"Dries" : DVN, créateur de coïncidences

Aurore Vaucelle

L’Allemand Reiner Holzemer signe un beau portait du créateur de mode anversois Dries Van Noten.

Dries Van Noten. Trois mots qu’on entonne en mode printemps-été puis automne-hiver. Le designer anversois, qui a créé une maison de mode à son nom au début des années 90, est toujours dans la place. "On est bien rendu à notre 95e ou 96e défilé, non ?", lance-t-il à la cantonade, en pleine répétition d’un défilé dont le making-of est filmé par le réalisateur allemand Reiner Holzemer. Et on est littéralement happé par l’image documentaire pour 90 minutes.

Dries Van Noten apparaît comme un homme complexe et doux. "Compliqué", dit-il de lui, la mine indéchiffrable. Il est vrai que jamais un adjectif qualificatif ne suffit à décrire le personnage, le terme opposé étant tout aussi juste pour cerner l’intéressé. Voyez plutôt…

Homme de culture classique (ce qu’on retrouve dans ses coupes de vêtements), DVN est aussi punk et pop - il étudie en pleine punk génération à l’académie de mode d’Anvers. Et de fait, sa vision du motif n’est pas du tout académique

Homme humble, il est, dans le même temps perfectionniste, sûr de ce qu’il veut obtenir. Il ne laisse rien passer (la caméra, qui le filme juste avant le lancement des filles sur le podium, le fait sortir de son humilité.

Modéré (il ne porte que du bleu marine ou du bleu ciel), DVN livre à la face du monde une avalanche de couleur, car il l’aime dans ce qu’elle a d’explosif et de sensible. "La couleur peut créer une émotion."

"En fait, je pense tout le temps", dit Dries van Noten, pour expliquer Dries Van Noten. "Ce qui ne doit pas être de tout repos pour ceux qui vivent avec moi." A cette réplique, son partenaire de vie, Patrick Vangheluwe n’agrée pas tout à fait. Tout au plus avouera-t-il qu’il n’est pas simple de partir en vacances avec Dries, qui a tendance à tout minuter. A aucun autre moment, on ne verra dans le chef du compagnon ce qui semble pour DVN lui-même difficile à assumer : sa complexité.

Enfin, Dries van Noten le designer n’est pas un couturier. Encore un paradoxe d’identité. Lui ne commence pas par dessiner une silhouette sur un morceau de papier. Il dépose sur sa table de travail d’astronomiques quantités de tissu, qui ont toutes pour point commun : la tension des couleurs. Et là, sur l’établi, DVN assemble, mixe la couture et le sportwear, délimite le beau du reste, sans tapage.

Lui, l’homme de la maîtrise du beau, a le courage d’avouer, in fine, que les plus belles combinaisons de la vie - la beauté en un mot - naissent de la coïncidence.

"Dries" : DVN, créateur de coïncidences
©IPM

Réalisation : Reiner Holzemer. 1 h 29.

Le film sort largement en Flandre et au cinéma Aventure à Bruxelles.

Vous êtes hors-ligne
Connexion rétablie...