Wimbledon annulé: "Nous pensons que c’est une bonne décision"
Le board du All England Club a pris ses responsabilités en reportant son Grand Chelem.
Publié le 02-04-2020 à 08h35 - Mis à jour le 02-04-2020 à 08h36
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Le board du All England Club a pris ses responsabilités en reportant son Grand Chelem.
Toute la planète tennis espérait dans un petit coin de sa tête que Wimbledon, le plus vieux mais aussi le plus traditionnel tournoi du Grand Chelem, serait celui qui annoncerait des jours meilleurs. Des jours où la crise du coronavirus serait un peu derrière nous et où chacun pourrait reprendre des activités quasi normales. Des jours où les passionnés de la petite balle jaune visionneraient sur leurs écrans des matchs entre les stars actuelles du circuit et pas des rediffusions des plus grands moments de l’histoire du tennis. Mais ce ne sera pas le cas.
Après l’annulation dans le microcosme du tennis d’Indian Wells, considéré comme le cinquième Grand Chelem, et le report de Roland-Garros en septembre, le board du All England Club en charge de l’organisation du troisième Grand Chelem de la saison a décidé que la 134e édition de l’épreuve serait annulée cette année et qu’elle se déroulera du 28 juin au 11 juillet 2021…
Une décision logique quand on sait que l’Euro de football et les Jeux olympiques, qui se disputaient aussi cet été, ont aussi dû revoir leur plan de bataille en déménageant, eux, en 2021. Une option qui n’existait pas pour Wimbledon qui a expliqué en long et en large dans son communiqué tombé à 17 heures en Belgique les raisons de son choix.
Le sport n’est pas au-dessus de la santé globale
"La santé et la sécurité de tous ceux qui œuvrent pour le tournoi, le public, nos joueurs, nos invités, notre personnel, nos bénévoles, nos partenaires, nos sous-traitants et les résidents locaux priment sur tout le reste, ainsi que notre responsabilité plus large vis-à-vis des nombreux efforts de la société pour relever ce défi mondial actuel."
Des propos confirmés par Ian Hewitt, le président du comité d’organisation : "C’est une décision que nous n’avons pas prise à la légère. On l’a prise avec le plus grand respect pour la santé publique et le bien-être de tous. Après un examen approfondi de tous les scénarios, nous pensons que cette mesure est finalement la bonne décision."
À partir du moment où on ne connaît pas encore la date à laquelle chaque personne et donc chaque joueur pourront circuler librement à travers le monde, la tenue d’un tel événement - qui accueille 500 000 spectateurs - semblait irréaliste.
Pourquoi ne pas le reporter ?
Une autre solution pour Wimbledon aurait pu être un report comme l’a fait Roland-Garros. Mais les organisateurs anglais n’ont pas voulu déplacer leur tournoi et le faire jouer plus tard dans l’année quand les conditions de jeu n’auraient pas été idéales avec une plus grande humidité qui aurait rendu le gazon plus glissant et plus dangereux pour les joueurs, mais aussi des journées plus courtes. Et l’option de disputer The Championships à huis clos n’entrait pas dans les plans de l’AELTC car cela mettait aussi en danger la santé des nombreuses personnes qui auraient pu ou dû se rendre sur le site.
De quand date la dernière annulation d’un Grand Chelem ?
Il faut remonter à 1945 et la Seconde Guerre mondiale pour retrouver la trace d’un Grand Chelem annulé. Cette année-là, l’Open d’Australie, Roland-Garros et Wimbledon passèrent à la trappe. En 1973, Wimbledon avait déjà tremblé avec le boycott d’une septantaine de joueurs. Ceux-ci marquaient de cette manière leur soutien au joueur Nikola Pilic suspendu par la fédération internationale pour avoir refusé de s’aligner en Coupe Davis. Une solidarité qu’on ne trouverait plus de nos jours. En 1986, l’Open d’Australie décida, lui, de changer la date de son tournoi. Le Grand Chelem australien se joua donc en décembre 1985 puis en janvier 1987.
Quel impact sur le calendrier ?
La reprise des compétitions était prévue à partir du 8 juin avec la saison sur herbe. Suite à l’annonce de Wimbledon, l’ATP et la WTA ont prolongé la période sans tennis jusqu’au 13 juillet. Ce qui veut dire que les tournois suivants disparaissent du calendrier : Stuttgart (a demandé une nouvelle date), Rosmalen (annulé), Halle (annulé), Queen’s (annulé), Eastbourne (annulé), Majorque (annulé) pour les hommes et Nottingham (annulé), Rosmalen (annulé), Berlin (a demandé une nouvelle date), Birmingham (annulé), Eastbourne (annulé) et Bad Homburg (annulé) pour les femmes. Des compétitions auxquelles Wimbledon avait pensé tout en glissant une petite flèche à Roland-Garros : "Notre décision a donné une certitude à nos collègues du tennis international étant donné l’impact sur les événements sur gazon au Royaume-Uni et en Europe et sur le calendrier plus large du tennis. Nous avons apprécié le soutien de la LTA (NdlR : la fédération anglaise), de l’ATP, de la WTA et de l’ITF pour prendre cette décision, ainsi que de nos amis et partenaires qui organisent ces événements sur gazon qui sont si importants dans la préparation de Wimbledon."
Si plus rien ne change, la reprise se fera avec le tournoi sur terre battue de Hambourg pour l’ATP et ceux de Budapest et Lausanne pour la WTA. Avec ensuite un mélange de tournois sur terre et le début de la tournée nord-américaine vers l’US Open.
"Malheureusement, la pandémie mondiale de Covid-19 ne nous laisse pas d’autre choix, a déclaré ce mercredi Andrea Gaudenzi, président de l’ATP. Une décision que nous avons prise en étroite collaboration avec nos membres et les autres instances dirigeantes du tennis. La santé et la sécurité restent les priorités absolues. Nous ferons tout notre possible pour que le circuit reprenne le plus tôt possible une fois que ce sera sans danger."
Le spectre d’une saison quasiment blanche n’est pas encore présent mais se rapproche tout doucement.
Comme si la reine Elisabeth II était décédée
Les organisateurs de Wimbledon ont contracté une assurance qui sauvera leur santé financière.
Si Wimbledon a pu se permettre d’annuler son édition 2020 sans que l’aspect financier prenne le dessus sur toutes les autres considérations (NdlR : pas vraiment comme Roland-Garros dont le manque à gagner serait d’environ 260 millions d’euros en cas d’annulation cette saison), c’est parce que les organisateurs du Grand Chelem anglais ont souscrit depuis quelques années une police d’assurance dont la prime, selon le Daily Mail, est une somme à sept chiffres.
Ce contrat permettrait aux organisateurs de ne pas voir leur bilan plonger dans le rouge suite à l’annulation de l’épreuve 2020. Et on ne parle pas ici de petites sommes puisque l’édition 2018 de Wimbledon a, par exemple, rapporté 250 millions d’euros. Mais que trouve-t-on dans cette police d’assurance contractée par Wimbledon ?
Il y aurait bien évidemment une clause spéciale pandémie qui protège le plus vieux tournoi du Grand Chelem d’une annulation, mais ce n’est pas tout.
Dans ce contrat, on parle aussi de la famille royale. Une protection est prévue en cas de décès de la reine Elisabeth II (âgée de 93 ans et marraine de l’épreuve même si ces dernières années, c’est Kate Middleton qui représentait la royauté) qui déclencherait un deuil national outre-Manche. Ce qui engendrerait une possible annulation du Championships.
On trouverait aussi dans le contrat une protection pour une annulation à cause d’attaques terroristes.
US Open : "On travaille comme si le tournoi allait se dérouler"
L’Australian Open qui passe tout juste à travers les feux qui ont dévasté le pays, Roland-Garros qui change ses dates sans tenir compte des hautes instances du tennis international et Wimbledon qui prend la décision d’annuler son épreuve. La période actuelle est difficile pour les Grands Chelems, dont le prochain au programme est maintenant l’US Open (24/8 au 13/9). Danny Zausner, le directeur de l’USTA, qui organise le tournoi, a annoncé que le tournoi new-yorkais était pour le moment maintenu aux dates prévues. Mardi, lors d’une conférence de presse organisée dans l’enceinte du stade, transformé depuis quelques jours en hôpital de fortune pour accueillir les malades du coronavirus, il a exprimé son sentiment actuel : "Nous allons continuer de travailler chaque jour comme si le tournoi allait se dérouler, et nous espérons, dans cinq mois, avoir le bonheur de voir les joueurs s’entraîner et jouer sur ces terrains."
Une compensation financière pour les joueurs de la part du tournoi ?
Sans aucun revenu issu des compétitions depuis l’arrêt des tournois, les joueurs peuvent-ils espérer un geste de la part des organisateurs de Wimbledon ? Peut-être si on en croit un passage du communiqué de ce mercredi premier avril : "Nous avons pris en compte l’impact que cette annulation aura sur ceux qui comptent sur The Championships - y compris les joueurs et la communauté du tennis en Grande-Bretagne et dans le monde - et nous développons des plans pour soutenir ces groupes, en travaillant en partenariat avec la fédération anglaise et les autres instances dirigeantes du tennis mondial. Cela vaut également pour notre personnel fidèle, pour qui nous prenons nos responsabilités très au sérieux."
Si Wimbledon veut, par exemple, verser une prime aux joueurs et joueuses, il faudra voir quel modèle sera pris en compte et qui pourra en profiter. Ceux et celles qui seraient rentré(e)s dans le tableau final ou cette catégorie mais aussi ceux et celles qui auraient pris part aux qualifications ? L’avenir nous le dira…
Les spectateurs qui avaient déjà acheté leurs billets seront, eux, remboursés et pourront racheter des tickets pour les mêmes dates pour l’édition 2021.