de l’époque a été battu par le Danois Tom Kristensen, grand marshall de cette édition du centenaire.
Cinq constructeurs pour la victoire
L’affiche de cette bien nommée course du siècle est tout simplement superbe. Après cinq années moribondes où les Toyota faisaient la course seulement face à elles-mêmes, on vit une véritable renaissance de l’endurance grâce à l’avènement du nouveau règlement Hypercar moins cher que les anciens protos LMP1. Du (moindre) coup, les constructeurs sont de retour dans la Sarthe : Porsche pour viser un nouveau record de vingt succès aux 24H du Mans l’année de ses 75 ans, mais aussi Ferrari qui s’élancera en première ligne cet après-midi cinquante ans après les 312 PB de Merzario-Pace et Ickx-Redman. Sans oublier Peugeot et ses fragiles 9X8 au concept unique sans aileron arrière (de quoi expliquer que les belles françaises sont loin de voler ?), mais aussi le géant américain GM présent avec trois vrombissants protos Cadillac, une Corvette favorite en GT et l’unique Camaro représentante de la Nascar. En attendant les retours officiels de BMW, Lamborghini, Alpine et Ford en 2024. Aucun championnat n’a attiré autant de constructeurs.
L’endurance, son histoire et ses histoires font toujours recette. "L’engoue… Mans" est énorme avec une affluence digne des meilleures années et un record de soixante-deux bolides sur la grille.
Du coup, avec une quarantaine de prototypes, seize nouvelles Hypercar dont une dizaine au moins peut prétendre à un trophée unique de 80 kilos, la course s’annonce aussi indécise que la météo. Après tant d’années ronronnantes où le vainqueur était connu d’avance, où l’on n’avait aucune surprise après une courte nuit, les amateurs de suspense sont ravis et excités.
Les 499P sont certes les plus rapides sur un tour, les Porsche (avec quatre 963) les plus nombreuses et les Toyota les plus expérimentées. Les Japonais sont heureux de retrouver enfin de la concurrence pour valoriser une éventuelle sixième victoire consécutive. Présents en nombre, les Américains espèrent péter des flammes au sens figuré et non plus propre comme le pauvre Sébastien Bourdais en Hyperpole. Tandis que les Peugeot, pas assez rapides et déjà vues souvent en panne durant les essais, auront bien du mal à rééditer en 2023 les exploits de leurs ancêtres 905 ou 908.
Des orages annoncés
En espérant maintenant que les orages annoncés pour le départ et le début de soirée pimentent encore le spectacle et ne viennent pas gâcher la fête des cent ans, soit avec de trop longues neutralisations (on se souvient que le directeur de course portugais Eduardo Freitas a horreur de l’eau) soit avec des accidents. Le tracé à l’ancienne du Mans, long de plus de 13 km, reste en effet parmi les plus dangereux avec notamment sa célèbre ligne droite des Hunaudières où, même avec deux chicanes depuis la fin des années 80, les voitures atteignent encore les 340 km/h.
Des vitesses de fous pour une ronde folle créée il y a un siècle et faisant rêver bien des générations de pilotes et de fans depuis 1923. Une épreuve de longue haleine où l’on se bat contre ses adversaires mais aussi contre les éléments, un énorme défi pour les hommes et les mécaniques où l’adage “Pour finir premier, premièrement tu dois finir” prend tout son sens. Ce n’est pas à Toyota, contrainte à l’abandon il y a six ans déjà à un tour de son premier succès, qu’il faut l’expliquer. En 2017, les Nippons avaient offert sur un plateau d’or son dix-neuvième succès à Porsche. Six ans plus tard, ces deux grands-là se retrouvent. Avec cette fois l’avantage présumé de la fiabilité pour Toyota bien décidé à prendre sa revanche. Et à prouver au monde entier que le premier constructeur mondial, même s’il s’est planté en F1, ne gagne pas la même année le WRC, le Dakar ou Le Mans que quand il est seul…