Pension : comment savoir ce que vous allez gagner ?
La pension concerne tous les travailleurs qu’ils soient salariés ou indépendants. Mais 61 % des Belges disent ne pas en comprendre le mécanisme. Vous en faites partie ? La Libre Eco vous explique.
Publié le 12-12-2022 à 11h06 - Mis à jour le 12-12-2022 à 11h43
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Les constats du 5e Observatoire de la CBC Banque et Assurance “Les Belges et leur pension” sont interpellants : 56 % des Belges pensent qu’ils ne préparent pas assez leur retraite et 61 % disent même ne pas en comprendre le fonctionnement.
Pour Patrick Wangneur, Conseiller en Structurations Patrimoniales et Prévoyance chez CBC Banque, “il semble évident que le sujet de la pension est passé à la trappe dans l’esprit d’une majorité de Belges face aux récentes actualités traumatisantes qu’il s’agisse de la crise Covid ou du conflit en Ukraine. Toutefois, nous observons déjà depuis plusieurs années que le mécanisme des pensions en Belgique est très mal compris des Belges. ”
Le principe est simple : en Belgique, la pension se construit comme un temple, elle repose sur plusieurs piliers. Le premier dépend de l’Etat. La pension légale est accordée à tous les citoyens, qu’ils soient employés ou indépendants, selon la durée de leur carrière. Le second, la pension complémentaire, est accordé par certains employeurs. Les travailleurs doivent s’assurer qu’elle est prévue dans leur contrat de travail. Pour ceux qui n’en bénéficient pas, y compris les indépendants, la construction de ce pilier dépend d’eux. Le troisième, appelé épargne-pension, est entièrement volontaire. Les citoyens versent à leur banque ou à leur assurance un certain montant et espèrent le récupérer, avec intérêts, en fin de parcours. Enfin, cerise sur le gâteau, les Belges peuvent également constituer, auprès de leur banque ou assurance, une “épargne libre” sur base d’investissements complémentaires.
Au minimum, le temple a besoin de deux piliers pour le soutenir. Mais plus les fondations sont solides, moins le différentiel entre le salaire actuel et la pension sera important.
Premier pilier : la pension légale
”La première étape pour préparer sa retraite est de se connecter sur mypension.be”, conseille Patrick Wangneur. “Cet outil estime le montant de votre pension selon les conditions prévues par la loi”.
En principe, les Belges accèdent à la pension à l’âge de 65 ans. Ceux qui le souhaitent peuvent demander un départ anticipé, mais cela impactera nécessairement le montant perçu. La loi considère, en effet, que le travailleur doit avoir accumulé 45 ans de carrière pour percevoir sa pension complète. Sinon, le montant de leur pension sera calculé au prorata du nombre d’années de travail. Si le travailleur pensionné n’a travaillé que pendant 41 ans, il recevra 41/45e de sa pension légale complète. D’après l’enquête menée à la demande de CBC, une fois pensionnés, 65 % des Belges comptent en priorité sur leur pension légale.
S’agissant d’un droit octroyé par l’Etat, il est susceptible d’être réformé. D’ailleurs, en septembre dernier, Karine Lalieux (PS), ministre des Pensions, a annoncé “une réformette” de la pension légale. Celle-ci prévoit notamment l’octroi d’une pension minimum de 1500 euros nets à toutes personnes justifiant de 30 années de carrières dont 208 jours de travail effectif par an pour les temps pleins, ou 156 jours de travail effectif par an pour les temps partiels. La réforme prévoit également de récompenser, via l’octroi d’un bonus pension, ceux qui continuent à travailler après la première date possible de leur départ à la retraite.
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Il semblerait que cette réforme n’ait pas marqué les esprits : seul un Belge sur cinq dit en avoir pris connaissance. “C’est interpellant”, estime Patrick Wangneur, “même s’il ne s’agit pas d’une réforme en profondeur, qui aurait probablement plus attiré l’attention de la population.”
Deuxième pilier : la pension complémentaire
Ce pilier dépend du statut du travailleur. En principe, la pension complémentaire des salariés est prévue dans leur contrat de travail. Leur employeur peut – mais ne doit pas – prévoir une assurance groupe ou un plan de pension. “Ce pilier est souvent négligé par les travailleurs. Pourtant, il est très important de se renseigner. Certains employeurs promettent un plan pension à leurs salariés mais les montants prévus sont plus que symboliques. C’est bon de le savoir”, prévient Patrick Wangneur.
Si rien n’est prévu, les salariés peuvent contraindre leur employeur à constituer une pension complémentaire. “C’est rarement utilisé. Les employés ont peur de se mettre dans une situation délicate vis-à-vis de leur patron donc ils préfèrent s’en passer”, estime le conseiller de CBC.
Les indépendants, quant à eux, peuvent souscrire à une pension complémentaire libre qui offre des avantages fiscaux et sociaux particulièrement intéressants. Les cotisations sont déductibles fiscalement pour un montant maximal de 3 447,62 €.
Troisième pilier : l’épargne-pension
D’après le SPF Finances, “l’épargne-pension est une formule d’épargne à long terme qui permet de constituer une pension complémentaire à la pension légale, et, sous certaines conditions, de bénéficier d’un avantage fiscal.” C’est le moyen le plus utilisé pour se préparer à la pension. En moyenne, les Belges commencent à épargner dès 29 ans. “C’est une très bonne nouvelle de constater que les Belges mobilisent tôt leur argent en vue de leur pension. Même si cela relève probablement plus d’un réflexe d’épargne et d’un avantage fiscal que de prévoyance en tant que telle”, explique Patrick Wagneur.
La plupart des assureurs proposent des produits de la branche 21, c'est-à-dire un produit d’épargne à moyen ou long terme sous forme de contrat d’assurance vie. Ceux-ci proposent un taux d’intérêt garanti. Une solution avantageuse, malgré les taux particulièrement bas de ces dernières années assure Patrick Wagneur : “Pendant longtemps, ils ont tourné autour de 0,5 %. Mais ils sont en train de remonter et on espère qu’ils atteignent les 1,5 % ou 2 % d’ici début 2023.” A cela s’ajoute une éventuelle participation aux bénéfices selon les résultats financiers de l’assureur.
Il est aussi possible de constituer son épargne-pension auprès de sa banque. Dans ce cas, l’argent est investi dans une SICAV, Société d’Investissement à Capital Variable, ou un fond commun de placement. Les taux d’intérêts ne sont pas garantis d’année en année mais, sur le long terme, on peut s’attendre à un rendement supérieur.
Cette forme d’épargne est encouragée fiscalement par l’État qui prévoit une déduction d’impôt de 30 %. “Cette mesure coûte très cher à l’État. C’est pourquoi l’épargne-pension est tant encadrée et les montants que l’on peut verser, plafonnés”, poursuit le conseiller.
Quatrième pilier : l’épargne libre
L’épargne libre comprend toutes les formes d’épargnes mobilières ou immobilières constituées à titre personnel. On y retrouve le compte épargne, le capital immobilier, et les investissements réalisés auprès des banques ou assurances. “C’est la cerise sur le gâteau !” s’exclame Patrick Wagneur. “Il n’y a pas de déduction fiscale prévue pour cette forme d’épargne, mais ça peut aussi être vu comme un avantage. On est beaucoup plus libre dans nos investissements. Il n’y a pas de plafond, on a accès à beaucoup plus de produits. Il est tout à fait envisageable, par exemple, d’investir par petites tranches dans des SICAV.”
Cependant, si les Belges ne se préparent pas suffisamment à la pension, ce n’est pas une preuve de mauvaise volonté. 63 % d’entre eux avouent ne pas avoir les moyens d’épargner pour l’avenir. Avec la crise économique et la baisse du pouvoir d’achat, il est déjà difficile de joindre les deux bouts. C’est pourquoi la majorité des Belges comptent, avant tout, sur leur pension légale.