Le Vendée Globe: "Le Graal de tout skipper"
Ce dimanche à 13h02, vingt-neuf marins quitteront les Sables d’Olonne pour affronter l’"Everest des mers", le Vendée Globe. Denis Van Weynbergh nous livre ses impressions avant le départ de la 8e édition de l’Everest des mers. Entretien.
Publié le 06-11-2016 à 09h54 - Mis à jour le 06-11-2016 à 09h55
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Ce dimanche à 13h02, vingt-neuf marins quitteront les Sables d’Olonne pour affronter l’"Everest des mers", le Vendée Globe. Le Vendée Globe est la course ultime parce qu’elle ne s’embarrasse d’aucun artifice : un homme, un bateau, un tour du monde et voilà… Trois mois (parfois moins, souvent plus) d’une aventure humaine et sportive où les meilleurs vont chercher la performance, un morceau de gloire, peut-être… Les anomymes vont y puiser le dépassement de soi et des instants de bravoure insoupçonnés.
Du chenal des Sables-d’Olonne au cap Horn en passant le Pot au noir et les quarantièmes rugissants, 25 000 milles (+/- 46 000 kilomètres) où le danger guette sous la forme d’un Ofni (Objet flottant non identifié), d’un chalutier qui n’aurait pas branché sa balise de détection de peur que des concurrents n’investissent sa zone de pêche, des growlers (morceaux de glace à la dérive), des mammifères marins, etc. Sans compter la colère des océans : l’Atlantique nord qui a déjà englouti son lot de skippers, l’Indien sournois et le Pacifique qui n’a de pacifique que le nom.
1. Dix nationalités représentées. Jamais Vendée Globe n’aura réuni un plateau aussi international. Si les marins français restent largement majoritaires, on recense neuf autres nationalités dont un Japonais et un Néo-Zélandais… Pas la moindre trace d’un Belge par contre : "Pour faire un Vendée Globe, réunir les finances (voir ci-dessous) est plus important que le niveau sportif. Je rêve de le faire dans quatre ans, si les paramètres sont réunis" , explique Jonas Gerckens, le Liégeois vice-champion de France de course au large en solitaire. Sur les vingt-neuf marins, aucune femme non plus. Isabelle Autissier, Ellen McArthur et plus récemment Samantha Davies n’avaient pas manqué de pimenter l’épreuve. Dommage.
2. Les favoris. Si le plateau et quantitativement impressionnant, ils ne sont qu’une petite dizaine à pouvoir espérer toucher au Graal. Le superfavori se nomme Armel Le Cléac’h (Banque Populaire). Deux fois deuxième du Vendée Globe, il est en pleine possession de ses moyens avec un superbateau et un gros budget… Il est presque trop favori. Attention, Sébastien Josse (Edmond de Rotschild) ne fait pas de vagues mais il est en embuscade. Le marin est talentueux, le bateau est neuf et les moyens - voir sponsor - ne manquent pas. Alex Thomson (Hugo Boss) va vite, parfois trop et c’est ça son problème. Jean-Pierre Dick est un tour-du-mondiste accompli. Le "hic", c’est qu’il ne gagne pas en solitaire… Jérémie Beyou, Vincent Riou, Paul Meilhat (qui naviguera sur le Macif de François Gabart),… sont à surveiller comme le lait sur le feu.
3. Les foils. C’est la grande "affaire" de ce Vendée Globe. Ces deux appendices implantés de chaque côté de la coque, permettent de "soulager" le bateau, d’en diminuer la surface mouillée, c’est-à-dire les forces de frottement. Bref, d’aller plus vite (de trois à quatre jours de gain sur un tour du monde d’après les simulations informatiques). Si les "foilers" ont remporté les deux transats préparatoires au Vendée Globe, aucun n’a encore accompli un tour du monde. Les monocoques armés de foils sont par ailleurs plus inconfortables et nécessitent une vigilance accrue du marin. C’est un paramètre à tenir en compte sur trois mois de course. L’avenir de la voile est dans les foils reste que cette édition du Vendée Globe est la dernière où un bateau "à l’ancienne" (Riou, Meilhat, Eliès,…) peut entrevoir la victoire. Wait and see.
Denis Van Weynbergh: "Le Graal de tout skipper"

Denis Van Weynbergh nous livre ses impressions avant le départ de la 8e édition de l’Everest des mers. Entretien
L’Everest des mers n’a rien perdu de son pouvoir d’évocation : ils sont nombreux, les anciens solitaires à arpenter les pontons de la cité vendéenne pour se replonger dans l’ambiance des courses au large. Ancien participant de la Route du Rhum et de la Jacques Vabre, Denis Van Weynbergh est de ses hommes pour qui le Vendée reste le Graal de tout marin.
Cette 8e édition est-elle plus ouverte que jamais sans un Gabart ou un Desjoyeaux au départ ?
Les favoris sont plus nombreux, c’est certain mais ce Vendée Globe marque surtout un tournant en terme de technologie au niveau de la conception des bateaux avec l’arrivée des foils (NdlR : appendices permettant de sustenter la coque) sur les Imoca de dernière génération. Depuis la création de l’épreuve, c’est la première révolution d’importance. Sera-ce un avantage ou pas ? Difficile de le dire. Toutes les études prouvent qu’au reaching qui devrait être les conditions météo du départ selon les derniers bulletins et dans les vents de travers au portant, le gain avoisine 1 à 3 nœuds à l’heure, ce qui peut donner un avantage de près de 50 miles sur une journée, c’est énorme. Ces foils seront-ils fiables et tiendront-ils la distance sur un tour du monde, personne ne peut répondre aujourd’hui à cette interrogation.
Les novices seront également nombreux (14).
Gabart, Riou ou Desjoyeaux étaient novices lors de leurs succès. Quand on possède le talent, tout est possible pour autant que l’on puisse s’appuyer sur une équipe fiable. La préparation physique est primordiale pour ce type de défi. Ces skippers sont des sportifs de très haut niveau. Les aspects physiques, diététiques, cardio ou sommeil sont autant de paramètres qui font l’objet de toutes les attentions.
Le Vendée reste-t-il un défi ultime ?
C’est le Graal, l’Everest des mers. Comme tous les skippers, j’en rêve. Mais en Belgique, il est déjà malaisé de réunir un budget pour le Rhum ou le Jacque Vabre. Alors le Vendée, c’est un peu le rêve inaccessible. Les ténors s’appuient sur un budget de 12 millions d’euros sur quatre ans. Pour être au départ dans quatre ans avec des moyens limités, il faut réunir 1,5 million d’euros sur deux ans. Peu d’industriels belges consacrent autant d’argent à la part publicitaire de leur société. Tant qu’il n’y aura pas une vraie culture de la voile, on ne doit pas s’attendre à de gros changements…