André Stein se confie sur la nouvelle Coupe Davis: "On méritait une wild-card"
André Stein revient sur les coulisses de la métamorphose de la Coupe Davis.
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Publié le 13-12-2018 à 08h32 - Mis à jour le 13-12-2018 à 14h14
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André Stein revient sur les coulisses de la métamorphose de la Coupe Davis. Président de la Fédération royale belge de tennis et fin connaisseur des coulisses du tennis mondial, André Stein a vécu, aux premières loges, la métamorphose historique de la Coupe Davis.
Après une longue réflexion, la Belgique a voté, en août dernier, pour la réforme de la Coupe Davis. Pour quelles raisons ?
"Initialement, j’étais contre ce changement majeur. Je l’ai clairement dit à l’époque, ce qui m’a d’ailleurs valu beaucoup de réactions au niveau international. Mais plusieurs éléments ont pesé dans notre décision finale. D’une part, la Coupe Davis dans sa version actuelle était en véritable danger de mort. Les gros sponsors, comme BNP Paribas ou Rolex, n’étaient en effet pas satisfaits des retombées et des forfaits récurrents des meilleurs joueurs du monde. Et, d’autre part, j’avais reçu verbalement des garanties sportives et financières pour la place de la Belgique dans la nouvelle mouture."
De garanties s’agissait-il ?
"Sportivquelles ement, il était clairement question de nous donner une wild card pour la phase finale de 2019. Nous avons été finalistes des éditions de 2015 et 2017. Cette promotion aurait eu un vrai sens. Et, financièrement, le projet était très tentant avec, sur le papier, un budget annuel de plus de 120 millions d’euros prévus sur vingt-cinq ans."
Qu’en a-t-il été dans la réalité ?
"Nous n’avons pas reçu la wild-card espérée. La Fédération internationale et Kosmos ont préféré la donner à l’Argentine de Juan-Martin del Potro et à la Grande-Bretagne d’Andy Murray, sans doute pour des raisons de stratégie marketing. C’est évidemment une grande frustration et c’est là qu’on voit que, malgré ses bons résultats, le tennis belge ne pèse pas très lourd sur l’échiquier mondial. Du coup, financièrement, les données ont changé…"
Que voulez-vous dire ?
"La Belgique va devoir disputer un match préliminaire en février au Brésil. Si nous le gagnons, nous aurons accès à la fameuse phase finale de Madrid et à ses importantes retombées financières, à la fois pour les joueurs (600 000 dollars) et pour la Fédération (300 000 dollars). En revanche, si nous sommes éliminés, nous rentrerons à peine dans nos frais."
Le capitaine Johan Van Herck et certains joueurs, comme Steve Darcis, avaient ouvertement milité pour le maintien de la formule actuelle.
"Je le sais. Mais, je le répète, il était essentiel, à mes yeux, de sauver la Coupe Davis qui était menacée de faillite pure et simple. Personnellement, j’avais suggéré d’étaler chaque édition sur deux ans afin d’alléger le calendrier des meilleurs joueurs du monde et de permettre au format classique de survivre. Je n’ai pas été entendu."
Avez-vous le sentiment d’avoir été trompé ?
"Disons que certaines promesses se sont évaporées dans l’air. Je n’ai pas peur de le dire : à mes yeux, c’est un scandale que nous n’ayons pas reçu une wild card. Nous la méritions. Mais les enjeux financiers sont très importants et nous sommes un petit pays."
Pensez-vous que David Goffin disputera le match de qualification au Brésil ?
"Je l’espère mais la décision finale lui revient. Le match se jouera sur terre battue, juste après l’Open d’Australie. Pour lui, c’est le plus mauvais scénario possible. Mais quoi qu’il arrive, on essaiera d’arracher la qualification avec les moyens du bord. Steve Darcis est en passe de renouer avec la compétition. Ruben Bemelmans a l’expérience des grands matchs. Les différends d’Arthur De Greef et Kimmer Coppejans avec la Fédération sont aplanis. Nous avons envoyé, pour approbation, un projet équitable de répartition des gains pour 2019 à tous les joueurs présélectionnés. Mais il est évident que ce match au Brésil, en altitude, ne sera pas facile."
"Talent, coachs et infrastructures"
Avec plus de 240 000 licenciés (155 000 côté néerlandophone, 85 000 côté francophone), le tennis belge se porte plutôt bien. Et ses exploits au niveau international sont même exceptionnels pour un petit pays. "Filip Dewulf, Sabine Appelmans et Dominique Monami en ont été, à la fin des années nonante, les pionniers. Depuis, nous avons chaque année occupé le haut de l’affiche avec Justine Henin et Kim Clijsters, bien sûr, mais aussi Xavier Malisse, Olivier Rochus et, aujourd’hui, David Goffin et Elise Mertens. Pour n’en citer que quelques-uns. Derrière cette réussite, il y a, bien sûr, le talent individuel de ces champions, issus d’une génération spontanée. Mais il y a aussi la compétence de nos entraîneurs, unanimement reconnue à l’étranger, et la qualité de nos infrastructures. Les centres de l’AFT à Mons et de Tennis Vlanderen à Wilrijk sont d’un très haut niveau et favorisent clairement l’éclosion de jeunes champions", a résumé André Stein, présent dans les arcanes fédérales depuis 1991. La politique des deux Ligues, qui favorisent désormais la création de tournois pour nos jeunes, s’inscrit dans la même lignée. Car les succès d’aujourd’hui ne sont, en effet, pas des garanties pour demain.
"Van Herck peut relever le double défi"
Pour la première fois de l’histoire, la Belgique aura, en 2019, le même capitaine en Coupe Davis et en Fed Cup. Johan Van Herck assumera ce double rôle. "Je crois qu’il s’agit vraiment du meilleur choix. Johan a fait ses preuves en Coupe Davis et faisait l’unanimité auprès des joueuses lorsque nous les avons interrogées…" explique André Stein. L’équipe de Fed Cup a connu une année 2018 mouvementée avec, en toile de fond, l’affaire Monami. Pour rappel, après la défaite face à la France en février, la Verviétoise a carrément été éjectée de son fauteuil de capitaine par plusieurs joueuses. Un vrai coup d’État ourdi dans le vestiaire. "J’étais très triste pour Dominique. Malheureusement, c’est comme en football : dans ces cas-là, c’est souvent l’entraîneur qui sert de bouc émissaire. Il ne sera peut-être pas toujours simple pour Van Herck de gérer son agenda. Le prochain match de Fed Cup se jouera ainsi une semaine après celui de Coupe Davis. Mais je crois qu’il peut parfaitement relever le défi…" Quant à la possible arrivée d’un certain Steve Darcis comme capitaine de Coupe Davis, elle n’est pas d’actualité pour le moment. "Steve va d’abord se concentrer sur sa fin de carrière de joueur."