Julie Allemand, la star du basket belge féminin : "Tony Parker est fier d’être né en Belgique"
Julie Allemand s’entend à merveille avec le président de l’Asvel. La semaine prochaine, toute l’équipe sera en stage chez lui, à San Antonio.
Publié le 10-08-2019 à 07h56
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Julie Allemand s’entend à merveille avec le président de l’Asvel. La semaine prochaine, toute l’équipe sera en stage chez lui, à San Antonio. Après une longue période de vacances, Julie Allemand a repris la route de Lyon cette semaine. Lundi, elle s’envolera pour les États-Unis et un séjour de 12 jours à San Antonio, chez Tony Parker, le président de l’Asvel. "On ira même manger chez lui", dit-elle. Avant cela, elle a longuement pris le temps d’évoquer de nombreux sujets en notre compagnie. Parce qu’à 23 ans à peine, sa carrière ne s’arrête pas sur un titre de championne de France et les objectifs sont encore nombreux.
Julie, un président comme Tony Parker, ça ne se trouve pas partout.
"C’est le président mais son attitude est avant tout celle d’un ami. Il ne met aucune barrière. Après le titre, il a fait la fête avec nous. Il s’investit énormément dans l’équipe féminine. Après sa saison en NBA, il a assisté à quatre de nos cinq matchs de la finale du championnat de France et il a beaucoup échangé avec nous, que ce soit pour nous féliciter ou nous donner des conseils. Il envoie aussi beaucoup de messages, il téléphone. Il m’a même contactée pendant les vacances pour voir si je récupérais bien. Et il s’est toujours montré très ouvert avec mes parents."
Le fait qu’il soit un peu Belge vous a aidée à rompre la glace avec lui ?
"Il rigole de mon accent mais il est fier de dire qu’il est né en Belgique. L’équipe masculine a recruté chez nous aussi, ça veut dire qu’il apprécie notre basket."
Partir à Lyon, c’est la décision la plus importante de votre carrière jusqu’ici ?
"Peut-être pas la plus importante car Braine avait été un bon choix aussi mais c’est vrai qu’au départ, je devais aller à Montpellier avec Valery Demory. Puis Tony Parker l’a convaincu de signer à Lyon et a regardé mes vidéos. Il a demandé que je l’accompagne et j’avoue que j’hésitais. Montpellier, c’était l’Euroligue et la plage tandis que l’Asvel repartait de zéro et n’était même pas sûr de rester en D1. J’en ai longuement discuté avec mon agent, j’ai fait mon choix et ce n’est qu’à ce moment-là que j’en ai parlé à ma famille mais je ne regrette absolument rien."
C’est vrai qu’à Lyon, il n’y a pas la plage mais c’est joli quand même.
"Oui ! J’ai un appartement dans la rue de la salle, je suis à 6 minutes à pied. Ma voisine est une joueuse, la ville est superbe et le climat aussi. Je ne m’ennuie pas une minute, je continue à découvrir des recoins de la ville et, quand j’ai un peu plus de temps, j’aime aller me relaxer à Annecy."
À Montpellier, vous auriez pu travailler sous les ordres de Thibaut Petit…
"J’ai fait 6 ou 7 entraînements et 3 ou 4 matchs sous sa direction dans la Wallonia Team mais c’était il y a longtemps et je ne me souviens pas de comment c’était. Puis j’aurais dû l’avoir à Braine mais il est parti juste avant que je n’arrive, ce qui m’avait d’ailleurs un peu effrayé. En tout cas, ça a été super chouette de jouer contre lui en finale du championnat de France. On était au moins sûr qu’un Liégeois ou une Liégeoise serait sacré. On ne s’est pas beaucoup parlé parce que chacun était hyper-concentré sur le boulot mais, après le dernier match, je l’ai réconforté et je lui ai dit qu’il n’avait rien à se reprocher, au contraire : il a repris l’équipe dans des conditions difficiles et il s’en est super bien sorti. Tout ce que je lui souhaite, c’est de faire aussi bien cette saison."
Et les ambitions de l’Asvel, c’est quoi ?
"D’abord arriver au Final Four de l’Euroligue puis… la gagner. C’est un palier supplémentaire mais nous avons encore transféré deux très bonnes joueuses (NdlR : l’arrière de Bourges Marine Johannes et le pivot de… Montpellier Helena Ciak) . Nous devons donc y croire."
Vous avez évolué, vous aussi : avant, on disait que vous étiez un bon défenseur. Maintenant, vous êtes la meilleure meneuse du championnat de France…
"Ha ! Ha ! Ce titre de meilleure meneuse, il est un peu sorti de nulle part. Ce n’était pas du tout un objectif car je ne cherche pas les récompenses individuelles, même si je dois admettre que ça aide à grandir. J’ai eu la chance d’avoir la confiance du coach et de mes équipières. Puis je suis bien entourée car pour terminer avec 7 assists de moyenne, il faut aussi que les autres mettent les paniers au fond. C’est vrai, toutefois, que j’ai évolué vers l’avant : j’étais meilleur défenseur avant, je n’ai plus d’aussi bonnes jambes et je me dis même parfois que c’est un point à retravailler. Mais tout le monde me dit qu’il est très difficile d’être à la fois très performant offensivement et défensivement."
"Des joueuses WNBA me veulent dans leur équipe"
Courtisée, elle a pris la décision de prolonger l’aventure à Lyon.
Élue meilleure meneuse du championnat de France, Julie Allemand a eu l’embarras du choix cet été. Les Russes de Koursk, qu’elle rencontrera d’ailleurs en Euroligue, lui ont fait la cour. Tout comme les Françaises de Bourges. Elle a pourtant très vite décidé de resigner pour un an à l’ASVEL.
"Pour plusieurs raisons concordantes", explique-t-elle. "La première, c’est que l’aventure n’est pas finie : nous avons encore des choses à gagner ensemble. J’ai un coach qui me fait confiance et me le montre. Plus un préparateur physique que j’adore, alors que cet aspect était une de mes plus grosses craintes en débarquant à Lyon. Je me dis d’ailleurs que j’ai encore besoin d’un an pour habituer mon corps au rythme de deux grosses rencontres par semaine et c’est dans cet environnement que je me sens le plus à même de le faire. En France, il n’était pas question de jouer ailleurs qu’à Lyon."
"La deuxième raison, c’est que le championnat de France est le plus fort en Europe : les Françaises sont fortes et il y a de plus en plus d’étrangères. Ici, c’est l’équivalent d’un match d’Eurocoupe chaque semaine."
Elle n’a pourtant pas attendu ce séjour à San Antonio pour savoir que la question de la WNBA se poserait inévitablement un jour. Car l’Australie la tente beaucoup moins. Elle a d’ailleurs déjà été draftée par Indiana Fever. "Mais c’est une équipe qui joue le un contre un, ce n’est pas mon jeu. Seattle me conviendrait beaucoup mieux. Je sais que pas mal d’équipes me suivent et je reçois des messages de joueuses qui me demandent de venir jouer dans leur équipe. Mais tout ça, ce sera pour après les Jeux olympiques : je n’ai pas envie de faire la navette avant une année aussi importante. Et quand j’irai là-bas, ce sera avec un maximum d’atouts dans mon jeu, pour ne pas me planter."
JO : "Si on va à Tokyo, ce ne sera pas pour faire de la figuration"
Même dix jours de farniente à Tenerife n’ont pas réussi à effacer tout à fait la déception de Julie Allemand après le championnat d’Europe. Pourtant, avec une cinquième place, les Belgian Cats ont atteint l’objectif initial : la qualification pour le tournoi préolympique de Pékin.
"C’est vrai, mais nous savons toutes que nous avions les capacités d’aller beaucoup plus loin", dit la meneuse liégeoise. "Nous n’avons pas été au niveau des deux tournois précédents. Parce que les adversaires avaient étudié notre jeu et que nous n’avons pas trouvé la solution, parce que nous avions toutes eu une saison très longue… Le point positif, c’est que nous avons toutes grandi."
Entre une médaille à l’Euro et une qualification pour Tokyo, son choix est pourtant vite fait : "Je prends le ticket pour les JO… mais je ne me contenterai pas de ça : si nous allons au Japon, ce ne sera pas pour faire de la figuration. Là, nous n’aurons rien à perdre, et c’est ce que nous aimons. Nous voulons aussi toutes aller aux Jeux pour offrir à Ann Wauters la sortie qu’elle mérite."
Julie est convaincue que les Cats ont encore une grande marge de progression. "Nous pouvons être championnes d’Europe et faire un bon résultat aux JO, montrer que notre parcours au championnat du monde n’était pas un hasard. Ce n’était certes qu’un match pour du beurre, mais nous avons tout de même battu l’Espagne."
Il y a huit ans, elle croyait qu’elle ne pourrait pas jouer à Sprimont
C’est Christian Grandry, le manager des Liège Panthers, qui nous raconte l’anecdote : "Quand Bernard Schoonbroodt et moi sommes allés chercher Julie Allemand à Alleur, elle n’avait que 15 ans et elle n’en revenait pas qu’on lui propose de jouer en D1. Ses parents non plus. Quelques semaines plus tard, plus moyen de la sortir de l’équipe…"
C’était toujours l’époque de Sprimont, trois ans avant le changement de nom et le départ pour le Sart-Tilman. Une nouvelle aventure que Julie n’a pas vécue puisqu’elle est alors partie à Braine.
"J’étais prête à franchir un cap, à vivre plus loin de ma famille, en appartement. Heureusement, la présence de Manon Greczynski m’aidait beaucoup."
En évoquant ce souvenir, elle constate une chose importante, un fil rouge dans sa carrière. "J’ai eu la chance d’avoir de bons coachs dès le début" , dit-elle. "Didier Delmal à Alleur, Bernard Schoonbroodt et Pierre Cornia aux Panthers. Le meilleur, c’était Ainard Zvirgzdins, même si, sur le plan humain, c’était une catastrophe. Avec lui, j’ai beaucoup progressé tactiquement et, aujourd’hui encore, ça m’aide à comprendre Valery Demory."