La transformation de Nick Kyrgios
L’Australien, qui a éliminé Daniil Medvedev, a trouvé, à 27 ans, la bonne formule pour faire parler son talent.
Publié le 06-09-2022 à 11h27
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Bien évidemment, il est encore capable de sortir d’un match pendant quelques instants, bien évidemment, il est toujours capable d’un coup de folie ou deux, mais le Nick Kyrgios version 2022 a changé. L’ancien gosse capricieux et colérique est devenu à 27 ans un gros nounours râleur. Un gars pas bien méchant qui amuse la galerie mais qui est aussi capable de performer durablement sur le circuit. L’Australien l’a prouvé ces dernières semaines. Après sa finale à Wimbledon, le natif de Canberra a frappé un grand coup à New York en éliminant en quatre sets (7-6, 3-6, 6-3, 6-2) le numéro 1 mondial Daniil Medvedev.
"En sortant du court, j’étais surtout soulagé que ce soit terminé parce qu’il y a tellement de pression dès que j’entre sur le terrain, tellement d’attentes, tellement d’incertitudes sur ce que je peux produire. Je me suis assis dans le vestiaire, hyper fier de ma performance parce qu’il y a eu un moment où je ne m’en pensais plus capable. Je suis surtout soulagé et très fier."
Passé par des phases de dépression dans sa carrière, Nick Kyrgios, qui défiera le Russe Karen Khachanov en quarts de finale, veut maintenant briller, pas seulement pour lui, mais surtout pour ceux qui croient en lui : "J'ai l'impression de ne pas jouer que pour moi. Beaucoup de gens me soutiennent. Dans le même temps, beaucoup de gens doutent de moi et essaient de me rabaisser en permanence. Tout cela me motive énormément. Cela fait quatre mois que je suis sur la route, loin de chez moi. Pareil pour toute mon équipe. On ne voit pas autant nos familles que les autres joueurs de tennis. J'essaie de rendre cette aventure mémorable pour nous tous. J'espère qu'on va y arriver, rentrer à la maison et fêter cela. Je ne veux pas les laisser tomber. Je me souviens avoir été dans cette même salle après une défaite au troisième tour, c'était le pire des sentiments parce que j'ai énormément d'attentes. Je parviens enfin à être à la hauteur de celles-ci. J'ai travaillé extrêmement dur. Je suis vraiment très motivé. Si je gagne un Grand Chelem, je ne sais pas ce qu'il me restera de motivation parce que c'est très difficile à accomplir."
Mais avant de penser au futur, le finaliste du dernier Wimbledon revient sur le chemin parcouru depuis plusieurs mois.
"J’ai tellement souffert mentalement pendant six, sept ans de ma carrière. Un coup j’avais de très bons résultats, un coup des prestations catastrophiques. Une fois je donnais tout, la suivante je balançais. Je ne savais pas comment gérer tout cela. J’étais beaucoup trop dur avec moi-même. Ce n’était pas sain. C’était un processus d’apprentissage. J’ai énormément mûri. Que je joue bien ou mal, je l’accepte. Je ne change pas, alors qu’avant, c’était les montagnes russes. J’étais épuisé. Aujourd’hui, je connais la voie pour atteindre une finale de Grand Chelem. Pas encore pour la gagner, mais pour l’atteindre. Ce processus, tu ne peux pas le contourner."
Et l’Australien est même fier de la manière dont il a changé sa façon d’aborder son métier.
"J'ai su rebondir après tout ce que j'ai traversé. Je me suis retrouvé dans des situations très difficiles mentalement, des endroits effrayants. Quand je souffrais mentalement, j'étais très égoïste. 'Je me sens mal, je ne veux pas jouer.' Puis je regardais mes proches et je voyais à quel point je les décevais. Je ne voulais plus faire ça. J'ai regardé ma carrière. J'avais le sentiment d'avoir encore beaucoup à donner à ce sport. Je me suis entraîné dur, j'ai fait profil bas. J'ai bossé physiquement. Puis j'ai gagné des matchs. Les victoires aident. Quand la motivation est là, c'est plus facile de s'entraîner. C'est plus facile de se lever le matin quand les choses se passent bien. J'en avais vraiment marre de décevoir mes proches. Aujourd'hui, j'ai l'impression de les rendre fiers. Moins de choses négatives sont dites sur moi. J'ai transformé le récit. J'étais tellement déprimé en permanence, je m'apitoyais sur mon sort. Je voulais changer cela."
Toute la planète tennis se félicite de la transformation de Nick.
"Il a plus ou moins le même niveau que Medvedev"
Éliminé, Daniil Medvedev saluait la prestation de Nick Kyrgios tout en le comparant à deux monstres du circuit : "J'ai déjà affronté Novak Djokovic et Rafael Nadal ; ils jouent de manière incroyable. Nick a plus ou moins joué à leur niveau, dans un style différent. Il a un service incroyable, mais du fond du court, tu n'as aucune assurance de gagner le point. Il joue bien, il sait tout faire. S'il continue comme cela, il peut aller au bout. J'aurais aimé qu'il rate un peu plus."
Certain de perdre son statut de numéro 1 mondial, le Russe se montrait lucide : "Ce n'est pas cool. J'essaie de garder la face, mais je suis déçu. Je ne vais pas pleurer, mais c'est décevant. Je vais être un peu triste pendant quelques jours, la tête dans mon téléphone, sur mon ordinateur ou à regarder des séries. C'était le dernier Grand Chelem de l'année, je n'ai pas été assez bon. J'aurais dû faire mieux."