De la Baraque de Fraiture à Dubaï en 4 jours: Maryna Zanevska participe in extremis aux qualifications pour l’Australian Open
Il y aura huit Belges et pas sept qui tenteront de rejoindre Melbourne, Maryna Zanevska est rentrée in extremis dans le tableau.
Publié le 09-01-2021 à 09h43
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Les qualifications pour l’Australian Open débutent dimanche et il n’y aura pas sept mais bien huit Belges qui tenteront à Dubaï pour les filles (Minnen, Bonaventure, Benoit, Salden) et à Doha (Coppejans, Bemelmans, De Greef) pour les garçons d’arracher leur ticket pour Melbourne. Maryna Zanevska (WTA 252) ayant appris mardi qu’elle entrait dans le tableau.
"Quand la liste des participantes est sortie en décembre, j’étais 15e réserviste, expliquait en toute gentillesse ce vendredi la joueuse de 27 ans. Je me suis dit que j’allais partir à Dubaï si je rentrais dans les dix dernières réservistes car l’organisation prend en charge ton logement et ta nourriture. Je prenais un petit risque, il fallait juste réserver le billet d’avion. J’ai finalement appris la bonne nouvelle mardi et je suis partie pour Dubaï mercredi. C’était agréable de savoir que j’effectuais le déplacement pour jouer. Cela a quand même été la course et stressant. Il fallait faire un test Covid avant de partir puis à Dubaï en arrivant, jeudi, j’ai dû passer un second test et remplir tous les documents administratifs. Je suis restée en quarantaine dans ma chambre pendant 36 heures et j’ai reçu le résultat, négatif heureusement, ce vendredi seulement. Il y a quelques jours je profitais de la neige à la Baraque de Fraiture et là je suis sous le soleil de Dubaï. C’est fou."
Ancienne 105e mondiale, Maryna Zanevska reste sur deux saisons difficiles mais elle affiche encore de grandes ambitions.
"J’ai déjà joué dans un tableau final de Grand Chelem (NdlR : deux fois l’Australian, deux fois Roland, une fois Wimbledon et l’US Open) mais cela m’a manqué l’année dernière car j’étais blessée et j’ai reculé au ranking. Pendant cette période j’ai réalisé à quel point je voulais rejouer un Grand Chelem. Et donc je veux profiter de la chance qui vient de me sourire et je vais donner le meilleur de moi-même. Cette année je veux faire les choses différemment. Avant, je pensais toujours aux résultats. Maintenant je veux me concentrer sur mon travail et sur son processus. Je veux reproduire sur les courts le boulot réalisé avec mon coach. Et je veux aussi profiter de mon métier, de ma passion. L’année 2020 avec le coronavirus m’a ouvert les yeux. Je veux me donner à 100 % pour ma carrière."
Des propos confirmés par son entraîneur, Geoffroy Vereerstraeten : "Maryna affiche toujours de très hautes ambitions. L’année 2020 avec le Covid-19, cela a été un mal pour un bien, cela lui a permis de déconnecter et de prendre du recul par rapport à son job. Cela lui a donné plus de maturité. Elle veut toujours jouer dans des grands tournois. Ici, la préparation a été une adaptation permanente car on ne savait pas si elle partait sur un Grand Chelem ou un 25000 dollars. On a surtout mis l’accent sur le physique. Ce qui lui arrive en ce début d’année 2021, c’est du bonus, on ne s’y attendait pas. Intégrer un tableau qualif de Grand Chelem en étant 252e mondiale, cela n’arrive pas souvent. Les conditions ne sont pas optimales, Maryna s’est entraînée ce vendredi soir pour la première fois à Dubaï et la compétition débute dimanche. Mais on ne va pas se plaindre. Cette participation, c’est un plus sportif car elle va jouer une ou plusieurs bonnes joueuses mais aussi financier avec un prize money de Grand Chelem à la clé."
Et si elle peut réussir une belle perf en se qualifiant pour Melbourne, l’ancienne joueuse de l’académie de Justine Henin ne va pas s’en priver. D’autant plus que l’Australian est son Majeur préféré. Elle y a atteint le tableau final en 2016 et 2017.
"J’ai des souvenirs incroyables à Melbourne, poursuit celle qui habite maintenant Bruxelles. En 2017, j’étais sur le tournoi avec Philippe Dehaes comme coach. J’étais lucky loser après ma défaite au troisième tour des qualifs. J’ai attendu pendant deux jours un forfait ou une blessure d’une joueuse. Juste avant de quitter le site avant la dernière rotation, le superviseur est venu me voir pour me dire que je jouais dans dix minutes car une fille s’était blessée à l’échauffement. J’ai téléphoné à Philippe pour lui dire de venir car il était à l’hôtel en train de faire sa valise. Il pensait que c’était une blague. J’adore l’Australie et je veux y retourner."
"Une fierté pour elle de représenter la Belgique"
L’Ukrainienne de naissance s’est retrouvée du jour au lendemain sans soutien financier.
Arrivée d’Ukraine en Belgique à l’âge de 14 ans, Maryna Zanevska n’a plus quitté notre pays depuis.
"C’est génial pour elle", lança Philippe Dehaes quand il a appris que son ancienne joueuse participerait aux qualifications de l’Australian. "Maryna est arrivée en Belgique en 2007 quand j’étais directeur technique à l’académie de Justine Henin. C’était un espoir ukrainien du tennis et elle n’avait pas beaucoup d’argent. Je lui ai donné ses premières heures d’entraînement chez nous. Elle a ensuite travaillé avec Geoffroy Vereerstraeten et Julien Hoferlin. Après le décès de Julien, Maryna ne voulait plus travailler avec quelqu’un d’autre et on a à nouveau collaboré. Elle a atteint son meilleur classement, 105e mondiale. Elle a ensuite retravaillé avec Geoffroy. Quand elle a quitté l’académie Justine Henin, elle est venue loger chez moi car elle n’avait pas d’endroit pour dormir. Après on lui a trouvé un petit appartement. Ce n’était pas facile pour elle mais elle s’est toujours débrouillée."
Maryna a aussi pu compter sur le soutien de la fondation Hopiness, comme l’explique sa directrice Cindy Vincent : "Elle était sponsorisée par un homme d’affaires ukrainien, pas trop recommandable je pense. Ce dernier l’a laissée tomber du jour au lendemain et elle s’est retrouvée dans l’incapacité de financer sa carrière car ses parents n’avaient pas les moyens. Elle avait terminé l’année top 15 mondiale en juniors et elle commençait sur le circuit. On a directement eu un bon felling avec Maryna, c’est une fille extraordinaire. On l’a soutenue pour payer ses frais de coach, de voyages. Elle était toute seule en Belgique. Ses parents venaient peut-être une fois par an. Elle a été courageuse. Je pense que sans Hopiness, elle n’aurait pas pu réaliser sa carrière. Elle s’est installée en Belgique et a demandé la nationalité belge après quelques années."
Et a défendu les couleurs de la Belgique en Fed Cup en 2017, Dominique Monami, capitaine de l’époque, s’en souvient : "C’était une grande fierté pour elle. Cela lui a même procuré du stress et elle s’est blessée. C’est une fille gentille et adorable. Et c’est peut-être un problème. La niaque que les autres peuvent avoir, cela lui a manqué dans sa carrière. Elle possède un beau tennis offensif et c’est une belle athlète. Mais elle est un peu fragile mentalement et physiquement. Par contre, c’est une fille combative…"
Ce que confirme Philippe Dehaes : "La volonté est toujours présente chez elle, elle continue de bien s’entraîner. Elle y croit toujours. Et pourquoi pas ! Ce ne serait pas la première qui parviendrait à rebondir."