Semaine de 4 jours, droit à la déconnexion, économie collaborative encadrée... Voici les détails du deal pour l'emploi
La Vivaldi s’est accordée sur les mesures du job’s deal ce vendredi.
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- Publié le 17-06-2022 à 17h36
- Mis à jour le 17-06-2022 à 20h24
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La Vivaldi se donne une bouffée d'oxygène. Et casse la petite musique lancinante ces dernières semaines de discussions très compliquées sur les gros dossiers à entériner cet été (budget défense, pensions, budget, etc.). Ce vendredi en fin de matinée, "alors qu'il y avait possibilité de conclure la semaine suivante", les partenaires de la majorité se sont entendus sur un paquet de mesures "emploi" – le job's deal ou deal pour l'emploi -, qui cadre surtout les relations de travail dans le cadre de l'économie collaborative et apporte de la flexibilité sur le lieu de travail. Soumis aux partenaires sociaux (qui ne s'étaient pas entendus), rediscuté en intercabinets, soumis à l'autorité de protection des données, le deal emploi consacre d'abord la semaine de 4 jours.
1. Semaine de 4 jours au lieu de 5
L'idée est ici de permettre à un travailleur de prester quatre fois dix heures par semaine (40 heures) et de bénéficier donc d'un jour de repos supplémentaire ou de réduire son temps de travail pendant une semaine et de l'augmenter la semaine qui suit afin de mieux s'adapter, par exemple, à la garde alternée d'enfants. Dans l'accord de principe "à affiner" en kern fin février, la limite quotidienne de la durée du travail pouvait être portée à 9 heures 30 de travail. On passe donc à 10. "Par ailleurs, le 5e jour doit être considéré comme un vrai jour de repos, et ne peut donner lieu à la prestation d'heures supplémentaires", a ajouté Pierre-Yves Dermagne, ministre de l'Economie (PS).
Précision : les heures supplémentaires seront interdites si le travailleur opte pour la semaine de 4 jours. Il en va de même pour les heures supplémentaires pendant la semaine alternée où le travailleur réduit son temps de travail. "Le but de ces mesures étant de favoriser un meilleur équilibre entre vie professionnelle et privée, il aurait été absurde de les autoriser", précise Pierre-Yves Dermagne.
2. Droit à la déconnexion : les balises
Le secteur public, depuis le 1er janvier, bénéficie d'un vrai droit à la déconnexion, celui de ne pas être "dérangé" pour le travail. La Vivaldi s'est accordée sur ce principe, mais ce sont les partenaires sociaux qui décideront des détails. Le gouvernement a juste fixé les balises. Il y a d'abord la possibilité d'être déconnecté des communications liées au travail à certains moments de la journée et/ou de la semaine. Cela doit faire l'objet d'une CCT au niveau de l'entreprise. La philosophie sous-jacente : "l'augmentation des ressources numériques utilisées à des fins professionnelles a donné lieu à une culture de la connexion permanente qui a une incidence négative sur le respect des temps de repos ainsi que sur l'équilibre entre la vie professionnelle et la vie privée des travailleurs", explique une source gouvernementale proche du dossier. Cette mesure s'appliquera aux entreprises de plus de 20 travailleurs, ce qui avait d'ailleurs offusqué le banc syndical, qui estimait que de facto, cela excluait la très grande majorité des entreprises du champ de la réforme.
3. Droit à la formation de 5 jours par an
Pour améliorer l'employabilité au travail, pour mettre fin à certaines discriminations – les femmes avaient moins de formations que les hommes -, la Vivaldi s'est accordée sur la possibilité d'octroyer un droit individuel à la formation de 5 jours. "Afin de les rendre plus efficaces, beaucoup de formations en entreprise sont actuellement données en ligne. Nous avons pris la mesure de cette réalité. C'est pourquoi le droit individuel à 5 jours de formation par an sera comptabilisé en heures et pas en journée", explique Pierre-Yves Dermagne. En cas de licenciement (avec un préavis d'au moins 30 semaines), une petite partie du préavis peut être prestée librement par le travailleur mis à la porte pour renforcer son employabilité, au travers de formations par exemple, avec maintien de son salaire. "Faire un bilan de compétences ou développer des compétences qui seront utiles pour un futur emploi seront aussi possibles", explique-t-on au cabinet du ministre de l'Economie.
4. Expérience pilote sur le travail de soirée
Sur une base volontaire, pour une période de 12 mois, des expériences pilote vont voir le jour en entreprise. L'idée est de permettre d'introduire du travail entre 20 heures et minuit dans l'e-commerce via une convention collective de travail (il y aura donc implication de la délégation syndicale, quand elle existe), sans avoir à modifier le règlement de travail de l'entreprise. Cela se fera donc sur une base volontaire. Cette mesure sera évaluée par la délégation syndicale de l'entreprise concernée, ainsi que par le Conseil national du travail (CNT) plus tard. "On verra au bout du compte si l'expérience pilote fonctionne ; si ce n'est pas le cas, on fera un pas de côté", a ajouté le Premier ministre Alexander De Croo (Open VLD). "Beaucoup d'entreprises de logistique ne venaient pas en Belgique en raison du frein du travail plus cher après 20h ; cela devrait permettre à certaines d'entre elles de venir en Belgique", a estimé David Clarinval, ministre des Indépendants (MR).
5. Economie collaborative encadrée
"Donner un cadre non contraignant, qui apporte de la sécurité juridique, à une forme d'économie qui a pris de l'ampleur ces dernières années, permettra aussi de créer de l'emploi", résume David Clarinval. L'économie collaborative fait couler beaucoup d'encre, et suscite pas mal de fraudes. L'idée est ici de mieux protéger les travailleurs – ils auront une couverture en cas d'accident – et d'éviter les abus relatifs aux faux indépendants. Mais aussi de définir qui est indépendant ou qui ne l'est pas, en se basant en partie sur les fondamentaux de la "loi Laruelle/Onkelinx" sur les relations de travail, et sur un projet de directive européenne publié fin 2021. Un certain nombre de critères (exigence d'exclusivité, utilisation de la géolocalisation à des fins autres que le bon fonctionnement des services de base, limitation de la liberté d'accepter ou de refuser des missions, la possibilité ou non de développer une clientèle en dehors de la plateforme…) vont permettre de déterminer la relation de travail. "Il y aura des critères spécifiques adaptés aux plateformes donneuses d'ordre", précise une source gouvernementale. "Le rôle de la Commission des relations de travail sera clarifié, et pourra, sur base volontaire, rendre des avis ou des décisions (qui lieront les institutions de sécurité sociale)."
L’avant-projet de loi devrait en principe atterrir avant le 21 juillet. La volonté de la Vivaldi est que les mesures prennent déjà cours soit à l’automne, soit en début d’année 2023.